lundi 18 décembre 2017

rebirth

Ce matin, séance de rebirth, avec un groupe de développement personnel. Allongé sur un tapis, sur le dos,  j'inspire:  ventre... poitrine... clavicules, puis j'expire vivement par la bouche et j'enchaîne selon le rythme donné par mon partenaire, assis sur son zafou. 
Après quelques minutes mes avant-bras sont comme paralysés et deviennent douloureux. Mes pouces, en particulier, ne fonctionnent plus. Alors je lève les bras et je commence à faire bouger mes avant-bras, mes poignets, mes mains, comme si je dansais. Puis la danse se précise, se fait transe puis extase. Je sens aussi ma bouche se contorsionner en grimaces inconnues et cela me détend extraordinairement les traits du visage. Je sens la présence d'une Energie, partout autour de moi qui me traverse et me connecte avec tout ce qui existe. Je ressens aussi la joie essentielle, immense de faire partie du vivant. 
Le dos au sol, yeux fermés, mes bras et mes jambes dansent puis je m'étire et j'étends à fond bras et jambes, mains et pieds.  Peu à peu je suis comme possédé mais pas inconscient. Je ne fais pas de bruit et je fais attention à ne pas heurter de mes mouvements mon partenaire qui assis près de moi suit ce que je fais et rythme ma respiration. Je retrouve la position d'un bébé couché sur une table de naissance. Dans la posture de 'la table' mes mains et mes pieds au ciel comme des antennes  pour capter  l' émission d'Energie. Je me sens connecté à une lumière blanche et crue qui s'étend tout autour de moi. Mes bras me semblent ecchymosés, et grêles comme ceux d'un nouveau né. Peu importe car tout en moi est joie et énergie. Je pense à ma mère qui m'a donné la vie, à son travail et ses souffrances. Je pleure, je ris et je la remercie du fond du cœur. Sentiments d'élévation, d'harmonie, de joie et de gratitude envers la vie. Sentiment de victoire aussi de m'être autorisé à aller aussi loin. A la fin de la séance je reviens à moi tout rayonnant et chargé d'énergie...

Tout au long de la semaine qui a suivi  j'ai ressenti de fortes courbatures aux avant-bras.
Dans mon lit, j'ai aussi tenté de refaire du rebirth . Mais après une dizaine d'inspirations fortes, s'ensuit une légère perte de connaissance qui interrompt automatiquement le processus. La présence d'un partenaire qui rythme la respiration et qui encourage, et celle d'une musique appropriée semblent deux facteurs clé de succès pour atteindre le stade de la transe.

Par rapport à un trip chimique, je me demande lequel des deux est le plus dangereux. Bien sûr, avec le rebirth on ne risque guère de s'empoisonner, mais on peut se poser des questions sur son état de santé mentale. Par exemple, pourquoi cet exercice a t'il eu beaucoup plus d'effet sur moi que sur les autres ? La cloison entre délire et conscience serait elle si fragile  ? Serais-je en train de ' perdre le contrôle' ? 
Les risques de tomber sous influence du groupe avec lequel on pratique, ainsi que les risques d'interprétation abusives ou de dérives sectaires sont également plus élevés que si l'on s'en tient à l'absorption d'un produit. Quoique...
Avec le LSD, le LSA ou les substances que vous préférez, les visions, les révélations peuvent être de même nature, mais restent finalement plus explicables et plus 'attendues'. Même si elle n'a pas objectivement plus de 'réalité', cette expérience de rebirth que j'ai produite naturellement, sans dopage, s'apparente encore plus à une connaissance, une révélation que ce que ce l'on peut vivre ou voir au cours d'un trip chimique.  D'ailleurs, si les grands mystiques avaient usé de drogues, ils auraient perdu toute leur crédibilité. La façon dont a tourné cette expérience ne peut être attribuée au conditionnement du groupe, qui est très hétérogène et que je ne fréquente pas régulièrement . Personnellement, je suis agnostique, et nullement porté sur l'ésotérisme ou les philosophiques orientales.
Même si je ne peux m'empêcher de penser que les sensations et les visions que j'ai eues par rebirth sont comme un 'replay' d'hallucinations déjà entrevues avec des psychotropes, cet épisode s'ajoute aux histoires de vie qui me construisent.

