mardi 30 octobre 2012

Lieux saints


Les effets indésirables très fréquents avec l’association de l’interféron alfa pegylé et de la ribavirine sont notamment :
Affections gastro-intestinales : diarrhée, nausées, douleurs abdominales,…  et parfois aussi constipation
Ces effets concernent  plus de 10 hépatants sur 100 !
Que ce soit trop ou trop peu, le temps du traitement, les toilettes deviennent un lieu de vie assidûment fréquenté. Autant rendre ces stations aussi confortables qu’elles peuvent l’être et pourquoi pas, dans la mesure du possible, tirer profit de ces villégiatures impromptues  et des pauses lectures qu’elles nous autorisent. A cet effet, voici quelques opuscules, bien dans le ton, qui siéront à ces lieux de repli où il fait bon siéger et nous réconcilieront avec nos fonctions essentielles si sollicitées ces temps ci.

Henry Miller  est résolument contre l'idée de lire aux cabinets. Voici un petit aperçu de sa prose manière de vous mettre l'eau à la bouche ou le cigare aux lèvres:
Il existe un aspect de la lecture qui vaut, je crois, qu'on s'y étende un peu, car il s'agit d'une habitude très répandue et dont, à ma connaissance, on a dit bien peu de choses...je veux parler du fait de lire aux cabinets. ..../... 
D'après ce que j'ai pu glaner au cours de mes conversations avec mes amis intimes, ce qu'on lit aux cabinets, c'est presque toujours de la lecture futile.../...Même aux cabinets, où l'on pourrait croire qu'il n'est pas nécessaire de faire quoi que ce soit, ou de penser à quoi que ce soit, où une fois par jour au moins on est seul avec soi même et où tout ce qui se passe est machinal, même ce moment de béatitude  il faut le rompre en se concentrant sur la matière imprimée. ../...
S'il est d'une importance vitale de nourrir son corps et son esprit, il est tout aussi important d'éliminer de son corps et de son esprit ce qui a rempli cette fonction. Ce qui ne 'sert pas', ce qui est 'accumulé', finit par empoisonner. Il s'ensuit donc , comme la nuit suit le jour, que si l'on va aux cabinets pour éliminer les déchets qui se sont amassés dans l’organisme  on se rend un mauvais service à soi même en utilisant ces précieux moments pour se remplir l'esprit de 'camelote'.



La Pissotière, est un  roman de Warwick Collins paru en 1997 aux éditions 10/18. Cent quarante pages en vingt chapitres vites torchés dans la quiétude des 'waterres'. Voici ce que nous en dit la quatrième de couverture.

Ez, Reynolds et Jason, trois immigrants jamaïcains, sont 'hommes de ménage' dans des Toilettes Messieurs situées dans le centre de Londres. L'endroit est fréquenté essentiellement par des homosexuels, qui en ont fait un lieu de rendez vous très actif. La réputation de l'établissement public se dégrade de jour en jour. Décidant de réagir, la municipalité charge Ez, Reynolds et Jason de se débarrasser des indésirables. 
Les conséquences seront plutôt inattendues . Drôle et peu conventionnel, traversée par des personnages de femmes jouant un rôle capital dans l'histoire, cette fable donne à réfléchir sur toutes les formes de racismes. 


Traduit de l'américain 'How to shit in the woods' (Kathleen Meyer1989).Table des matières:
Chapitre un : L'anatomie d'une merde
Techniques- Styles - Se mettre à l'aise
Chapitre deux : En creusant votre trou..
Types de sol - Les problèmes en hiver - Les problèmes en mer ...
Chapitre trois : Lorsque vous ne pouvez pas creuser le trou
Zones très fréquentées - Ecosystèmes sensibles ...
Chapitre quatre : La complainte du chieur solitaire
Containers individuels - Des scarabées - Technique du glaçage...
Chapitre cinq : Le trot du trekkeur
Les diarrhées - Négocier avec l'inattendu - Systèmes de filtres...
Chapitre six : Pour les femmes seulement
Les techniques pour pisser - Problèmes des règles...
Chapitre sept : Quoi ? Pas de PQ ?
Les alternatives de la nature - Manger comme un cheval ...


