Alors que le mouvement psychédélique prend de l'ampleur et que l'opinion publique évolue, de plus en plus de personnes cherchent à utiliser les psychédéliques dans un but thérapeutique ou d'exploration de soi. Que ce soit dans le cadre d'une thérapie assistée aux psychédéliques, de cérémonies de médecine par les plantes ou d'un usage récréatif, le discours occidental actuel sur les psychédéliques a depuis longtemps intégré le concept de "Set & setting". Mais dans la culture psychédélique contemporaine, ce terme ne suffit plus comme mantra de réduction des risques. Comment l'actualiser et mieux aider les psychonautes ?
Depuis sa formulation dans les années 1960, les variables du Set & setting n'ont guère évolué. Il existe pourtant d'autres facteurs significatifs qui impactent l'expérience psychédélique - à la fois de manière immédiate et à long terme - qui ne sont pas entièrement pris en compte par les seuls paramètres de set & setting. Le Set & setting n'existe pas indépendamment de la culture, et d'un contexte socioculturel qui inclut, sans s'y limiter, l'identité, le statut économique, la nature des relations avec les autres, l'accès de l'individu à la nature et sa relation avec celle-ci.
Dans une large mesure, la notion de set and setting dans la culture occidentale a été façonnée et inspirée par la manière dont les peuples premiers du monde entier consomment des substances psychoactives dans des contextes rituels, avec des objets cérémoniels, de la musique, des relations avec la terre et des schémas d'interprétation cosmologiques. Contrairement à ces cultures, la notre porte un préjugé défavorable à l'égard de l'utilisation de substances psychoactives, et bien qu'il soit prouvé que les peuples d'Europe ont utilisé des plantes psychoactives de manière rituelle, ces traditions ont été oubliées depuis longtemps.
Nos cadres culturels forment un prisme à travers lequel l'expérience psychédélique est interprétée, et l'absence de contexte culturel autre que celui de la prohibition, entraîne la nécessité d'une redéfinition du set & setting dans les sociétés occidentales.
Ido Hartogsohn, professeur adjoint au programme pour la science, la technologie et la société à l'université de Bar-llan (Israel), a mené des recherches sur le set & setting, et sur la manière dont les expériences psychédéliques sont façonnées par la société et la culture. En 2017, Hartogsohn a publié un article décrivant l'histoire du set et du setting, soulignant que bien que le terme soit souvent attribué à Leary, ses racines sont plus anciennes.
Set, Setting, and Support
Malgré les bienfaits indéniables des psychédéliques, le discours médiatique qui les entoure est souvent empreint d'un langage sensationnaliste, qui tend à en faire des remèdes miracles pour tous les problèmes de santé mentale. Ce postulat trompeur ne met pas en évidence les innombrables défis que présente l'expérience psychédélique. Même lorsque le set & le setting sont sous contrôle, il n'y a pas de garantie que des contenus et des situations difficiles ne se présenteront pas.
Le soutien d'un pair, d'un accompagnateur ou d'un facilitateur pendant une expérience peut aider le psychonaute à mieux naviguer dans son expérience et à adapter le cadre pour un meilleur confort et une plus grande sécurité", explique Hanifa Nayo Washington, cofondatrice et responsable de la stratégie de Fireside Project, une ligne d'assistance psychédélique qui offre un soutien téléphonique gratuit et en direct aux personnes en phase de trip ou d'intégration. https://firesideproject.org/app.
Comme le dit Stanislav Grof, chercheur en psychédélisme et psychologue transpersonnel, les psychédéliques se comportent comme des "amplificateurs non spécifiques de processus mentaux ou psychiques". En d'autres termes, ils ont la capacité d'amplifier un contenu latent dans la psyché, en faisant surgir des pensées, des émotions et des impressions sensorielles dont nous étions auparavant inconscients. Fréquemment aussi, il semble qu'au cours d'une expérience, il y ait un écart entre les attentes et le déroulement réel de cette expérience. Le fait de disposer de formes de soutien pendant le processus peut aider à traverser les moments difficiles du trip.
En outre, les suites d'une expérience psychédélique peuvent également être déstabilisantes, car les états de conscience non ordinaires qu'ils provoquent nous catapultent au-delà des limites de nos perceptions quotidiennes. C'est en partie cette perturbation de notre flux de conscience standard qui permet aux psychédéliques d'être bénéfiques, mais cela peut aussi être un processus déstabilisant, car les bases de nos visions du monde et de nos systèmes de croyance sont fondamentalement remis en question. Le recours à un soutien post-voyage dans les jours, les semaines et les mois qui suivent une expérience psychédélique peut considérablement faciliter le processus d'intégration vers une "nouvelle normalité".
Trouver des supports
La recherche de soutien est un moyen d'améliorer la préparation, le voyage et l'intégration psychédéliques. L'un des types de soutien, qui peut sembler plus évident, est le soutien social et communautaire avec l'aide d'un tiers. Même si les psychédéliques peuvent susciter des sentiments de connexion et d'unité, certaines personnes qui en utilisent peuvent se sentir aliénées et incomprises.
Pendant des années, les politiques prohibitionnistes de tolérance zéro ont diabolisé les substances psychédéliques et ceux qui les utilisaient, ce qui a créé une stigmatisation persistante et un sentiment de peur et de honte associé à leur utilisation. Cela est particulièrement vrai pour les personnes racisées qui ont longtemps été confrontées à l'impact de l'application discriminatoire des lois sur les stupéfiants, la guerre contre la drogue produisant des résultats profondément inégaux entre les groupes raciaux.
En outre, les expériences spirituelles et mystiques ont longtemps été moquées et condamnées dans la culture occidentale, car elles comportent souvent des éléments qui culturellement ne sont pas admis, ce qui fait que les personnes qui vivent des expériences mystiques ou transpersonnelles profondes peuvent être rejetées ou qualifiées de " dingues ".
L'intégration est souvent un processus non linéaire au cours duquel les choses se dégradent parfois avant de s'améliorer. À la suite d'une expérience profonde la personne peut abandonner certaines composantes de son identité ou de sa personnalité. Cet abandon de comportements et de parties de la psyché qui ne sont plus utiles peut être considéré comme une sorte de "mue psychédélique". Omar Thomas, fondateur de la Jamaica's Diaspora Psychedelic Society, PDG de Jamaican Organics et membre du conseil consultatif de Psychedelics Today, a formulé pour la première fois la notion de "mue" dans le contexte de l'intégration psychédélique. Cette mue peut concerner l'emploi, l'appartenance religieuse, l'identité sexuelle etc. Lorsqu'une personne traverse ce processus de mue sans bénéficier d'un soutien adéquat, le risque est qu'au lieu de trouver un soulagement à ses afflictions mentales et psycho-spirituelles, celles-ci s'aggravent. Par exemple, que se passe-t-il lorsqu'une personne se rend compte que son stress est dû à son travail, mais qu'elle ne peut pas démissionner parce qu'elle ne pourra pas subvenir aux besoins de sa famille autrement ? Ou que se passe-t-il lorsque que la personne se défait de son identité cisgenre tout en étant engagée dans un mariage qui risque de s'effondrer, entraînant une série d'effets problématiques ? Le processus de mue n'est pas toujours un mal, mais il peut le devenir si l'on ne dispose pas d'un soutien adéquat pour le rendre possible.
