mercredi 27 juillet 2016

Heidegger, le néant etc

Depuis Nietzsche, la vie est principe de tout et la volonté conçue comme machine à vouloir pour vouloir bascule dans l'absurde. La philosophie de Martin Heidegger montre que notre époque manque de fondements fermes et qu'on ne peut pas vivre dans l'absurde. "L'enracinement" de notre être est fondamental pour donner un sens à nos existences. 
Pour ce philosophe, nos affects sont les liens entre la vie et la pensée. Partant de là, Heidegger cherche à saisir le sens de l'Etre, de son enracinement, et de sa réalisation au beau milieu du néant qui nous hante et dont la science ne sait que faire.

A une époque où la raison constitue l’unique référence à partir de laquelle toute connaissance doit pouvoir trouver son fondement, Heidegger affirme que la science ne pense pas et  que la philosophie n’est pas science. Effectivement, ce n'est pas parce qu'un système économique ou une machine à laver fonctionnent bien qu'ils ont un sens. Pour lui La poésie est seule capable d'exprimer les pensées, aux frontières du langage qu'il cherche à saisir, ce langage dont il dit qu'il est la maison de l’être. Son souci du langage rend ses textes parfois aussi abscons que du Lacan. 
Ainsi, il décortique systématiquement  l’être en trois états:  l'Etant, le Dasein, et l'Etre. L’étant, ce sont les choses, nous même, tels que nous les connaissons sous leurs aspects habituels. L'Etant constitue le matériau de la science. 
Le Dasein (de l'allemand 'da sein' = être là), signifie la transcendance de l’étant vers la réalisation de l’être. C'est une représentation de l'existence en constant devenir. Ainsi, l'homme ne vient qu'une fois au monde (le jour de sa naissance), par contre « il vient constamment au Dasein aussi longtemps qu'il vit ». 
Illustration : 
Une patate, qui se pèse et se vend pour faire des frites ou de la purée c'est de l'Etant.
Le Dasein de la patate c'est sa germination qui pourra seule la transformer en plante.
L'Etre c'est la plante de pomme de terre qui fleurit et se reproduit en pleine terre.
Ainsi, dans "Sérénité" Heidegger cite le poète JP Hebel :" Qu'il nous plaise ou non d'en convenir, nous sommes des plantes qui, s'appuyant sur leurs racines, doivent sortir de terre, pour pouvoir fleurir dans l'ether et y porter ses fruits". 


Tandis que l’ennui et la joie révèlent l’Etant dans son ensemble, l’angoisse révèle le néant et nous fait percevoir l’Etant dans sa parfaite étrangeté. Sans la manifestation originelle du néant, il n’y a ni individuation ni liberté. Pour Heidegger, le néant est antérieur au « non » et à la négation. Puisque la science ne veut rien savoir du néant, Heidegger fait du néant la clef de voûte de sa pensée. « Le néant reste fondamentalement inaccessible à toute science. Celui qui veut parler véritablement du néant doit nécessairement devenir non scientifique.»
Pour lui le temps naît nanti du néant et l’homme est le lieutenant, la sentinelle du néant
« C’est uniquement parce que le néant nous est révélé dans le fond du Dasein que la complète étrangeté de l’étant peut nous assaillir. C’est uniquement à la condition que son étrangeté nous oppresse, que l’étant éveille et attire sur soi l’étonnement."
Bref, l'Etre ne peut se réaliser que grâce la finitude que lui promet le néant. Le néant est à la fois un puits d'angoisse et une source de liberté.

