mardi 26 novembre 2013

Francis Bacon, l'effroyable viande*

Francis Bacon. Autoportrait à l'oeil blessé.
'Un triptyque de Bacon vendu pour 142 millions de dollars'
Le Monde.fr avec AFP, AP et Reuters | 13.11.2013 à 03h21

Au delà de sa valeur marchande, que nous dit la peinture de Bacon, en quoi nous touche t'elle  ? 
'La peinture de Francis Bacon (1909-1992) est angoissante. Elle nous met mal à l'aise. Elle montre une viande à l'état brut qui nous rappelle notre condition. Mais, elle est surtout sans concession comme pour dire que le corps n'est que le vestige de la viande'.
Dans ses tableaux, Francis Bacon nous dit : "Nous sommes de la viande, nous sommes des carcasses en puissance".  

Francis Bacon va plus loin que le corps, il cherche à faire parler la chair. Il étudie les sensations de la chair. La chair, c'est la matière du corps. Tout comme la peinture est la matière du tableau ou la pierre celle de la sculpture. La chair constitue la matière du corps vivant. Maintenant comment en exprimer les sensations? Francis Bacon interroge la chair en la tordant, en la crispant. Il tape dans la chair pour en apercevoir les tensions, les forces qui s'exercent contre elle. Ses figures sont contorsionnées, elles sont à la limite de se briser les os, la chair est abîmée, malmenée, presque torturée. Il est important d'ajouter que Francis Bacon ne peint pas des personnages, il ne représente pas une histoire, il n'est en aucun cas figuratif. Il est dans l'expression pure d'une figure faite de chair. Sa figure c'est la chair. On pourrait dire qu'il a personnifié la chair pour le comprendre d'un point de vue illustratif. "


Francis Bacon peint le corps.

Francis Bacon. Portrait de Henrietta Moraes.1963.
"Je te frapperai, sans colère et sans haine, comme un boucher, comme Moïse le Rocher" Baudelaire. Héautontimorouménos. Fleurs du mal.


Estampe.
 "Si une chose est transmise directement, les gens sentent cela comme horrifiant. Ils ont tendance à s'offenser des faits, de ce qu'on a l'habitude d'appeler 'Vérité'." 


Etude pour le corps humain. 1949.

Innocent II. Velasquez.1650
"Ce que je veux faire, c'est déformer la chose et l'écarter de l'apparence, mais dans cette déformation la ramener à l'enregistrement de l'apparence". Francis Bacon.

Francis Bacon ne peint pas l'horreur, il peint le cri.

Le portrait original du Pape Innocent II par Velasquez est empreint d'une grande violence. Dépourvu de miséricorde, ce pape menaçant est aussi menacé par son propre corps. Trois siècles plus tard, Francis Bacon, obsédé par cette image transforme le souverain pontife de Velasquez en un pape hurlant qui semble précipité en enfer. Bacon a été sensible à a la force dénuée d'hypocrisie de ce portrait.


Le pape Innocent X. (Thème fréquent d'après le tableau de Velasquez).
Fragments d'une crucifixion.
Triptyque. 1949.
Crédits :
Philippe Sollers. Les passions de Francis Bacon. Gallimard 1996.
http://tousviandes.blogspot.fr/2013/07/boeufs-ecorches-ou-la-sensation-de-la.html
*Bacon, l'effroyable viande. Alain Milon. Encre Marine.

Pour les curieux, un film de Georges Franju 1949. 'Le sang des bêtes'. Musique de Joseph Cosma.

3 commentaires:

  1. Il y a là, sur ce mur, "quelque chose comme l'embrasement sans bruit du monde."

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  2. "Il était un grand mur blanc — nu, nu, nu,"

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  3. ce qui compte c'est l'excitation d’être en vie.....

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