Même si aujourd'hui les psychédéliques sont de mieux en mieux acceptés par le grand public, leur usage restent stigmatisant. Il est donc important de trouver une personne de confiance qui ne porte pas de jugement et avec qui partager ses découvertes. Pour certains, cette personne sera un thérapeute, un conseiller, un coach ou un guide chamanique, tandis que pour d'autres, il s'agira d'un ami de confiance ou d'un membre de la famille.
Si l'entourage immédiat se montre incompétent, il est possible de trouver du soutien communautaire en se connectant en ligne ou vrai avec une communauté psychédélique qui propose des ateliers et des cercles d'intégration. L'un des avantages de la recherche d'une communauté en ligne est qu'elle permet d'entrer en contact avec des personnes appartenant à un groupe d'identité sociale spécifiques inaccessible autrement. Par exemple, on trouve maintenant (dans certains états US) des cercles d'intégration qui s'adressent aux personnes qui s'identifient comme racisés, neuro atypiques ou queer.
"En préparation d'un voyage psychédélique, le soutien peut prendre la forme d'un échange avec un ami de confiance, un facilitateur psychédélique ou un cercle de soutien, afin d'explorer les intentions, les appréhensions, les impressions et plus encore". "Cette étape permet de prendre conscience de son état intérieur et de mieux connaître ses propres besoins et ses propres connaissances.
Quelle que soit la qualité de l'expérience, et au-delà de la réduction des risques, certaines pratiques peuvent être utilisées dans les moments difficiles, afin d'approfondir le sens de l'expérience et d'en tirer un bénéfice durable. Par exemple, une étude de 2019 a montré que la méditation peut aider les patients à consolider les résultats de leur thérapie sur le long terme.
Qu'il s'agisse d'une pratique centrée sur la somatique ou la pleine conscience, ou d'une pratique plus dynamique basée sur le mouvement comme le yoga ou la danse, l'ancrage qu'ils procurent permet d'établir une relation plus profonde avec soi-même.
L' accompagnement à l'expérience psychédélique commence par le biais du développement personnel (Yoga, danse, méditation, hypnose etc). L'intégration de l'expérience peut se faire avec des psychothérapeutes intéressés par un travail sur les états de conscience modifiés. (voir article précédent sur Denis Dubouchet).
Dans les états américains pionniers de la renaissance psychédélique, de plus en plus de professionnels ou d'associations proposent leurs services en ligne.
En France, il faut aller à l'étranger pour trouver des centres, des cliniques ou associations spécialisés dans l'initiation ou la pratique des psychédéliques. Par exemple les Pays-Bas, ou la Jamaïque où l'usage des truffes n'est pas prohibé, ou plus simplement en Espagne où quelques associations proposent des retraites psychédéliques.
La vision populaire considère les psychédéliques comme des agents de transformation positive de la personne et de la société . On les associe généralement au radicalisme politique de gauche, et à la culture hippie des années 1960. Les psychédéliques sont sensés guider l'humanité vers un monde d'amour, de paix et de liberté. Pourtant, l'éden ensoleillé du psychédélisme a toujours eu une face sombre et sinistre, presque volontairement oubliée.
Ainsi, la découverte du LSD s'est faite en 1943 dans l'ombre de la Seconde Guerre mondiale. Si la légende veut que le LSD25 ait été découvert par accident, l'histoire semble toute autre, puisque déjà en 1933 (10 ans avant la découverte de A. Hofmann), paraissait un roman autrichien à succès intitulé "St Petri-Schnee" ("La neige de St Pierre") dans lequel un chimiste synthétise une drogue hallucinogène à partir de l'ergot de seigle en vue de manipuler la population ! Il est très possible que Albert Hofmann ait lu ce roman à succès avant de découvrir le LSD. Mais comment Leo Perutz (l'auteur autrichien de St Petri-Schnee) connaissait-il le potentiel de l'ergot de seigle 10 ans avant la découverte du LSD ?
Leo Perutz faisait partie du milieu littéraire et intellectuel viennois qui, de la fin de siècle à l'entre deux guerres était largement influencé par l'occultisme (théosophie, astrologie, voyance, spiritisme, etc). A cette même époque Freud découvrait l'inconscient et Jung écrivait sur l'alchimie, les gnoses anciennes et les arrières mondes. De nombreux intellectuels comme Walter benjamin, Ernst Bloch, Antonin Artaud s'intéressaient alors aux drogues et à leurs effets tandis que d'autres comme Gershom Scholem, Rudolf Steiner, Kantorowicz se passionnaient pour la mystique, les gnoses anciennes et les usages traditionnels de préparations initiatiques provoquant des visions extatiques. Sans doute la connaissance des pouvoirs psychoactifs de l'ergot de seigle, et l'utilisation de psychotropes par les peuples baltes et nordiques s'est transmise par le biais de cercles paganistes néo-gnostiques qui ont inspiré le post romantisme viennois ainsi que le rapporte Mark Stahlman.
Albert Hofmann & Ernst Jünger
Dès le départ, l'ergot de seigle a suscité l'intérêt d'individus radicalement conservateurs, comme Ernst Jünger, aventurier nationaliste et écrivain passionné par les drogues et les gnoses mystiques. Ernst Jünger (1895-1998) est une figure majeure de la littérature germanique du XXème siècle, et aussi combattant des deux guerres. Vétéran de la première guerre mondiale, puis officier de l'armée allemande au cours de la seconde, chantre de l'héroïsme guerrier et du culte du surhomme il fut un écrivain officiel du régime nazi. Albert Hofmann était un de ses lecteurs et admirateurs. En 1947 Hofmann contacta Jünger par une lettre où il lui témoigne son admiration. Dans son autobiographie "LSD mon enfant terrible", Hofmann consacre un chapitre entier à un trip report qui relate une séance de psilocybine avec Jünger, en 1951, dans le pavillon du garde forestier du château Wilfingen, connu pour avoir, quelques années plus tôt, abrité la fuite du maréchal Pétain. En 1949 Hofmann inspira à Jünger le personnage de Antonio Pen dans son roman Heliopolis: un savant psychonaute explorateur des mystères du monde et de l'esprit. Plus troublant encore, pour comprendre ce qui a poussé à la découverte du LSD il faudrait remonter en 1935 et à la petite communauté rosicrucienne réunie autour du mystique Rudolf Steiner. Selon Willis Harman (dans une interview de Mark Stahlman parue dans Fry and Long en 1977), il se trouve que 2 membres de ce groupe travaillaient aux laboratoires Sandoz et que l'un d'entre eux était le chimiste Albert Hofmann.
Quoiqu'il en soit de l'exactitude de ce dernier fait, il est évident que le LSD n'a pas été découvert par accident. Les recherches de Hofmann sur l'ergot de seigle ont été sciemment menées dans le but d'isoler les principes psychotropes de l'ergot de seigle. Hofmann n'a jamais caché sa fascination pour les épiphanies. Visiblement il était proche du mouvement 'Lebensreform" qui inspirait les milieux intellectuels germaniques de l'époque. Que ce soit sous forme d'expérience spontanée telle qu'il la décrit dans son autobiographie, ou au travers des lectures de Jünger ou de Perutz, Hofmann était fasciné par les drogues hallucinogènes et connaissait déjà les potentialités de l'ergot. La soit disant "surprise" du 'bicycle-day' fait suite à une longue tradition de gnose mystique et de connaissance de l'ergot de seigle auprès de cercles initiés.
