Pascal Quignard. Les Désarçonnés. Grasset 2012.
Suites du traitement : une année de visites hebdomadaires chez un psychothérapeute.
Une année à répéter, à remâcher ce que je n'ai pas digéré, ce qui ne passe pas ,ce qui reste, et ce qui a changé pour moi.
Désarçonné je fus, je reste et je suis. La monture qui me portait et qui m'emportait m'a laissé là . La bête connaissait sa route mais elle a filé.
Deux ans . Impression de ne plus être dans la course, d'avoir lâché le peloton dans lequel je pédalais dur, mais joyeusement et aveuglément aussi. Après avoir pansé mes éraflures, soigné mes bleus et mes bobos je me trouve donc à terre, à pied, en danseuse, à la recherche d'un nouveau véhicule, d'une autre course.
Hors de mes sentiers battus, au milieu du bois, sur la route ou sur le bord du chemin et parfois en plein champ, je recentre, je fais le point, Je cherche à saisir ce qui est important pour moi, ce que je veux et ce dont je ne veux plus. Combien de moi en moi, qui sont ils et que veulent ils. Qui suis-je ? Qui sont-je ? Suis-je ceux que je suis? Et, l'important, est-ce plutôt ce que je suis ou ce que je fais ?
Autour de moi les autres, aussi ont changé aussi. Beaucoup de relations d'avant perdues de vue. Encore une question de rythme, de timing. Le mauvais tortillard de la "C" m'a fait rater des correspondances. Comme ma monture, les autres ont filé aussi avec le peloton, je ne retrouve plus leurs traces. En revanche j'ai retrouvé des amis perdus de vue depuis longtemps, et d'autres encore que je découvre maintenant.
Alors je relis les bribes de cartes, refais une feuille de route. Pour la feuille de route, soyons pragmatique et d'abord basique : "la fonction d'être d'un être, c'est d'être" et bien, soyons donc. Donc je suis. Bien, ça c'est fait, mais partant de là, être n'est pas tout. Quand on est, il faut alors exister . Exister c'est à dire être pour les autres, avoir une place, et si possible être à sa place. Ceci étant, plus ou moins en place, reste à voir la suite, où je vais, et pourquoi. Comme on s'élève dans la pyramide de 'Magueule' la question devient plus difficile, plus abstraite plus changeante: Comment savoir si l'on a pris une bonne route et quel cap garder. La seule réponse que je trouve me parait bien nombriliste et égocentrée, mais pourquoi le but ne serait il pas simplement d'être content de moi ?
Être bien avec soi même, être fier de ce que l'on a fait et de ce qu'il en reste, ça n'est pas simple, et je me souhaite, ainsi qu'à à chacun, d'y parvenir. Comme quoi, le nombril n'est pas loin du foie et le foie, ça fait réfléchir la tête.
Ozias
Feuille de route |
Musique: Horse with no name. America song by Handy Horace.