vendredi 16 septembre 2016

Paysages

Trois photographes pour transformer le paysage en image par la couleur, la composition ou le mouvement.

Couleurs: Harry Gruyaert
Harry Gruyaert
Harry Gruyaert
Harry Gruyaert
Composition : Nadav Kander
Nadav Kander

Nadav Kander
Nadav Kander

Mouvements : Martin Roemers
Martin Roemers
Martin Roemers

dimanche 4 septembre 2016

Le Futuroscope, visite à Normaland

Mon selfie du Futuroscope
Je ne voulais pas rater mon entrée au Futuroscope, alors comme j’ai tout réservé sur Internet j’ai trouvé une place à l’ombre sur le parking, juste devant l’entrée…

Mon check-in est accompagné d’une double pénétration sécuritaire de mon sac photo. 
A l’intérieur ça sent les lieux publics. Un mélange de grésil et de vapeurs de respiration qui colle à la moquette comme dans un collège quand il fait chaud. ça me change du Labyrinthe de la Folie (cf post précédent). Ici au moins les gens sont comme à la télé : c'est à dire normaux comme vous et moi. Beaucoup quand même sont en surpoids et sous la chaleur de ce 24 août on peine avec eux. Ici point d’odeur de pétard, ou presque…

Au Futuroscope tout est prévu, même les aléas: (un plongeur « amateur», un spectateur ‘de mèche’ dans le spectacle de magie (– je spoile, mais tant pis ! -) Le public, bon enfant, est vigoureusement invité à ‘participer’ mais seulement par ses applaudissements : « faites du bruit !». Le public du Futuroscope  est sollicité comme à la télé ou comme pour aller aux urnes dans nos ‘démocraties’. Ce futur dont la promesse est « vous n’imaginez pas ce qui vous attend » semble surtout être tel qu’on nous veut (middle-class, disciplinés, consommateurs). La majorité du public est d’ailleurs composée de classes moyennes de toutes sortes.

Ici le futur est fait d’attractions, de distractions,  qui ne durent jamais plus de 20 minutes et d’attentes qui peuvent atteindre le double. C’est notamment  le cas de l’âge de glace où l’on choisit d’entrer pour se mettre au frais.  

Glands et les lapins crétins sont ici partout comme chez eux. Scrat, l'écureuil héros de l’âge de glace, s’acharne sur son gland version XXL. Sur son écran de 600m², bravant tous les dangers, l’écureuil Tamia défend ses glands pour l’hiver car « que serait la vie sans défi ? ».  
Le futur est ici libéral et  conformiste . Non loin de là, à Niort, la Macif nous protège.

N'ayez pas peur ...

Ozias
Scrat, de "l'âge de glace", et son gland  géant
Vente de produits dérivés en plastique de "l'Age de glace"

vendredi 2 septembre 2016

Le labyrinthe de la folie

Le Labyrinthe de la Folie est une exposition d'art brut/art pop/etc qui se déroule à Montpezat (Ardèche) fin août sous les voûtes romanes de l'église (désacralisée) de ND de Prévenchères .
C'est un asile retiré et fantastique, un cabinet de curiosités, une zone d'autonomie artistique et d'exposition des particularismes face à la mondialisation des images, à la banalisation du goût.
A coups de cris du cœur, d'angoisse de souffrance ou de rage, de fou-rires et de recyclages, une vingtaine d' artistes tous bien décalés et en rupture avec les dogmes esthétiques, expose pour notre bonheur créations apotropaïques, délires trash ou pleins d'humour,  et inquiétants talismans.

Un tout petit aperçu, un grand Bravo !

Ozias

PS: Quelques articles de ce blog concernant l'art brut, décalé, singulier, outsider ...:
Jam
Laurence Capelletto
Art Toc (Alain Bachelet)
Blatman
Loransse
Virginie Chomette
Jean Kiboi
Le blatodrome (Blatman, Lady Pocket et les bolides)
Lady Pocket

mercredi 10 août 2016

Invisibles

Pour la plupart des citadins, les gens qui vivent dans la rue sont une partie de la vie quotidienne et, par conséquent, sont trop souvent ignorés, invisibles. La photographe Shine Gonzalvez dévoile dans ses photos ces visages cachés des rues de Londres.






http://www.pixopolitan.com/blog/visages-oublies-shine-gonzalvez


Les transparents . René Char  

Dans le recueil 'Les Matinaux', René Char avait fait un travail similaire en faisant en vers le portrait de vagabonds qui parcouraient les campagnes pour louer leurs bras.