Alan Piper
Dans "Strange Drugs Make for Strange Bedfellows, "Alan Piper nous raconte l'histoire fascinante et stimulante des liens inexplorés entre le mouvement psychédélique, apparu au milieu du XXe siècle, et la politique de droite. Alors que pour beaucoup ce lien semble contre-intuitif, l'ouvrage de Piper, bien documenté et finement argumenté, explique comment il se fait que ces mouvements ne sont pas seulement historiquement liés, mais existent aussi dans une interaction idéologique complexe imprégnée d'idées de nature et de mysticisme." - Dr Amy Hale, anthropologue et folkloriste, auteur de John Michell, Radical Traditionalism, and the Emerging Politics of the Pagan New Right.Bien que la plupart des promoteurs du renouveau psychédélique actuel affirment que les psychédéliques conduisent naturellement à adopter des opinions politiques progressistes et à promouvoir la solidarité environnementale et sociale, il se peut que que ces liens proviennent du seul statut illégal des psychédéliques. La prohibition attire les personnalités marginales ou sensibles à la contre-culture. L'association entre les psychédéliques et le progressisme social pourrait bien être accidentelle: en rendant les psychédéliques illégaux, les politiques gouvernementales donnent aux psychédéliques une aura de contre-culture qui séduit les esprits rebelles et les révolutionnaires.
S'imaginer que la légalisation des psychédéliques ou de l'expérience psychédélique promet un monde de tolérance, d'égalitarisme et de diversité serait bien naïf. Les principaux effets de l'expérience psychédélique, tels que vision holistique et écologique du cosmos et de la place de l'homme dans la nature, ne sont ni l'apanage ni la propriété de la gauche ou de la droite politique, ni nécessairement des valeurs autoritaires ou libertaires. Si, comme beaucoup l'espèrent parmi les milieux 'pro-psychédéliques', les psychédéliques parviennent à trouver leur place dans le consensus social et politique grâce à une médicalisation accrue et à une libéralisation des lois sur les drogues, ils cesseront alors d'être l'apanage d'une bohème de gauche libérale, mais cela ne débouchera pas forcément sur plus grand libéralisme social ou politique, ni même sur la paix mondiale. Les amateurs de psychédéliques qui défendent des valeurs libérales de gauche finiront par découvrir qu'ils doivent partager l'écosystème psychédélique avec des penseurs de droite, notamment des néo-paganistes et nationalistes européens fans d'identité et de tradition ethnique.
Le LSD a été découvert en Suisse en 1943 par Albert Hofmann
chimiste aux laboratoires Sandoz alors qu’il travaillait sur de nouvelles propriétés
thérapeutiques aux dérivés de l’ergot de seigle.
Bien que l’ergot de seigle soit un redoutable poison identifié
dès le XVIIème siècle on connaissait déjà de nombreux usages
médicaux dérivés de ce minuscule champignon qui colonise les épis de seigle.
Secale cornutum désigne la forme sclérote du Claviceps purpurea,champignon parasite toxique long de quelques millimètres qui pousse sur les
épis de céréales et que l’on appelle couramment’ergot de seigle’.
L’ergot de seigle est décrit dès 1595 par Bauhin (botaniste suisse) puis sera
identifié au XIXème siècle par Adolphe de Candolle (autre botaniste suisse) comme
étant un champignon.
Source : Wikipedia
L’ergot de seigle fut longtemps responsable d'une maladie,
l'ergotisme, appelée au Moyen Âge mal des ardents ou feu de saint Antoine, liée
à la présence d'ergot dans le seigle utilisé pour fabriquer le pain. Cette
maladie, qui dure jusqu'au XVIIe siècle, provoque des hallucinations semblables
à ce que provoque le LSD, et une extrême vasoconstriction artériolaire, suivie de la
perte de sensibilité des extrémités des différents membres puis de la nécrose
des membres eux même qui peuvent se détacher du corps spontanément et sans
hémorragie. À cette époque, les malades consumés par cette maladie étaient
considérés comme des exemples de la justice divine possédés par le démon, ce qui se traitait naturellement par l’exorcisme
ou le bûcher.
L’historien Rodolphe écrivait : « En 993, il régna en
France une grande mortalité parmi les hommes. C’était un feu caché qui, dès
qu’il avait atteint quelque membre, le détachait du corps après l’avoir brûlé.
Souvent l’espace d’une nuit suffisait pour cet effet. Beaucoup de gens de
toutes classes périrent, et quelques-uns restèrent privés d’une partie de leurs
membres pour servir d’exemple de la justice divine à ceux qui viendraient après
eux.» Au 11e siècle, Guérin la Valloire, un jeune noble français, souffrait du feu de Saint Antoine. Il parvint à se remettre du mal qui l'affligeait et attribua sa santé recouvrée aux reliques du saint ; son père et lui fondèrent alors ce qui allait devenir l'Ordre hospitalier de Saint-Antoine vers 1095. À la fin du 15e siècle, les moines avaient construit environ 370 hôpitaux à travers l'Europe, en France, en Flandre, en Allemagne, en Espagne et en Italie pour traiter les foyers de feu de Saint Antoine.
En 1918 le chimiste suisse Arthur Stoll isole
l'ergotamine qui ouvre la voie à l'usage thérapeutique moderne de l’ergot
de seigle connu pour ses propriétés vaso-constrictrices (qui resserrent les
vaisseaux sanguins) utiles pour lutter contre les saignements à la suite de l’accouchement,
et aussi contre certaines migraines, crampes etc. En 1929, A la fin de ses études en chimie, à l'Université de
Zurich, Albert Hofmann, futur père du LSD, entre au laboratoire de recherches Sandoz
à Bâle, comme collaborateur du Pr. Arthur Stoll alors fondateur et directeur de
la division Pharmacie de Sandoz.
Très jeune Albert Hofmann s’est intéressé aux agencements
moléculaires des poisons végétaux (ciguë, curare…), aux champignons vénéneux (amanites,
ergots…), aux venins, aux plantes psychotropes sacrées, aux phantasticum
(haschich, mescaline). En 1930, utilisant du suc
digestif d’escargot de Bourgogne, il réussit à isoler la structure chimique de
la « chitine » dont sont faites les carapaces, les ailes et les
pinces des insectes. En 1932, il s’intéresse à la scille et à la digitale
laineuse, des fleurs vénéneuses dont les glucoses sont capables de soutenir un
cœur affaibli – ou de l’arrêter. En 1935 Hofmann proposa de reprendre
les recherches autour des alcaloïdes de l’ergot de seigle qui avaient conduit à
l’isolement de l’ergotamine en 1918.C’est
ainsi qu’en 1938, dans l’intention d’obtenir un stimulant circulatoire et
respiratoire, il inventa la vingt-cinquième substance dans la série des
descendants synthétiques de l’acide lysergique : le LSD25. Les essais faits sur
les animaux ne révélèrent pourtant pas d’intérêt pharmacologique ou médical et
les recherches furent de ce fait suspendues. Pourtant, après cinq années d’interruption
le chimiste reprit les expérimentations au printemps 1943, mû par le
pressentiment que cette substance, dont il “aimait la structure chimique”,
pouvait avoir d’autres propriétés. Hofmann a déclaré qu'il avait un "pressentiment particulier" le poussant à resynthétiser le LSD et que cette substance lui "parlait".
