J'entends par là un état pendant lequel mon corps ne semble plus piloté par ma volonté, mais par quelque esprit autre que le mien. Concrètement, je me retrouve à faire des mouvements, des grimaces, des sons, à chanter à danser ou à parler en protolangage pendant une dizaine de minutes. Cela est surprenant pour moi autant que les personnes qui m'accompagnent. Dans les heures qui suivent, je me sens intensément bien, les idées claires, plein d'énergie, mais un peu troublé aussi par ce qui vient de se passer et dont je n'ai pris que partiellement conscience.
La première fois c'était en 2017 après une séance de respiration holotropique : Allongé sur le dos, j'inspire à fond : ventre... poitrine... clavicules, puis j'expire vivement par la bouche et j'enchaîne selon le rythme donné par mon partenaire, assis sur son zafou. Après quelques minutes mes avant-bras sont comme paralysés et deviennent douloureux. Mes pouces, en particulier, ne fonctionnent plus. Alors je lève les bras et je commence à faire bouger mes avant-bras, mes poignets, mes mains, comme si je dansais. Puis la danse se précise, se fait transe puis extase. Je sens aussi ma bouche se contorsionner en grimaces inconnues et cela me détend extraordinairement les traits du visage. Je sens la présence d'une Energie, partout autour de moi qui me traverse et me connecte avec tout ce qui existe. Je ressens aussi la joie essentielle, immense de faire partie du vivant.
Le dos au sol, yeux fermés, mes bras et mes jambes dansent puis je m'étire et j'étends à fond bras et jambes, mains et pieds. Peu à peu je suis comme possédé mais pas inconscient.
Voir article https://emagicworkshop.blogspot.com/2017/12/rebirth.html dans ce blogLe dos au sol, yeux fermés, mes bras et mes jambes dansent puis je m'étire et j'étends à fond bras et jambes, mains et pieds. Peu à peu je suis comme possédé mais pas inconscient.
Puis, j'ai découvert l'ecstatic-dance. Ouverture de la session, nous sommes une cinquantaine de danseurs.es, d'abord des chants, puis mise en corps, enfin la musique commence, va crescendo la danse devient de plus en plus physique et tout à coup, c'est comme si je franchissais une porte, comme si je traversais un mur. Mon souffle change, devient plus profond, moins saccadé et mes mouvements s'amplifient. Je ne ressens plus d'essoufflement ni de limitation musculaire. Vu de l'extérieur, je ne sais pas ce que ça donne, mais j'ai l'impression de beaucoup mieux danser. Plus vite, plus fort. Intérieurement, c'est magique, je ressens physiquement la musique et j'ai le sentiment d'interpréter cette partition par les mouvements de mon corps.
Lorsque ce processus s'arrête ( après une dizaine de minutes) je me sens extraordinairement bien, baignant dans un mix de gratitude, de sérénité et de clarté mentale. Deux titres dont je me souviens particulièrement m'ont produit cet effet pendant une ecstatic dance en compagnie d'une cinquantaine d'autres danseurs. Ces deux titres sont 'an analog guy in a digital world' de Martin Roth, c'était lors d'une sorte d'afterlife après 2 heures de danse intense et le bouzouki du film Zorba le grec que le MC avait posé au crux de la session !
Changa. Depuis quelques temps, un an environ, lorsque je fume la changa, il se passe de drôles de trucs. je ne suis plus seulement spectateurs de somptueuses coupoles qui s'érigent dans le ciel ou d'attelages divins qui le parcourent (cf trip reports dans mon article de blog https://emagicworkshop.blogspot.com/2022/04/dimitrips-et-moi.html), mais je prends aussi physiquement part à l'expérience. La première fois fut sur l'appel d'un tambour chamanique, avec des amis, par une belle nuit d'été. Nous avions tous plus ou moins fumé la changa et moi, j'avais mon compte. A un moment mon voisin, bien allumé aussi s'est levé du banc depuis lequel nous contemplions les étoiles et s'est mis à parler 'en langue' (protolangage) avec notre pote qui jouait le tambour. Sa diction était rapide et fluide bien que la langue qu'il utilisait soit inconnue de nous tous comme de lui même. Puis il y a eu ce chant, repris en cœur par les copaines puis poussé à l'extrême, en vocalises d'opéra pour finir en un hurlement cathartique solo dont je ne me serais jamais cru capable.
Plus tard cet été, une autre session, juste un darbouka, un didjeridoo une guimbarde, quelques taffes et me voilà parti dans un breathwork extrême qui alternait apnées, hyperventilation, chant diaphoniques et miaulements chamaniques. Mon ressenti était celui d'un animal logé en moi, qui tentait de se faire connaître, qui voulait sortir. Aux sons se mêlaient des grimaces et des contorsions et ce sentiment maïeutique de toucher quelque chose de tellement ancien, tellement profond, et terriblement incongru aussi.
Transe de possession. Ma dernière expérience de transe date de la semaine dernière. Cette nuit, avec quelques amis nous avons pris des champignons psilocybes qui poussent actuellement sur les montagnes. Ajouté à ça, quelques taffes de changa. A un moment je sors sur la terrasse. Comme je suis appuyé par mes des deux mains à la rambarde avec le bassin en arrière , un mouvement commence à s'imprimer dans mon corps. Une figure en forme de huit au niveau des hanches, de plus en plus ample. Peu de temps après, je remarque que l'air que j'inspire prend une densité nouvelle. Cet air est devenu un fluide, il roule dans mes poumons très harmonieusement et agréablement selon le rythme des inspirations et des expirations. Ensuite, je m'aperçois que, comme l'autre fois avec la danse, mon rythme respiratoire change radicalement et devient plus ample. Mais ce n'est plus moi qui donne ce rythme. Quelque chose autre respire à ma place, beaucoup plus amplement avec un grand art du souffle. Une sorte de jonglerie faite de l'air qui entre et qui sort. Puis je ferme les yeux; j'ai la vision très nette d'un tourbillon en forme d'entonnoir, de puits par lequel 'quelque chose' entre d'un coup en moi et instantanément prend le contrôle de mon corps. Mes amis sont toujours là, autour de moi. Je pourrais interrompre ce processus , mais je le laisse continuer et ce souffle se transforme en un chant guttural et bizarre qui sort de ma bouche. J'exécute une sorte de danse chtonienne accompagnée par la musique de mes psalmodies. Tout cela me paraît très ancien, primal, chtonien comme la célébration de quelque culte oublié. La scène dure 5 minutes peut être, puis je reviens à moi. Mes amis me demandent comment je vais ou font mine de ne pas avoir vu ça. Et moi j'ai le sentiment très net d'avoir été investi par un esprit qui est entré en moi et a utilisé mon corps pour s'exprimer là, sur ma terrasse. Je me sens un peu secoué, je me demande quelle est cette entité que j'ai sentie mais que je n'ai pas vue, et je me sens aussi fortement énergisé, confiant.
Ozias 03/10/25