Joyeux Noëls et happy rebirth to you  !
Ozias

PS: Quelques prérequis pour un rebirth réussi. Pouvoir contrôler sa respiration avec une inspiration ventre, thorax, clavicule (inspiration par le nez suivie d'une expiration rapide par la bouche sans temps d'apnée).
La pratique de la danse permet de s'exprimer physiquement et d'échapper à la paralysie entraînée par la sur-oxygénation. Accepter de lâcher prise enfin, car si l'on ne se laisse pas aller à ce qui vient, le processus se bloque, de la même façon, que l'hypnotisme ne peut fonctionner que si on l'accepte ou si l'on baisse la garde. Ce dernier point demande à être en confiance et affranchi du regard des autres. Eviter par exemple de se demander si les grimaces qui viennent de si loin et qui font tant de bien sont à notre avantage ou pas. Ne pas avoir peur de passer pour un illuminé lors de la phase de restitution de l'expérience.

à lire, à voir également sur ce blog :



http://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/05/lsa-mystique.html

https://emagicworkshop.blogspot.fr/2018/02/spiritualite-athee_16.html

http://emagicworkshop.blogspot.fr/2016/07/naissances.html

http://emagicworkshop.blogspot.fr/2015/10/nde.html

http://emagicworkshop.blogspot.fr/2015/10/psychonautisme.html


jeudi 7 décembre 2017

Pharmakon et Réduction des risques


"En Grèce ancienne, le terme de pharmakon désigne le remède, le poison, et le bouc-émissaire.
Le pharmakon est à la fois ce qui permet de prendre soin et ce dont il faut prendre soin, au sens où il faut y faire attention. Cet à la fois est ce qui caractérise la pharmacologie qui tente d’appréhender par le même geste le danger et ce qui sauve.
Poison et remède, le pharmakon peut aussi conduire par sa toxicité à désigner des boucs-émissaires tenus responsables des effets calamiteux auxquels il peut conduire en situation d’incurie." 
Le pharmakon (ou pharmakos)  bouc-émissaire est illustré ci contre.

On comprend donc aisément en quoi ce mot fascine les spécialistes des addictions. Il contient à lui seul les faces multiples du monstre connu sous le nom de « drogue ». Poison pour les uns, remède pour d’autres, mais surtout bouc émissaire, prétexte idéal, casus belli de rêve. Par sa définition floue et paradoxale le  pharmakon me semble correspondre à la problématique des toxiques comme à celle de la réduction des risques (RdR)

En matière de lutte et de prévention des méfaits des psychotropes, deux attitudes prévalent actuellement. L'une moralisatrice et répressive consiste à  prohiber la consommation en masquant le problème et en compliquant la vie de l' usager afin de le dissuader de consommer ('punir pour soigner' conformément à la loi de 1970). Par voie de conséquence, en raison de la criminalisation des pratiques, et du manque d'informations, les consommateurs mettaient leur santé en danger: achat de drogues frelatées, risques de dosages ou de mélanges dangereux, injections à risque facilitant la transmission des virus. 
L'autre attitude, celle de la réduction des risques (RdR), adopta une approche beaucoup plus pragmatique du genre : "Si vous le pouvez, ne vous shootez pas. Sinon, essayez de sniffer au lieu d'injecter. Sinon, utilisez une seringue propre. Sinon, réutilisez la vôtre. Au pire, si vous partagez une seringue, nettoyez-la à l'eau de javel"....etc Oui, c'est ainsi que se pratiquait la RdR au siècle dernier ! 
Depuis les années 90 la RdR est une démarche globale qui vise la «réduction des effets nuisibles sur la santé», ou encore «réduction des dommages» (sous-entendu «causés par l’usage des drogues »).

C’est une démarche qui consiste à soutenir les personnes et trouver avec elles des solutions adaptées à leurs pratiques et dans le respect de celles-ci afin de réduire les risques de contamination et/ou de transmission du VIH et des hépatites.