Comment cette intuition a-t-elle pu s’imposer à Hofmann ?
Dans le cadre d’une entreprise comme Sandoz, il n’était pas évident d’allouer des
ressources à la reprise de recherches considérées comme sans intérêt. Nous ne
saurons jamais ce qui a pu le motiver. Hofmann recherchait il secrètement un nouveau
psychotrope « phantasticum » ?
Et en quoi la structure chimique de cette molécule lui parlait elle ?
Ce que l’on sait, il nous l’a dit, c’est qu’au cours d'une
de ses promenades de jeunesse Hofmann avait eu une épiphanie, une expérience
décisive qui conditionna toute sa vie future de chimiste et de d’explorateur du
pouvoir des plantes. Ainsi la décrit il bien plus tard dans la préface de son
livre « LSD mon enfant terrible » :
"Cela s'est passé un matin de mai - j'ai oublié
l'année - mais je peux encore désigner l'endroit exact où cela s'est produit,
sur un chemin forestier à Martinsberg, au-dessus de Baden",. "Alors
que je me promenais dans les bois fraîchement verdoyants, remplis du chant des
oiseaux et éclairés par le soleil du matin, tout à coup, tout est apparu dans
une lumière d'une clarté peu commune. Elle brillait du plus bel éclat, parlant
au cœur, comme si elle voulait m'englober dans sa majesté. J'étais rempli d'une
indescriptible sensation de joie, d'unité et de sécurité béate."…/… Et
plus loin il écrit : Il s'est
produit dans ma vie une corrélation aussi inattendue que peu fortuite entre mon
activité professionnelle et le spectacle visionnaire de mon enfance. Je voulais
accéder à la compréhension de la structure et de l'essence de la matière :
c'est ainsi que je suis devenu chimiste. Comme, depuis ma plus tendre enfance, j'étais
passionné par le monde des plantes, j'ai décidé de me vouer à la recherche sur
les substances constitutives des plantes médicinales. C'est ainsi que j'ai
découvert des substances psychoactives, capables de produire des hallucinations
et, dans certaines circonstances, d'induire des états visionnaires comparables
aux expériences spontanées que je viens de décrire. La plus importante de ces
substances a été désignée sous l'appellation "LSD" ».
Hofmann(à droite) dans le labo Sandoz
Au printemps 1943, Albert Hofmann se remet donc à la
synthèse du LSD25. Au cours de la phase finale de synthèse, alors qu'il
procédait à la purification et à la cristallisation du LSD 25 sous forme de
tartrate, il fut troublé dans son travail par des sensations inhabituelles.
Voici la description de cet incident, extraite du rapport qu'il envoya au Pr
Stoll, son supérieur : « Vendredi dernier 16 avril 1943 en plein après-midi,
j'ai dû interrompre mon travail au laboratoire et me rendre à mon domicile. A
mon domicile, je me suis allongé et j'ai sombré dans un état second, qui
n'était pas désagréable, puisqu'il m'a donné à voir des images fantasmagoriques
extrêmement inspirées. J'étais dans un état crépusculaire, les yeux fermés (je
trouvais la lumière du jour désagréablement crue), j'étais sous le charme
d'images d'une plasticité extraordinaire, sans cesse renouvelées, qui
m'offraient un jeu de couleurs d'une richesse kaléidoscopique. Au bout de deux
heures environ, cet état se dissipa «Le
caractère, aussi bien que le déroulement de ces visions étranges faisaient
penser à un quelconque effet toxique exogène, et je présumai une corrélation
avec la substance sur laquelle je venais de travailler, le tartrate de
diéthylamide de l'acide lysergique. Je n'arrivais pas très bien à comprendre
comment je pouvais avoir résorbé de cette substance, habitué que j'étais à
travailler dans des conditions d'hygiène draconiennes, compte tenu de la
toxicité avérée des substances de l'ergot. Mais peut-être une infime partie de
la solution de LSD était-elle quand même tombée sur mes doigts lors de la cristallisation
: ma peau l'aurait alors partiellement résorbée. Si vraiment c'était cette
matière qui avait provoqué l'incident que j'ai décrit, il devait nécessairement
s'agir d'une substance active à dose infinitésimale. Pour en avoir le cœur
net, je décidai de procéder à une auto-expérimentation. Comme je voulais
être prudent, je commençai la série d'épreuves que j'avais prévues par la plus
petite quantité mesurable, soit 0,25 mg (250 micro-grammes) de tartrate de
diéthylamide de l'acide lysergique ».
Résultat et trip report du trip du 19 avril (Bicycle day, extrait) : « des vertiges, des perturbations visuelles, les visages des gens présents semblaient grimacer et présentaient des couleurs très vives ; de fortes perturbations motrices alternant avec des moments de paralysie ; ma tête, mon corps et mes membres paraissaient tous extrêmement lourds, comme remplis de métal ; j’avais des crampes aux mollets, les mains froides et sans sensations ; un goût métallique sur la langue ; la gorge sèche et serrée ; un sentiment de suffocation ; une impression de confusion alternant avec une perception claire de la situation, dans laquelle je me sentais comme à l’extérieur de mon corps, dans la position d’un observateur neutre, alors que je criais ou marmonnais indistinctement, comme à moitié fou. »".
Convaincu par son expérience (celle du bicycle day) Albert
Hofmann fut de suite persuadé que le LSD25 allait ouvrir un champ
d’expérimentation psychique et thérapeutique extraordinaire. Surprenant mais
authentique, Hofmann invite le professeur Rothlin, directeur du département de
pharmacologie des laboratoires Sandoz, à répéter lui-même l’expérience avec ses
collaborateurs qui ingérèrent 50 µg de LSD-25 et subirent des effets qui
restaient “tout à fait impressionnants et fantastiques”. Stoll et
Hofmann déposent alors le brevet du LSD en 1943 en Suisse - et en
1948 aux États-Unis.
Dès 1947 le Professeur Werner A. Stoll, fils d’Arthur Stoll (le
boss de Albert Hofmann) publie dans le Schweizer Archiv für Neurologie und
Psychiatrie sous le titre « Diéthylamide de l'acide lysergique, un
phantasticum du groupe de l'ergo » les premiers résultats d'une
expérimentation systématique du LSD chez l'homme, et en particulier sur ses
patients.
La suite, est une autre histoire, celle du succès, puis du bannissement,
puis de la renaissance d’une substance aussi puissante que magique. Au cours d'une interview de 2006, Hofmann a déclaré :"Mon intérêt pour la chimie a été inspiré par une question philosophique fondamentale : Le monde matériel est-il une manifestation du monde spirituel ? J'espérais trouver des réponses profondes et solides dans les lois solides de la chimie pour répondre à cette question, et appliquer ces réponses aux problématiques et aux questions ouvertes des dimensions spirituelles de la vie."