"Les transparents ou vagabonds luni-solaires ont de nos jours à peu près complètement disparu des bourgs et des forêts où on avait coutume de les apercevoir. Affables et déliés, ils dialoguaient en vers avec l'habitant, le temps de déposer leur besace et de la reprendre. L'habitant, l'imagination émue, leur accordait le pain, le vin, le sel et l'oignon cru ; s'il pleuvait, la paille."

René Char (1950)

VI.  René Mazon

Le rocher parle par la bouche de René.

Je suis la première pierre de la volonté de Dieu, le rocher;
L'indigent de son jeu et le moins belliqueux.

Figuier; pénètre moi:
Mon apparence est un défi, ma profondeur une amitié.

VII.  Jacques Aiguillée

Jacques se peint.

Quand tout le monde prie,
Nous sommes incrédules.
Quand personne n'a foi,
Nous devenons croyant.
Tel l’œil du chat, nous varions.

XII.  Aimeri Favier
AIMERI

- Vous enterrez le vent,
   Ami, en m'enterrant.
LE FOSSOYEUR

- Qu'importe où va le vent !
   Mais sa bêche reste dedans.

XVII. Albert Ensénada

Le monde où les transparents vivaient et qu'ils aimaient, prend fin. Albert le sait.

Les fusils chargés nous remplacent
Et se tait l'aboiement des chiens.
Apparaissez formes de glace,
Nous, Transparents, irons plus loin.


à méditer : "la photographie est l’outil idéal pour faire disparaître le monde. Toutes les dimensions du monde réel sont annulées dès l’instant où un sujet est impressionné sur la pellicule. Odeur, poids, densité, espace et temps, jusqu’ au lien sensitif avec son existence passée. En effet, comme la mort, la photographie fixe la fin du réel, et l’objet renaît avec une identité totalement nouvelle et autonome. Les choses exigent désormais leur propre théâtre qui ne saurait être ni illustratif ni informatif. C’est pourquoi il est inutile d’y rajouter des légendes. Elles sont ce qu’elles sont. Des images. "
Jean Baudrillard



Invisibilité pour tous :
Rapport du Credoc (qui exclut les publics en situation de grande exlusion): 

mercredi 27 juillet 2016

Heidegger, le néant etc

Depuis Nietzsche, la vie est principe de tout et la volonté conçue comme machine à vouloir pour vouloir bascule dans l'absurde. La philosophie de Martin Heidegger montre que notre époque manque de fondements fermes et qu'on ne peut pas vivre dans l'absurde. "L'enracinement" de notre être est fondamental pour donner un sens à nos existences. 
Pour ce philosophe, nos affects sont les liens entre la vie et la pensée. Partant de là, Heidegger cherche à saisir le sens de l'Etre, de son enracinement, et de sa réalisation au beau milieu du néant qui nous hante et dont la science ne sait que faire.

A une époque où la raison constitue l’unique référence à partir de laquelle toute connaissance doit pouvoir trouver son fondement, Heidegger affirme que la science ne pense pas et  que la philosophie n’est pas science. Effectivement, ce n'est pas parce qu'un système économique ou une machine à laver fonctionnent bien qu'ils ont un sens. Pour lui La poésie est seule capable d'exprimer les pensées, aux frontières du langage qu'il cherche à saisir, ce langage dont il dit qu'il est la maison de l’être. Son souci du langage rend ses textes parfois aussi abscons que du Lacan. 
Ainsi, il décortique systématiquement  l’être en trois états:  l'Etant, le Dasein, et l'Etre. L’étant, ce sont les choses, nous même, tels que nous les connaissons sous leurs aspects habituels. L'Etant constitue le matériau de la science. 
Le Dasein (de l'allemand 'da sein' = être là), signifie la transcendance de l’étant vers la réalisation de l’être. C'est une représentation de l'existence en constant devenir. Ainsi, l'homme ne vient qu'une fois au monde (le jour de sa naissance), par contre « il vient constamment au Dasein aussi longtemps qu'il vit ». 
Illustration : 
Une patate, qui se pèse et se vend pour faire des frites ou de la purée c'est de l'Etant.
Le Dasein de la patate c'est sa germination qui pourra seule la transformer en plante.
L'Etre c'est la plante de pomme de terre qui fleurit et se reproduit en pleine terre.
Ainsi, dans "Sérénité" Heidegger cite le poète JP Hebel :" Qu'il nous plaise ou non d'en convenir, nous sommes des plantes qui, s'appuyant sur leurs racines, doivent sortir de terre, pour pouvoir fleurir dans l'ether et y porter ses fruits". 