Conceptuellement, la réduction des risques (RdR) rompt avec l'idéal d'éradication des drogues en proposant plutôt d'apprendre à 'vivre avec les drogues' en les domestiquant et en promouvant une attitude responsable et soucieuse des risques induits. Cette approche permet de dépasser la vision moralisatrice et répressive. 
De manière récurrente la RdR est traversée par le débat entre une 'weak rights version' qui ne pose pas la question légale comme une condition nécessaire à la réduction des risques (comme c'est le cas en France), versus une 'strong rights version' qui considère que l'usage de drogues fait partie des droits de l'homme et fait de la question légale un préalable à la réduction des risques (Neil Hunt).
Enfin, un autre débat oppose une vision neutre de la RdR, centrée uniquement sur la dimension pragmatique et réduite à la mise à disposition d'outils, à une vision politique et morale qui s'attache plus globalement à la prévention et au contexte d'existence des usagers. Ainsi, en France, la réduction des risques répond principalement à des objectifs purement sanitaires et les réponses sociales telles que l’hébergement ne participent pas toujours au dispositif. Au contraire, dans les autres pays d’Europe du Nord, les collectivités locales sont à l’origine de véritables politiques locales en matière à la fois de drogue et de toxicomanie.

Sur le terrain, côté RdR on trouve Technoplus, qui regroupe des assos comme, par exemple, keep smiling en milieu festif sud-est, les Caarud  (Centre d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues) en ville, et surtout les sites comme psychoactif, Asud ou météo des Prods sur le net. Quoi qu'il en soit, les associations de réduction des risques me semblent toucher principalement un public initié. Les primo-utilisateurs, les plus jeunes, ne les connaissent généralement pas. Il est d'ailleurs bien délicat d'orienter un tout jeune utilisateur vers des sites spécialisés comme Psychoactif qui  à l'instar du 'pharmakon'  éduquent, informent, préviennent des risques mais ouvrent aussi les portes à quantité d'expériences nouvelles et bien sûr plus ou moins risquées. Le remède risque dans ce cas de devenir poison. Quand au bouc-émissaire, ce sera alternativement le consommateur l'initiateur et naturellement les associations de réduction des risques. Le cas le plus récemment médiatisé est sans doute la polémique au sujet de la salle de consommation de la rue Ambroise Paré Paris XVIII.
Comme toujours, ce qui est simple est faux et ce qui ne l'est pas est plus compliqué.

Ozias


Sources : 


vendredi 24 novembre 2017

le glissement

Tal Coat. Autoportrait
"Le glissement, c’est le moment où la personne lâche la vie. C’est une forme de résilience absolue et d’acceptation de la mort." 
Le terme de glissement est utilisé depuis 1967 pour désigner un changement qui, principalement chez des personnes très âgées, se caractérise par une détérioration globale des fonctions intellectuelles, un désintérêt pour toutes choses, un refus de se mouvoir et de s'alimenter. Le plus souvent cette pathologie est consécutive à une maladie ou un accident. Son pronostic est très péjoratif.

"Parmi les facteurs de risque, on trouve en tête la perte du conjoint ou la perte d’un proche, qui se conjugue à une baisse de l’estime de soi. Il existe aussi d’autres éléments déclencheurs comme l’annonce d’un diagnostic, la vente d’un bien immobilier précieux pour l’histoire familiale du patient ou encore une intervention chirurgicale dont les suites sont mal vécues."

"Pour identifier l’origine du problème et l’élément déclencheur, il faut s’intéresser à la biographie du patient. Prendre le temps de créer un lien de confiance, discuter avec sa famille, faire attention aux mots employés.../... c’est notamment le moment où les gros secrets de famille explosent. Des événements très lourds, éteints ou mis de côté pendant des années, refont surface alors que la chaudière de la maison tombe en panne."
Le syndrome de glissement s’installe souvent dans le passé, les secrets de famille, les décès ou les deuils douloureux.

Chez le jeune enfant, L’hospitalisme dit aussi «syndrome de la pouponnière», se manifeste par un syndrome de régression mentale, une dépression dite «anaclitique» (inhibition anxieuse, désintérêt pour l’extérieur, refus de s’alimenter etc.) et un ensemble de troubles physiques dus à une carence affective par privation de la mère. Si cette carence est totale et prolongée les troubles peuvent aboutir à des états de marasme irréversibles et à la mort.
Un syndrome semblable même est observé chez l'animal : celui de ces chiens, qui se laissent mourir lorsqu'ils sont abandonnés par leurs maîtres.