Ce qui me surprend dans cette histoire, c’est l’audace de
Hofmann, son intuition, et même son acharnement pour à découvrir les propriétés psychoactives du LSD25. Pourquoi insiste t’il en 1935 pour reprendre des recherches sur l'ergot de seigle jusqu'en 1938 ? Puis il remet ça en 1943 bien que le LSD25 ait été déclaré sans
intérêt en 1938 ? Comment se fait-il qu’après son expérience fortuite du 16 avril 1943,
qui a été déstabilisante au point qu’il
a dû quitter le labo, Hofmann décide de s'auto-administrer le 19 avril (bicycle-day) 250µg d'une substance inconnue aux effets inattendus ?
Et suite à son auto-expérimentation du bicycle-day qu'il résume dans ses écrits par « à
travers ma propre expérience au LSD, je n'en ai connu que les effets
démoniaques » comment se fait qu'il propose à ses proches collaborateurs de faire la même expérience ? Dans un contexte professionnel, faire ingérer un produit inconnu pour tester ses effets psychotropes semble irresponsable et frise la lourde faute
professionnelle. En pleine guerre mondiale (Europe 1943), quel pouvait être l’état d’esprit
des chimistes de ce laboratoire ? Que recherchaient ils vraiment ?
Autant de questions que je me pose et que j’aimerais poser aux descendants de
chimistes qui ont travaillé chez Sandoz à l’époque et avec Hofmann. Si vous en
connaissez, si vous êtes de ceux là, Merci !
Arrière-Monde, Inconscient collectif, Monde Intermédiaire, Noosphère, monde imaginal, outre-monde. Tous ces mots désignent un milieu intermédiaire entre le domaine psychique et le monde sensible qui permet le passage du monde réel à sa représentation dans le monde des idées.
Etant matérialiste, je ne suis surement pas le mieux placé pour parler de l'arrière monde, mais il faut bien reconnaître que certaines expériences sous psychédéliques me conduisent à me demander si l'arrière monde existe qu'est ce qu'il est ? et que peut il nous apporter ?
Pour les vivants la connaissance du réel est une question de vie ou de mort. Etre, ressentir, connaître, avoir conscience de soi sont les états psychiques successifs résultant du processus de l'évolution et permettant l'homéostasie ou la survie des organismes vivants. Pour nous humains il est bien évident que nos sens comme nos connaissances sont limitées et que le Réel dans son entièreté dépasse les représentations de notre réalité quotidienne. Aussi nous sommes nombreux à avoir déjà fait -au moins un peu- l'expérience du dévoilement dans le psychisme de réalités perceptives que l'on ressent totalement différentes et 'plus réelles' que de simples fictions ou d'hallucinations ou de représentations qui excèdent la manifestation des choses 'naturelles' de notre quotidien.
Le monde de la réalité, c'est-à-dire le monde culturel et social dans lequel nous vivons, est un monde signifiant et limité. Dans notre réalité, nous évoluons par accumulation du savoir et analyse rationnelle des phénomènes. C'est un monde conceptuel permettant à l’homme de créer du sens pour son existence mais au sein duquel il ne parvient parfois plus à percevoir ce qu’il y a au-delà de cette réalité construite et qui finalement, est illusoire.
C'est en étudiant la spiritualité et la philosophie islamique iranienne que Henri Corbin a élaboré le concept d'Imaginal à partir de l'idée qu'il existe un monde intermédiaire entre le sensible et l'intelligible, entre la réalité et le Réel , entre le visible et l'invisible : le monde Imaginal. Il faut ici distinguer fantaisie et Imaginaire, imagination et Imagination active (ou agente). Il faut comprendre par 'agente' une imagination autonome opérant indépendamment des individus à travers lesquels elle se déploie.
C'est par l'Imagination active ou la méditation qu'il est possible d'atteindre ce monde de l'imaginal qui permet la transmutation des choses sensibles en symboles. Le monde imaginal invoque l'exaltation philosophique de l'image. Cette exaltation ouvre à la connaissance symbolique de la réalité des archétypes. L'introspection met à jour, après avoir dépassé les couches superficielles de l'inconscient personnel, des "images originelles" ou "images archétypiques" (transpersonnelles) indépendantes de l'histoire individuelle. Ces images archétypiques, qui peuplent l'inconscient et conditionnent le comportement humain, possèdent un double versant biologique et psychique. L'être humain ne nait pas 'tabula rasa', mais doté d'un inconscient collectif neutre (ni psychique ni physique) qui s'est formé au cours de millions d'années d'évolution. "Dans le cerveau, les instincts sont préformés, de même que les images primordiales qui ont toujours été à la base de la pensée de l'homme - tout le trésor des motifs mythologiques... Les archétypes, les symboles, ont un caractère nettement "épiphaniques" ; ils sont comme des produits dérivés de l'activité psychique inconsciente... ils se sont développés, à la manière des plantes, comme des manifestations naturelles de la psyché humaine." (CG Jung). Les archétypes (invisibles) que l'on retrouve dans les légendes, les contes, les rêves de toutes les cultures existent par la transmutation qu'effectue la conscience du sujet qui se les représentent sous forme d'images archétypiques. L'arrière monde est comme une grande antichambre dans laquelle les tendances psychiques se pressent, tels des êtres vivants.
D'un point de vue historique on peut noter que les concepts de champ (magnétique, électrique, de gravité) et d'inconscient apparaissent à la même époque et expriment une même distinction entre le phénomène visible qui s'observe et se perçoit et le et champ ou l'inconscient qui échappent à l'observation. Autrement dit, pour que le phénomène (psychique ou électromagnétique) ait lieu il faut que préexistent les coulisses (Imaginal, ou champ magnétique) qui le déterminent. Accéder à cet intermonde exige une « attitude réceptive spirituelle » faite de discipline de recueillement et d'écoute pour s'éveiller et s'ouvrir à un nouveau monde.
Comme l'aiguille de la boussole placée dans le champ magnétique terrestre indique le Nord, dans le champ imaginal la conscience ouvre à la transcendance, et nous révèle des aspects invisibles du "réel". L'intégration (transmutation) du monde imaginal en symboles nous fait accéder à de plus hauts degrés de compréhension du sens de nos vies par la réconciliation des contraires
: le réel et la réalité, l’invisible et le visible, le spirituel et le
matériel, l’Esprit et le corps. Quand cette réconciliation se produit elle permet de dépasser les limites de notre conscience personnelle
(moi/ego), d'accéder à une conscience plus haute (Soi) et confère un sentiment de reliance (confiance et abandon) envers le monde et l’Autre.
Comme l'écrivait René Daumal en 1943:
Voyant qu'on n'est rien, on désire devenir,
Désirant devenir, on vit.
Oz
Sources : L'arrière monde ou l'inconscient neutre. Bruno Traversi et Alexandre Mercier (Dir) . Editions du Cénacle de France (2018).
réalité : monde des significations construites par la
pensée et par l'intermédiaire du langage, c'est-à-dire de l'imaginaire social institué qui nous permet de percevoir le monde extérieur.