Exotisme et voyage maintenant. Célèbre rouleau à peintures japonais du milieu du XVème siècle, 'La déconfiture de Fukutomi'  raconte l'histoire d'un pauvre vieillard qui reçoit d'un dieu le don d’émettre des pets mélodieux, ce qui fait sa fortune. 
Son voisin Fukutomi veut l'imiter, mais le vieillard chanceux le trompe en lui faisant avaler un purgatif, si bien qu'il échoue piteusement. 
Original par son thème scatologique  cet ouvrage paru aux éditions Philippe Picquier se lit comme un manga , le texte étant presque exclusivement constitué par les dialogues des personnages.

Enfin pour les fines bouches et les cinéphiles avertis, 'Lieux saints'.  Un documentaire de moyen métrage dédié aux lieux d'aisances. Palme d'or à Alain Cavalier pour ce  "poème en prose numérique" entièrement consacré au petit coin.


jeudi 25 octobre 2012

La mort n'est pas une maladie

Marronnier. Fleur et feuille.
Voilà bien un  sujet bien de saison, ce qu'on peut appeler 'un marronnier' (le marronnier est cet arbre qui refleurit chaque année à date fixe). Donc, à l’occasion de la Toussaint, d’halloween, de la fête des défunts, voici quelques mots à propos de la mort, et  plus précisément sur la fin de la vie.  Pratiquement, quelles portes de sorties se présentent à nous  et quels sont leurs avantages ou inconvénients selon moi et aujourd’hui.

Avant d'avoir été malade, situation qui m'a fait réaliser que je pourrais être 'en coquetterie avec la mort',  j'étais plutôt partisan d'une mort rapide, qui me prendrait par surprise, sans que je m'en aperçoive. Du genre tu vas te coucher et puis tu ne te réveilles plus jamais. Ou bien encore, seul au volant la nuit un arbre traverse ta route à 200 km/h (aussi vite que Senna).  Ou encore mieux, connaître la très sainte épectase, climax d'une ultime étreinte. Bref, pas de temps à perdre avec une maladie surtout si elle doit être longue, et sans doute douloureuse. L'amour de la vitesse quoi. La mort sans s'en rendre compte, comme si elle n'existait pas.

Une autre option, assez proche,  est celle d'une mort  'dans la pleine possession de ses moyens'. En d'autres termes, se faire mourir en bonne santé. Naturellement cela sous-entend volonté et préméditation (comme Beregovoy). Je trouve que c'est un mauvais exemple pour les enfants, et que ça culpabilise ceux qui restent. Même si il ne faut jamais dire jamais, la hantise de mourir idiot me dissuade d’accélérer par tel ou tel moyen  l'inéluctable. 

Depuis peu, j'ai dû vieillir, ou grandir en sagesse comme vous voudrez, mais tout bien pesé, je préfère mourir d'une longue maladie, même si je me dis que ça doit quand même être plus facile au début.
Pourquoi  une longue maladie ?  Et bien, le temps de se préparer et d'arranger, autant que possible ses petites affaires manière de ne pas rater ‘ça’. Je ne me souviens pas comment je suis arrivé ici, ce serait bien dommage de filer à l’anglaise sans même faire d'adieux. Il me semble aujourd'hui que le top de l’art de vivre c'est de profiter de la vie jusqu'à sa fin en faisant l'expérience d'une telle situation sans suite ni précédent. Ne plus avoir peur d'affronter sa vie. Apprendre à se passer de soi-même et fumer ce qui reste dans le tapis. Jusqu'où  peut-on ?


 Afin de bien se mettre en condition voici une romantique description du grand mystère sous le regard macabre et plein de dérision de Théophile Gautier.  Tremblons mortels !