Dans ces situations, les régressions pathologiques, les processus d’autodestruction, les logiques psychiques primitives semblent œuvrer à une défense paradoxale qui consiste à se sauver de l’anéantissement par l’anéantissement.
On peut se demander alors si ce n'est pas quand des «besoins» de la psyché (narcissiques, libidinaux, pulsionnels)  d’une personne, âgée ou non, sont mis à mal de façon grave et durable qu’un cap rédhibitoire se franchit malgré des soins physiques appropriés et que, dès lors, plus rien ne fait rempart au «choix» de se laisser glisser, de «se donner la mort» ?

Cette hypothèse ouvre la question de la «relation de soins», relation psychique «d’échange/transfert» qui implique le rapport à l’Autre, et de ses incidences dans la rencontre soigné/ soignant(s). Effectivement, da
ns les institutions médicales, c’est souvent à de seules dimensions d’hygiène, de nécessités physiologiques, à des gestes machinaux et des paroles conventionnelles qui ne supposent aucun sujet, que sont ramenés des soins qui pallient ce qu’une personne ne peut accomplir seule. Tels sont les soins dits de «nursing» (laver, changer, nourrir etc.), bien peu valorisés. Ainsi, par exemple, si placer une sonde gastrique pour nourrir est un soin «valorisé» à l’hôpital comme geste médical, aider à manger une personne qui ne peut le faire seule est plutôt pensé comme une charge de travail indue.

Hospitalisme ou glissement, enfant ou adulte âgée ou non, c’est ici le psychique qui peut contrer les processus de néantisation. Encore faut-il que ce secours, qui se joue dans  la qualité de l’échange/transfert de la «relation de soins», intervienne avant l’inéluctable franchissement d’un seuil irréversible, qu’il réponde aux «besoins» de la psyché et puisse alors «réanimer» les voies pulsionnelles, libidinales, narcissiques par lesquelles un sujet peut revenir à l’envie de la vie, se «redonner» la vie. 


Dans le meilleur des cas, le "glissement" arrive sans événement traumatique, au moment où le sujet semble s'être résigné à la mort. Natacha Ledjam, psychologue clinicienne qui a travaillé dix ans en Ehpad, explique :"Il y a des gens qui, à un instant T, se disent que c’est leur moment. Qu’ils sont fatigués. Qu’ils ont fait ce qu’ils avaient à faire. Que ça n’a pas de sens pour eux de continuer à faire des activités, suivre des comportements normatifs soutenus par les institutions. Ils disent qu’ils ont fait leur temps, sans pour autant traverser une dépression." La lampe n’a plus d’huile,au bout du rouleau le vieillard se laisse aller paisiblement." 
Dans ce cas, qui parait le plus simple, le glissement est une forme d'anéantissement lucide et accepté qu'il nous faut respecter car "Qui sommes-nous pour vouloir absolument trouver des raisons de vivre à la place des autres ?"

vendredi 10 novembre 2017

Le corps, moyen de connaissance

Dans certaines civilisations, le corps apparaît comme un moyen d'accéder à la connaissance ancestrale, stable, en recourant aux rituels chamaniques, à la transe, aux hallucinations, etc. 
A partir de Freud et le surréalisme, des artistes ont creusé l'idée que l'identité n'existait pas "en soi" mais qu'elle était exprimée à la fois dans l'extérieur et l'intérieur du cadre culturel.  Ils ont également exploré la notion de conscience et mis à jour un "moi" caché, informel et liminal.  Parlant de l'emprise de la technique sur la vie au XXème siècle, Heidegger remarquait que le monde est "conçu et appréhendé comme une image", tandis que le corps est un outil, un véhicule.
A la fin du XXème siècle, et plus précisément à partir des années 60, alors que  la notion de "moi" (physique et mental) considéré comme une forme stable, achevée, s'est considérablement érodée, notre culture occidentale re-?découvre que le corps est capable de produire une connaissance qui n'est ni rationnelle, ni empirique. Quelques exemples :