Imagination : faculté de la psyché, à partir de ce qu’elle connaît, à se
représenter des images (dans le sens d’une représentation mentale du monde
matériel, visible ou du monde immatériel, invisible), des sensations ou des situations
qu'elle a déjà perçues et qu'elle se remémore.
Réel : Tout le monde extérieur que nous ne pouvons connaitre que partiellement et au travers de l'expérience.
Conscience : La conscience est un rassemblement de connaissances assez nombreuses pour engendrer l’idée que ces images sont à moi, sont en train d’être produites au sein de mon organisme vivant, et que l’esprit est à moi lui aussi. Finalement, la conscience est la propriété de soi
Denis Dubouchet, psychothérapeute, gestalt-thérapeute, formé à la Fondation d'études chamaniques de Michael Harner exerce depuis 35 ans en tant que psychologue clinicien. Il est l'auteur de "Etats de Conscience Elargie, Psychothérapie et Chamanisme" publié aux éditions Dervy en 2017.
Denis Dubouchet (DD) définit la conscience comme la capacité à nommer les évènements que je perçois à partir de mes sens ou de mon ressenti. Les états de conscience élargie nous donnent accès à des informations que notre conscience habituelle ne parvient pas à atteindre (monde imaginal). Quelles que soient nos croyances, nous pouvons tous faire le constat de notre présence minuscule au milieu de l'immensité de l'Univers. Le développement humain passe donc forcément par un développement spirituel, mais l'expérience mystique peut nous soutenir autant qu'elle peut nous couper de la réalité et susciter des comportements inadaptés. Vouloir que tous le monde s'adonne à l'expérience mystique serait finalement un signe de non intégration de l'expérience.
Pour DD les états de conscience élargis (obtenus par la transe ou par les plantes sacrées) sont autant des outils thérapeutiques que des sources de confusion car les visions non ordinaires qu'elles font vivre, ainsi que les différents paradigmes sur lesquels elles peuvent s'appuyer génèrent une complexité qui, si elle n'est pas éclaircie (intégrée), provoque l'inverse de ce que l'on veut obtenir. En fonction de la culture les délimitations de la conscience sont variables. Dans les sociétés traditionnelles la transe, ou les cérémonies de prises de psychotropes, ne sont pas des moyens de développement personnel mais adviennent dans un contexte particulier et au service de la communauté. Dans notre société se pose donc la question de la place à accorder à une vision : Quelle validité accorder à un phénomène perçu de moi seul ? Et pour le thérapeute, comment travailler avec les 'Invisibles' ?
Thérapie psychédéliques ?
Denis Dubouchet reste donc très interrogatif sur l'utilisation des plantes psychotropes comme outil de thérapie. Pour lui, l'utilisation de psychédéliques demande un véritable savoir et de multiples compétences (médicales, psychologiques) et peut déclencher des états mentaux aussi bien positifs que négatifs car avec les psychédéliques les images s'imposent au psychonaute expérimentateur. En trip, c'est comme si nous assistions à une réalité autonome qui ne dépend pas de nous. Le sentiment d'être le réceptacle de visions provenant d'un extérieur ne facilite pas un processus de dialectisation permettant de donner du sens et d'assimiler ce qui a été vu. Difficile de critiquer une parole venue "d'en haut". Difficile dans ces conditions de questionner les visions. Avec les psychédéliques, le 'Je' de l'utilisateur "se pense" dans une position de contemplation et de jouissance passive face à ce que le "Produit", "la Plante" ou "le Champignon" lui offrent à penser. La prise d'hallucinogènes impose les visions et les ressentis. Le voyageur subit. Le risque est alors que la vision soit prise au pied de la lettre, car trop nette pour être comprise sous ses différents aspects. L'intégration d'une expérience doit se faire au regard des autres expériences de vie que nous avons eues et des valeurs et croyances qui nous portent. Quand une seule expérience vient effacer les précédentes sans davantage les questionner cela peut donner des postures caricaturales où des personnes deviennent de véritables 'talibans' de la pensée, car irréfutablement, ce qui transcende ne peut être réfuté. Le risque est alors de prendre ces visions pour une réalité équivalente à notre réalité quotidienne (celle de nos 5 sens) et de s'enfermer dans nos certitudes. La force de l'évidence complexifie l'intégration de l'expérience car la facilité de décryptage apparente est souvent un leurre pouvant aller jusqu'au passages à l'acte. L'autre point problématique avec l'utilisation des psychédéliques est celui de l'illégalité de ces pratiques qui conduit à l'introjection de discours paranoïdes et à l'impossibilité de parler ouvertement et de partager avec tout le monde le contenu de ces expériences. Enfin, la dispense du produit par l'encadrant maintient son 'patient' dans un rapport de dépendance qui ouvre la porte à des schémas de domination et à de potentiels abus.
Du point de vue thérapeutique ce sont les intentions qui comptent, et non les moyens. Plus que le contenu de l'expérience, c'est la façon dont elle va ou ne va pas s'intégrer, prendre sens, ou se symboliser dans la réalité partagée qui est importante. Pour DD l'exploration et le travail sur les visions en état de conscience élargie ont un effet thérapeutique grâce à l'accompagnement particulier du thérapeute. La difficulté étant de trouver le langage de ces images pour chaque personne car il existe de multiples niveaux de lectures permettant de de décrypter les images contactées. DD pose le principe qu'il n'y a pas de cosmologie unique et véritable. Il existe des cosmologies évolutives et des symboles qui peuvent être propres à chacun ou partagés par tous. Quelle que soit la technique utilisée (hypnose, transe, psychédéliques etc) le rôle de l'accompagnant sera d'aider la personne à se construire un système de repères qui lui soit propre (p102) car le processus transformatif qu'induisent les visions importe plus que leurs contenus. Les états de conscience élargie permettent de regarder sous l'angle de l'imaginal, et avec détachement, les expériences passées, et de trouver des postures dans des situations complexes ou de crise. En revanche, pour DD, les séances non préparées peuvent entrainer le sujet dans des scénarios totalement traumatisants.
Notes et extraits de la lecture de "Etats de Conscience Elargie, Psychothérapie et Chamanisme" Denis Dubouchet 2017.
Ozias
Comme l'a dit CG Jung, "il ne faut pas confondre l'expérience intérieure et son interprétation métaphysique".
Carl Gustav Jung (1875-1961) est un médecin suisse, pionnier de la psychanalyse, explorateur de la vie symbolique et spirituelle et de l'inconscient collectif. Ses travaux sont à l'origine de la pensée New-age et du développement personnel.
Jeune psychiatre de 25 ans, Jung découvre Freud en 1900 (p49). Freud et Jung échangent des centaines de lettres et s'analysent mutuellement. Pour Jung, le plus grand exploit de Freud est "d'avoir pris au sérieux ses malades et névrosés .../... et d'avoir prouvé empiriquement l'existence d'une psyché inconsciente". Mais Si l'inconscient est pour Freud une cave où reposent nos désirs sexuels refoulés, Pour Jung c'est [aussi] un grenier où filtre la lumière de nos aspirations vers le sacré. Malheureusement, Freud est persuadé que Jung veut prendre sa place à la tête du mouvement psychanalytique (p53). En 1914 Jung démissionne de l'Association de Psychanalyse, ce qui acte leur rupture. Analyste réputé, Carl Jung fut proche de la famille Rockefeller qui le finança généreusement tout au long de sa vie.