"J'étais dans une chambre qui n'était pas la mienne ni celle d'aucun de mes amis, une chambre où je n'étais jamais venu, et que cependant je connaissais parfaitement bien: les jalousies étaient fermées, les rideaux tirés; sur la table de nuit une pâle veilleuse jetait sa lueur agonisante. On ne marchait que sur la pointe du pied, le doigt sur la bouche; des fioles, des tasses encombraient la cheminée. Moi, j'étais au lit comme si j'eusse été malade, et pourtant je ne m'étais jamais mieux porté. Les personnes qui traversaient l'appartement avaient un air triste et affairé qui semblait extraordinaire. "Jacintha était à la tête de mon lit, qui tenait sa petite main sur mon front, et se penchait vers moi pour écouter si je respirais bien. De temps en temps une larme tombait de ses cils sur mes joues, et elle l'essuyait légèrement avec un baiser.  "Ses larmes me fendaient le coeur, et j'aurais bien voulu la consoler; mais il m'était impossible de faire le plus petit mouvement, ou d'articuler une seule syllabe: ma langue était clouée à mon palais, mon corps était comme pétrifié.  "Un monsieur vêtu de noir entra, me tâta le pouls, hocha la tête d'un air découragé, et dit tout haut: "C'est fini!"

vendredi 19 octobre 2012

Curiosa


L'ange anatomique. JF Gautier D'Agoty.
L'hépatite virale, et le temps de son traitement ont été ma première expérience de la maladie, du monde hospitalier, de la médecine. 
La biopsie du foie fut l'occasion pour moi du premier séjour dans un lit d'hôpital. 
Chance du débutant, d'entrée de jeu je fis coup double ! En sondant le foie l'habile praticien perça le poumon.  Le coup de stylet au  foie fut donc suivi d'une belle incision au côté droit, afin de réparer les dommages et désagréments du pneumothorax qu'avait créé la biopsie. Finalement, rien de bien dramatique, mais quand même un bon début pour moi qui ne connaissais que l'épisiotomie et de vue seulement. 
Depuis, j'ai pu me rôder aux fibros, labos, radios, échos, endos et prises de sang en tous genres. Je dois dire que cela a considérablement  stimulé mon intérêt pour le corps et son anatomie. 

L'anatomie et plus précisément les planches anatomiques sont des images qui, aux confins de l'art et de la médecine, mélangent subtilement voyeurisme, pornographie et intimité. 
Par exemple, l'ange anatomique de Jacques Fabien Gautier D'Agoty peut se targuer d'émouvoir des personnalités aussi peu impressionnables que Jacques Prévert: "Un jour je rêvais debout, sur les quais, devant une vieille gravure, une planche de dissection... Une jolie femme aux épaules nues, ou plutôt dénudées, avec la peau rabattue de chaque côté...
Horreur et splendeur viscérales.
Manteau de chair à la doublure écarlate, sanglante et tendre décolleté...Mais c'était pas tellement terrible et pas si laid, simplement cruel et vrai."
Ou Roger Caillois : "Il ouvre grand le dos ou la poitrine de souriantes jeunes femmes, admirablement coiffées et fardées, pour mettre au jour l'économie des tissus de leurs corps. De tels contrastes, qu'aucun avantage didactique ne peut justifier, incitent l'esprit à plus d'une rêverie où se rejoignent étrangement, sans qu'il y entre rien de morbide, le macabre et le voluptueux. En cette paradoxale sérénité, réside sans doute le prodige."
../...Gautier D'Agoty est peintre et graveur de la chair. La peinture de la sexualité ne peut qu'en souligner la proximité, dont la contemplation relève du caractère pornographique, par la fascination du corps, de la matière, à l'écart de toute sublimation qui pourrait détourner l'attention de l'immédiat de cet être là .../... 


Dans un souci d’exhaustivité et afin de ne pas faire de discrimination, après Madame, voici Monsieur qui dépouille et scalpel en main pose dans une attitude avantageuse et très prométhéenne. Planche de gauche par Valverde.

Juan Valverde de Amusco: Anatomia del corpo huma
Casseri. Organes.

