Dans les années 60, la peinture étant considérée comme une action (celle de Jackson Pollock par exemple), le geste de l'artiste est devenu un fondement de l'oeuvre. Les artistes ont alors commencé à faire de leurs corps un matériau artistique dans des 'performances' ou des 'événements'. Puisque le corps était le matériau de l'oeuvre, cette dernière ne durait que le temps du geste de l'artiste et c'est la photographie qui en garde la trace. La situation de l'artiste en représentation s'est ainsi souvent transformée en une forme de militantisme politique.
Charles Ray considérait la sculpture comme un acte et non un objet.  Cette oeuvre (1973) est une recherche sur la façon dont une planche peut à la fois diviser un corps et le maintenir
Côté musique, 1967, Monterey Pop Festival : Jimi Hendrix brûle sa guitare

Marina Abramovic
 
est la grand-mère des performeurs. Depuis 1973
elle étudie et repousse les frontières du potentiel physique et mental à travers ses performances. En 1974 Dans le studio napolitain Morra, l'artiste se tient debout, figée, dans une pièce. Dans cette même pièce se trouvent 72 objets placés sur une table. Une affiche donne la "consigne" suivante : "Sur la table il y a 72 objets avec lesquels vous pouvez me faire ce que vous voulez.Je suis un objet. Je prends la responsabilité de tout ce qui se passera dans ce laps de temps.Durée : 6 heures (20h - 2h)
Lien à suivre : http://www.feroce.co/marina-abramovic/
A l'issue de la performance, elle déclare :
"Ce travail révèle ce qu'il y a de plus horrible chez les gens. Cela montre à quelle vitesse quelqu'un peut se décider à te blesser lorsqu'il y est autorisé. Cela montre à quel point il est facile de déshumaniser quelqu'un qui ne se défend pas. Cela montre que la majorité des gens 'normaux' peuvent devenir très violents en public si on leur en donne la possibilité." 


Marina Abramovic 'Rest Energy' Amsterdam 1980. Durée 4mn


En 1991 Marc Quinn a progressivement recueilli durant 5 mois, 4,5 litres de son sang soit l'équivalent de la quantité moyenne de sang présente dans le corps humain. Il a ensuite réalisé un moulage de sa tête avec ce sang (congelé) qu'il a installé dans une boîte en plexiglas transparent relié à un système de congélation maintenant le bloc de sang à une température de -70°C. Cet 'autoportrait' contient donc les informations stockées dans le corps de l'artiste : matière première et code ADN . Comme le corps de l'artiste, ce moulage est mortel.  Conservé par réfrigération il se liquéfiera et pourrira lorsque le courant électrique sera coupé.
Marc Quin. Self (Le Moi) 1991. Sang, acier, plexiglas et système de réfrigération. 

Piotr Pavlenski est un artiste ou activiste russe qui paye de sa personne. Il s'est cousu les lèvres, coupé une oreille, emballé dans du barbelé, cloué les testicules sur la place rouge et j'en passe évidemment...

Lien à suivre vers Piotr Pavlenski https://unpointculture.com/2016/10/11/lartiste-russe-qui-desarme-les-policiers-de-poutine/

Sources : "Le corps de l'artiste" Phaidon 2011 et Internet.

samedi 4 novembre 2017

Anonymous

Les GAFAM ( Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ont un modèle simple : ils ne font pas payer directement les usagers mais gagnent de l'argent en collectant le maximum de données sur eux.
Nous n'avons pas conscience de la masse d'informations que nous laissons en ligne. Nos différentes localisations, nos photos, contacts, ce qu'on aime, lit, écoute, mange...
L'un des principaux enseignements de l'affaire Snowden est que le profilage des internautes fait par des sociétés privées pour de la publicité ciblée rend économiquement possible la surveillance de masse par les Etats. S'ils veulent le faire, ils n'ont qu'à aller voir ces données collectées.

La question est donc de savoir dans quelle mesure il est possible de communiquer sans être espionné, sans que nos conversations, nos mails, notre historique de navigation tombent dans des oreilles indiscrètes ?
Cette question concerne tout le monde, pourtant il n'est pas rare d'entendre " mais je n'ai rien à cacher". Or nous avons tous une vie privée : nous mettons des portes à nos maisons ou des enveloppes sur nos lettres. Il en va de même à l'ère du numérique. 
S'il est illusoire de penser que l'on peut être parfaitement anonyme sur le Web, voici quelques pistes pour mieux se protéger. Voici ce que j'ai retenu comme moyens de navigation sur réseau anonyme (Dark net), ou comme moyen d'accès au Deep web (contenu caché du web car non indexé par les moteurs de recherche).