Pour Jung, être conscient c'est "percevoir et reconnaitre le monde extérieur ainsi que soi même dans ses relations avec le monde extérieur", et le "moi" est une sorte d'agrégat complexe de sensations, de perceptions, d'affects, de pensées, de souvenirs. Jung distingue « quatre fonctions psychiques » : le type Pensée, le type Intuition, le type Sentiment et le type Sensation, que chacun possède à des degrés différents. L'originalité de Jung est d'avoir introduit au-delà de l'inconscient individuel (résultant de l'histoire personnelle), étudié par Freud, l'inconscient collectif, qui représente la stratification des expériences millénaires de l'humanité : « Si l'inconscient pouvait être personnifié, il prendrait les traits d'un être humain collectif vivant en marge de la spécification des sexes, de la jeunesse et de la vieillesse, de la naissance et de la mort, fort d'une expérience humaine à peu près immortelle d'un ou deux millions d'années. ». Pour Gustav Jung, l'être humain ne naît pas 'tabula rasa', mais inconscient. "Nous désignons aussi ce dernier sous le nom d'inconscient collectif, précisément parce qu'il est détaché des sphères personnelles, existant en marge de celles-ci, qu'il possède un caractère tout à fait général et ses contenus peuvent se rencontrer chez tous les êtres, ce qui n'est pas le cas pour les matériaux individuels".(CG Jung, psychologie de l'inconscient p120 Livre de Poche.) . Les archétypes, découverts par Jung, sont les créations mentales des anciens qui hantent et structurent l'esprit des vivants. "[l'archétype]Je sais seulement qu'il vit, et que ce n'est pas moi qui l'ai fait". Jung différencie l'archétype -invisible- et son phénomène dans le monde intérieur , l'image archétypique -le visible. Les représentations sont "visibles" pour le sujet qui se les représente. Le passage de l'invisible au visible, de l'archétype à l'image archétypique, lors de l'observation intérieure est une transformation :" De par sa nature profonde, écrit Jung, l'archétype est un contenu inconscient qui subit une modification en accédant à la conscience et en étant perçu par elle".
Dans les années 20 Jung entreprend toute une série de voyages, il découvre des hommes peu touchés par la civilisation, vivant entre deux mondes (Inde, Afrique du Nord, tribus du Kenya, Indiens en Arizona, au nouveau Mexique). Suite à ses voyages, et à ses échanges avec un chef indien, Jung réalise que le sens de la vie humaine est de participer à la perfection de la création (p107). "Bien que nous ayons notre vie personnelle, nous sommes les représentants, les victimes et les promoteurs d'un esprit collectif dont l'existence se compte en siècles".
Dessin C G Jung
Jung se passionne aussi pour les philosophies orientales qui lui permettent d'aborder la psyché de manière plus globale. Puis, il se lance dans l'exploration de l'alchimie médiévale européenne. Les différentes opérations alchimiques sur la matière -l'œuvre au noir, au blanc et au rouge- lui apparaissent comme des phénomènes successifs de transmutation de l'esprit pour parvenir à l'union des contraires - le masculin et le féminin, l'esprit et la matière, le conscient et l'inconscient- que les alchimistes nomment "noces alchimiques" et Jung "réalisation de soi" (p118) . L'alchimie par sa tentative de transmutation de la matière et de l'esprit lui inspire le processus d'individuation par lequel l'individu se réalise en intégrant la totalité de sa psyché (p121). .
Pendant la période nazi Jung navigue à vue, et se compromet en 1934 avec un texte antisémite inspiré par sa rivalité avec Freud, puis se réfugie en Suisse où il est sollicité en tant que psychanalyste espion par les ennemis du Reich de différents bords.(p142).
Début 1944, terrassé par un infarctus, Jung fait une expérience de mort imminente (EMI) qui le confronte aux questions essentielles "Pourquoi ma vie s'est elle déroulée ainsi ? Qu'ai je fait de mes talents et de mes fragilités ? Qu'en résultera t'il ?" et qui, ayant fait l'expérience de la béatitude et du sentiment d'éternité, le transforme durablement. Jung reformule alors ses procédés thérapeutiques à l'aune de ses propres expérimentations. Sa thérapie vise à l'accroissement psychique et spirituel de l'individu (individuation) et par là même à l'élévation du niveau de conscience de l'humanité. En ce sens, Jung est le père du développement personnel (p159). Les hypothèses mystiques de Jung ont aussi conduit au développement du courant « New Age » qui en reprend les concepts d'inconscient collectif et d'âme psychique. Pour Jung, si la première partie de notre vie a pour but de produire et de se reproduire, la seconde doit nous mener à élever notre niveau de conscience au travers du processus de l'individuation. Jung reste pourtant agnostique (en termes de croyances) et très prudent au sujet de la survie de l'âme après la mort. Il distingue soigneusement les évènements des connaissances et souligne le risque qu'il y a à confondre une expérience intérieure et son interprétation métaphysique (p180).
Le dualisme de Jung :
Pour Jung le moi se construit en devenant "conscient d'une polarité d'opposés qui lui est 'sur-ordonnée'". Cette tension est génératrice d'une formidable énergie psychique qui permet de passer à l'action. L'essence de la conscience est la différenciation. (p288). Comme en alchimie, "l'union des opposés est à la fois la force qui provoque le processus d'individuation et son but". Pour Jung "[c'est] dans la vie terrestre où se heurtent les contraires que le niveau général de conscience peut s'élever. Cela semble être la tâche métaphysique de l'homme". Si les conflits de contraires ne sont jamais totalement résolus, ils peuvent passer un jour à l'arrière plan. La solution qui naît de la coopération entre conscient et inconscient est alors ressentie comme un moment de grâce .L'acceptation succède au combat. Hors, seul l'amour peut permettre cette réconciliation. Sur l'amour Jung écrit "Il y va ici de ce qu'il y a de plus grand et de plus petit, de plus éloigné et de plus proche, de plus élevé et de plus bas, et jamais un des termes ne peut être prononcé sans celui qui est son opposé" car l'amour pour Jung est le grand mystère qui inclut tout (p291).
Ozias
Cet article est un résumé fait à base d'extraits du livre "Jung , un voyage vers soi" de Frédéric Lenoir (Albin Michel 2021).
A lire aussi:
L'arrière-monde ou l'inconscient neutre. Bruno Traversi, Alexandre Mercier Editions Cénacle de France
Voici le mois d'octobre, la saison des champignons. Certains sont comestibles, certains sont toxiques d'autres sont psychoactifs. C'est le cas du fameux Psilocybe Semilanceata qui fleurit dans les prairies humides à cette période de l'année. Tous les connaisseurs le connaissent, mais peu savent le reconnaitre. Cet article s'adresse aux les mycologues les plus curieux.
AVERTISSEMENT : Ce post est fait dans un but de vulgarisation et de partage de connaissances mycologiques. Le ramassage, la vente et la consommation des Psilocybe Semilanceata sont INTERDITS EN FRANCE. Plaisir des yeux, des photos seulement. Sans ramasser ni consommer vous évitez tout risque d'empoisonnement ou problème avec la loi. De plus vous favoriserez la reproduction du plus malicieux champignon de nos prairies.