La lecture de Heidegger est difficile autant que sa hauteur de vue est vertigineuse. A une telle altitude on a parfois du mal à distinguer les objets dont il est question. Par exemple : de quoi parle on quand on parle de l'être ? est-ce l'homme ou l'individu ou plus généralement 'les choses' ? Les textes de Heidegger me semblent souvent abstrus, ils taclent les limites de la langue allemande et se heurtent donc au problème de la traduction. 
Comme Nietzsche ou tout grand philosophe sa pensée peut être interprétée de multiples façons. 
J'attends notamment vos commentaires sur la question suivante (qu'il pose en conclusion de 'qu'est ce que la métaphysique ?')
"Pourquoi y a-t-il quelque chose, plutôt que Rien ? "

Heureux Dasein à vous,

Ozias

"Heidegger est le plus grand des penseur et le plus petit des hommes"  Hans Geog-Gadamer 


Superbe analyse du positionnement de Heidegger https://www.youtube.com/watch?v=-fUjHGN9biM

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mercredi 13 juillet 2016

les cadres, des dominants dominés




Avec l’avènement du capitalisme financier dans les années 90, les cadres ont perdu le pouvoir au profit des actionnaires. Les technologies de l’information (mails, logiciels, portables, mobiles) ont transformé leur activité, l’accélérant et la contrôlant davantage tout en effaçant les frontières entre travail et vie privée. Pourtant les cadres continuent de consentir au capitalisme moderne. Dans leur ensemble, ils croient en la mondialisation, valorisent l’autonomie dans le travail et louent la recherche de la performance.

Quelques paroles de cadres aussi bien formatées que pétries d'ambiguïtés :

«Un cadre ne compte pas ses heures »
«C’est face au mur qu’on est vraiment stimulé »
«Même si les filiales sont très autonomes, si les cadres sont très autonomes dans leurs missions, quelque part on a aussi beaucoup de comptes à rendre »
«Autonomie dans la conduite du projet, mais absence de maîtrise des budgets, des moyens, des effectifs et des délais»


Les cadres se comportent comme d’indécrottables premiers de la classe. Dès l'enfance, la famille et l’école leur ont  incorporé leurs qualités de sérieux et de servilité. Scolarités épanouies, bacs avec mentions, jeunesses sacrifiées aux classes de sup et de spé, école d’ingé et c’est parti, vous voilà cadre pour la vie avec la vie qui va avec. Une vie dont les valeurs sont travail, performance et fiabilité. Vingt ans près leur sortie de l'école ils continuent à donner le meilleur d'eux même pour atteindre leurs objectifs, se prouver qu'ils ont bons, valider leur évaluation de performance annuelle.  Les entreprises où travaillent les cadres ne leur appartiennent pas mais elles profitent de cette main d’œuvre fiable, apte à diriger et prête à s’auto-exploiter à grands coups de challenges et de performance.

Les cadres acceptent leur position de dominants dominés car ils n’ont pas d’autre solution que de consentir au capitalisme moderne à moins d’abandonner les avantages de leur position sociale. Les satisfactions issues de leur travail (sentiments d’autonomie, de réalisation de soi), d’acquisition de nouvelles compétences leur  procurent l’impression de travailler pour eux alors que l’entreprise qui les emploie leur extorque des soumissions qu'ils ne perçoivent pas comme telles.
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D'après: Des dominants très dominés. Gaétan Flocco, éditions Raisons d'agir

mercredi 6 juillet 2016

naissances

On a tendance à vouloir l'oublier, mais une naissance est un événement aussi heureux que violent. Le photographe Christian Berthelot a photographié les premiers instants d'une une quarantaine de bébés accouchés par césarienne. Voici un aperçu de ce travail :


Leanne, née le 8 avril 2014 à 8h31. 1,745 kg. Âgée de 13 secondes.
Lize, né le 24 décembre 2013 à 8h49. 3,574 kg. Agé de 9 secondes.
Steven, né le 21 décembre 2013 à 16h31. 2,425 kg. Agé de 15 secondes.
Kévin, né le 27 décembre 2013 à 10h36. 4,366 kg. Agé de 13 secondes.
Liza, née le 26 février 2013 à 8h45. 3,2 kg. Agée de 3 secondes.