Les planches suivantes s'adressent plus particulièrement aux hépatants familiers des services de gastro-entérologie (dont je m'honore de faire partie). Voici quelques pièces détachées d'époque qui permettent d'admirer à loisir la fine  architecture et la méticuleuse finition de nos organes bichonnés.


JF Gautier d'Agoty. Anatomie generale des viscères
 Kawaguchi: Kaishi hen


"Il y a une horrible découverte, celle de la chair qu'on ne voit jamais, le fond des choses, l'envers de la face, du visage, des secrétats par excellence, la chair dans tout son sort, au plus profond du mystère, la chair en tant qu'elle est informe, que sa forme par soi même est quelque chose qui provoque l'angoisse" Jacques Lacan.

Pour aller plus loin, des liens
Muriel Belin et ses peintures anatomiques proches des planches d'anatomie : http://muriellebelin.jimdo.com/peintures-paintings/peintures-anatomiques/
http://www.nlm.nih.gov/exhibition/historicalanatomies/browse.html
http://www.danse-macabre.net/
un ouvrage : Boris Terk. De l'incision. URDLA 2007.



Chirurgie esthétique. Wangechi Mutu. Indurated.

jeudi 11 octobre 2012

Amis 'boomers' bonjour !

La notion de génération est couramment utilisée par les sociologues ou les démographes dans leurs études. Dans les deux cas, une génération désigne une classe d'âge d'environ vingt ans. La jeunesse est le temps où l'individu se socialise, construit sa vision du monde et son système de valeurs. L'empreinte générationnelle acquise durant cette période influence par la suite l'histoire, les comportements ou les choix des individus jusque dans leurs vies personnelles.
Ainsi, il parait que la majeure partie des hépatants est constituée de 'boomers', c'est à dire de personnes nées aux temps glorieux du baby boom. 

Les babyboomer, nés entre 1945 et 1965, qui sont aujourd'hui des papy boomers, constituent environ les trois-quarts des adultes infectés par le VHC.
Alors, faites ce test : si ces séquences évoquent quelque chose chez vous, bienvenue au club des boomers et...n'oubliez pas de vous faire tester !

Ozias






vendredi 5 octobre 2012

Shunga, le retour.

Au Japon, depuis des siècles,  les peintures et estampes érotiques, dites « SHUNGA » c’est-à-dire « Images du Printemps », jouent un rôle important dans le contexte artistique du pays. Les XVIIème et XVIIème siècle n'ont pas manqué d'imagination en la matière, (voir .http://emagicworkshop.blogspot.fr/2012/02/shunga-les-images-du-printemps.html).
Au Japon cette tradition artistique est restée entre de bonnes mains même si aujourd'hui la frontière entre Shunga et Manga  s'estompe parfois. Protéiforme, polymorphe, perverse et sans barrières la sexualité dans les images érotiques japonaises s'imprègne d'une tradition qui prête à chaque chose une âme : homme, femme, papillon, pierre ou fleur, tout dans le monde japonais participe d'une universelle propension à faire l'amour de toutes les façons possibles. C'est à dire plus avec le cerveau qu'avec les organes génitaux. *
Cette inspiration atteint naturellement des artistes contemporains occidentaux qui reprennent avec bonheur le style des 'estampes japonaises'.  
Occidentaux  ou japonais, en voici quelques exemples pour le plaisir des yeux
Enjoy,
Ozias

Masami Teraoka. Tattoed woman at Kaneoche bay. 1984.

Bob Kessel. Fireworks 360

Jeff Faeber. Texting

Joapa. D'après 'Le rêve de la femme du pêcheur' de Hokusai.

Yuji Moriguchi

Kimura Ryoko. Flowers
Toshio Saeki
Toshio Saeki


Takato Yamamoto

*D'après L'imaginaire érotique au Japon. Agnès Giard

Voir aussi le lien vers Moriguchi https://www.juxtapoz.com/news/painting/yuji-moriguchi-s-erotic-paintings