A quoi ressemblent ils ?
Chapeau Psilo humide
Le Psilocybe Semilanceata est un minuscule champignon de prairie haut d'une dizaine de centimètres max. les anglo-saxons l'appellent liberty cap à cause de son chapeau qui ressemble au bonnet phrygien. Après avoir vu une fois et en vrai, le PS (Psilocybe Semilanceata) il est difficile de le confondre avec d'autres espèces. Le 'têton' au sommet du chapeau est caractéristique de l'espèce. Pourtant, selon les lieux et l'hygrométrie, les individus les formes et les couleurs du champignon varient considérablement. Le PS est un champignon hygrophobe, et donc il change de couleur selon qu'il est sec ou mouillé.
Lorsqu 'il est humide (ou parce qu'il pousse ou parce qu'il a plu ou qu'il y a de la rosée) le chapeau est brun olive et brillant, en forme de lance (ce dont le PS tire son nom de semilanceata -latin- ou lancéolé - français-). Le champignon a une teinte beige jaunâtre ou brune unie lorsqu'il est humide. Chez les spécimen adultes des rayures verticales, sombres et serrées apparaissent près des lamelles au bas du chapeau. Lorsque le champignon grandit, son chapeau s'évase et le têton devient moins visible.
Lorsqu'il est sec le chapeau du PS prend une couleur crème jaunâtre presque dorée qui permet de repérer plus facilement les chapeaux dans le vert de l'herbe. Notons ici qu'il est plus difficile de trouver les PS par grand soleil que par temps couvert ou lorsque la lumière devient rasante et permet de distinguer la forme caractéristique du PS dans la jungle des herbes parmi lesquelles il pousse.
Les lamelles sont grises sur les spécimens jeunes et avec la maturité foncent jusqu'au violet sombre. Toujours les lamelles sont sombres, et cela à cause de la couleur des spores. On trouve cependant quelques spécimen stériles chez lesquels, faute de spores, les lamelles restent de la couleur du chapeau.
Quand poussent ils ?
En automne principalement, mais cela dépend aussi des températures, des précipitations, de l'altitude et de la région. De septembre à décembre selon les climats et les altitudes, une baisse de températures suivie de précipitations abondantes avant les fortes gelées . Un bon moyen de savoir quand ils apparaissent est de suivre la carte https://www.magicmushroommap.com/map pour des indications grossières, mais plutôt fiables. Il peut y avoir des écarts en termes de jour, d'altitude, ou de lieu, mais c'est quand même une référence en la matière. Bref, ce n'est pas parce que la carte est favorable que vous en verrez, mais si la carte est défavorable, alors, il y a peu de chances que vous en trouviez.
Où poussent ils ?
D'abord, cela dépend de la région. Jusqu'au bord de la mer en Irlande, ce qui n'est le cas pour la méditerranée. Il me semble qu'au sud de la Loire, une certaine altitude est nécessaire. Dans les Alpes je n'en ai jamais vu en dessous de 1500m, tandis qu'en Bretagne ils se plaisent dans les vallées et les collines de basse altitude.
Dans tous les cas il faut viser les prés où l'herbe n'est pas trop haute. La hauteur du champignon ne dépassant pas 10cm, il n'est guère possible d'en trouver quand l'herbe les cache, ou les empêche d'atteindre la lumière. D'après mes observations, le PS n'aime pas les herbes trop grasses ni trop vertes. De même, les terrains dans lesquels paissent les vaches et les chevaux ne semblent pas très indiqués. D'abord parce qu'on risque de déranger les animaux et surtout car on ne voit jamais pousser les PS sur les bouses ou le crottin. Les pâturages à mouton constituent un milieu propice, mais on sait que les ovins sont des vecteurs de la douve du foie (grave maladie parasitaire), raison supplémentaire donc pour ne pas cueillir de PS. Si vous avez repéré un champ, attendez donc le départ du bétail, laisser les bouses se décomposer pendant une saison ou plus avant de prospecter.
La présence de trèfle, de luzerne ou de plantain n'est pas un bon indice non plus. Si l'herbe a été semée, si le champ est traité aux phytosanitaires, ou que le terrain a été travaillé ce n'est pas bon signe, même si certains terrains de golf semblent être le lieu de belles cueillettes outre-manche.
Par contre, la présence d'herbes de différentes espèces, de différentes textures, la présence de joncs ou de chardons, la proximité de tourbières, un sol humide, riche et acide sont plutôt de bon aloi. Peut être les touffes d'herbe drue constituent elles le microclimat propice au développement de leur mycélium. Une fois le premier trouvé, le mieux est de se mettre à quatre pattes (en position ruminant) et d'inspecter cm par cm en prenant garde de n'écraser personne. Le PS vit en familles d'une douzaine d'individus d'âges et donc de couleur différentes, parfois plus, mais jamais en clusters de centaines d'individus, et rarement proches au point que leurs chapeaux se touchent.
Comment s'assurer que ce sont les bons ?
Le PS a le pied robuste et le chapeau bien attaché. Le pied du PS est blanc crème, allongé, jamais rectiligne ni violacé. Contrairement à d'autres champignons de même forme et de même taille le pied est plutôt élastique (retour à la forme initiale si il est plié) et résistant. Pincé entre le pouce et l'index, le pied ne s'écrase pas complètement, et si on tire le champignon par le chapeau, il ne se brise pas et l'ensemble du champignon s'arrache jusqu'au mycélium. Porté au nez, le PS frais écrasé dégage une fragrance caractéristique à la fois terreuse et herbeuse, très champêtre et pas désagréable, contrairement à certains faux amis qui eux ne sentent rien ou ont des odeurs plus farineuses. Quand il a pris l'humidité, la surface du chapeau devient visqueuse et a tendance à coller aux herbes, ou aux champignons voisins. Signe de reconnaissance : quand il est humide, il est possible de décoller une fine pellicule gélatineuse de la surface du chapeau. Avec la maturité le chapeau des PS s'évase, mais le têton reste visible . Le chapeau ne peut en aucun cas se retourner comme un parapluie, même si en l'aidant (c'est le cas chez d'autres espèces semblables).
La sporée du SP est de couleur sombre (entre marron violet et rouge profond).
Observés au microscope spores ont une forme oblongue ou ovale ; ils sont longs de 10,5 à 15 microns et larges de 6,5 à 8,5 microns. (Texte et Photo Wikipedia).
De nombreux faux amis
Comme toujours les faux amis sont nombreux et très ressemblants. Mycènes, conocybes, panéoles etc poussent aux mêmes endroits et en même temps. Attention donc aux confusions. Un pied trop blanc, trop foncé, trop droit, trop fragile, trop court. Un têton peu marqué, des lamelles claires, un pied fragile suffisent en principe à les discriminer, mais les différences sont parfois bien subtiles. En cas de doute, voici un groupe FB pour faciliter l'identification : https://www.facebook.com/magicmushielearning et répondre à vos questions (in english).
Ci-dessous 3 exemples de faux amis, à ne pas confondre. La liste reste ouverte.