Tandis que l’ennui et la joie révèlent l’Etant dans son ensemble, l’angoisse révèle le néant et nous fait percevoir l’Etant dans sa parfaite étrangeté. Sans la manifestation originelle du néant, il n’y a ni individuation ni liberté. Pour Heidegger, le néant est antérieur au « non » et à la négation. Puisque la science ne veut rien savoir du néant, Heidegger fait du néant la clef de voûte de sa pensée. « Le néant reste fondamentalement inaccessible à toute science. Celui qui veut parler véritablement du néant doit nécessairement devenir non scientifique.»
Pour lui le temps naît nanti du néant et l’homme est le lieutenant, la sentinelle du néant
« C’est uniquement parce que le néant nous est révélé dans le fond du Dasein que la complète étrangeté de l’étant peut nous assaillir. C’est uniquement à la condition que son étrangeté nous oppresse, que l’étant éveille et attire sur soi l’étonnement."
Bref, l'Etre ne peut se réaliser que grâce la finitude que lui promet le néant. Le néant est à la fois un puits d'angoisse et une source de liberté.

La lecture de Heidegger est difficile autant que sa hauteur de vue est vertigineuse. A une telle altitude on a parfois du mal à distinguer les objets dont il est question. Par exemple : de quoi parle on quand on parle de l'être ? est-ce l'homme ou l'individu ou plus généralement 'les choses' ? Les textes de Heidegger me semblent souvent abstrus, ils taclent les limites de la langue allemande et se heurtent donc au problème de la traduction. 
Comme Nietzsche ou tout grand philosophe sa pensée peut être interprétée de multiples façons. 
J'attends notamment vos commentaires sur la question suivante (qu'il pose en conclusion de 'qu'est ce que la métaphysique ?')
"Pourquoi y a-t-il quelque chose, plutôt que Rien ? "

Heureux Dasein à vous,

Ozias

"Heidegger est le plus grand des penseur et le plus petit des hommes"  Hans Geog-Gadamer 


Superbe analyse du positionnement de Heidegger https://www.youtube.com/watch?v=-fUjHGN9biM

Voir aussi  

mercredi 13 juillet 2016

les cadres, des dominants dominés




Avec l’avènement du capitalisme financier dans les années 90, les cadres ont perdu le pouvoir au profit des actionnaires. Les technologies de l’information (mails, logiciels, portables, mobiles) ont transformé leur activité, l’accélérant et la contrôlant davantage tout en effaçant les frontières entre travail et vie privée. Pourtant les cadres continuent de consentir au capitalisme moderne. Dans leur ensemble, ils croient en la mondialisation, valorisent l’autonomie dans le travail et louent la recherche de la performance.

Quelques paroles de cadres aussi bien formatées que pétries d'ambiguïtés :

«Un cadre ne compte pas ses heures »
«C’est face au mur qu’on est vraiment stimulé »
«Même si les filiales sont très autonomes, si les cadres sont très autonomes dans leurs missions, quelque part on a aussi beaucoup de comptes à rendre »
«Autonomie dans la conduite du projet, mais absence de maîtrise des budgets, des moyens, des effectifs et des délais»


Les cadres se comportent comme d’indécrottables premiers de la classe. Dès l'enfance, la famille et l’école leur ont  incorporé leurs qualités de sérieux et de servilité. Scolarités épanouies, bacs avec mentions, jeunesses sacrifiées aux classes de sup et de spé, école d’ingé et c’est parti, vous voilà cadre pour la vie avec la vie qui va avec. Une vie dont les valeurs sont travail, performance et fiabilité. Vingt ans près leur sortie de l'école ils continuent à donner le meilleur d'eux même pour atteindre leurs objectifs, se prouver qu'ils ont bons, valider leur évaluation de performance annuelle.  Les entreprises où travaillent les cadres ne leur appartiennent pas mais elles profitent de cette main d’œuvre fiable, apte à diriger et prête à s’auto-exploiter à grands coups de challenges et de performance.

Les cadres acceptent leur position de dominants dominés car ils n’ont pas d’autre solution que de consentir au capitalisme moderne à moins d’abandonner les avantages de leur position sociale. Les satisfactions issues de leur travail (sentiments d’autonomie, de réalisation de soi), d’acquisition de nouvelles compétences leur  procurent l’impression de travailler pour eux alors que l’entreprise qui les emploie leur extorque des soumissions qu'ils ne perçoivent pas comme telles.
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D'après: Des dominants très dominés. Gaétan Flocco, éditions Raisons d'agir