1.Masquer son identité, concrètement l'adresse IP de son ordinateur, par un accès VPN. Cela consiste à accéder aux sites visités via un ordinateur tiers qui laisse son identité au lieu de la votre. Avantage : c'est une communication par procuration (proxy), inconvénient : elle n'est pas anonyme car il est possible de remonter la chaîne de communication.

2.Anonymiser ses connexions et ne pas laisser de traces. Le réseau TOR (The Onion Router) équipé du moteur de recherche Duckduckgo permet aux des internautes ne voulant pas exposer leur recherches sur Internet et leur historique de navigation aux marchands de publicité  d'échapper à l'analyse de trafic. Avec Tor le fournisseur d'accès (FAI) ne peut plus voir quels sites vous avez visité, mais sait que vous avez utilisé Tor, sauf si l'accès à Tor s'est fait au travers d'un VPN. Autre inconvénient de TOR : le réseau est ralenti et les résultats du moteur de recherche sont moins pertinents qu'avec Google.

3.Le système d'exploitation Tails  (The Amnesic Incognito Live System) est un OS (Operating System) basé sur Linux et installé sur une clé USB à partir de laquelle on démarre son ordinateur. « Amnésique », il ne laisse aucune trace sur l'appareil utilisé et ne conserve aucune donnée. « Incognito », il utilise le réseau d'anonymisation TOR pour se connecter à Internet, embarque des outils de chiffrement des communications et des données, et permet même de camoufler l'adresse MAC – l'identifiant physique – de l'ordinateur. Les choix de configuration par défaut sont conçus pour limiter au maximum les risques. Avantages : Pas de risque de virus, pas besoin de VPN, aucune trace, chiffrage des fichiers et des communications par cryptographie
Inconvénient : La NSA le définit comme « un dispositif de sécurité des communications préconisé par des extrémistes, sur des forums extrémistes », comme en atteste une enquête publiée début juillet sur le site de Das Erste. Elle a révélé que les internautes effectuant des recherches sur le projet ou visitant son site Web sont spécifiquement surveillés, de même que les utilisateurs du réseau TOR ou les lecteurs du Linux Journal, un magazine consacré au logiciel libre. En tout cas, j'ai essayé de créer un compte Facebook depuis Tails, et avant d'avoir pu poster quoi que ce soit, Facebook m'a zucké le compte pour cause de non respect des standards de la communauté !


Voici donc des alternatives à Google et Microsoft disponibles sur le web. L'installation et l'utilisation de ces logiciels sont relativement aisées mais c'est toujours pareil : 
"quand on se met au bio, il faut savoir renoncer aux fruits calibrés et brillants, aux tomates au mois de décembre ou au jambon bien rose sorti de l’emballage. Mais le goût et la saveur sont tellement meilleurs !"

Quelques liens : 
https://blogs.mediapart.fr/jean-pierre-favier/blog/190217/preserver-votre-vie-privee-et-votre-anonymat-avec-tails-et-tor
https://blogs.mediapart.fr/jean-pierre-favier/blog/080517/surveillance-lanceurs-d-alerte-et-etat-d-urgence
https://www.orange-business.com/fr/blogs/securite/nouvelles-technologies/tails-votre-clef-pour-aller-sur-le-deep-web
https://www.orange-business.com/fr/blogs/securite/webtech/deep-web-une-ballade-en-dehors-des-sentiers-battus
http://www.01net.com/actualites/pour-la-nsa-les-utilisateurs-de-tor-ou-tails-linux-sont-des-extremistes-623152.html
http://www.internetactu.net/2010/05/21/lettre-ouverte-a-ceux-qui-nont-rien-a-cacher/
https://www.letemps.ch/economie/2017/11/23/un-incroyable-systeme-despionnage-internautes-mis-jour

Tout savoir ou presque  : https://donottrack-doc.com/fr/episodes/
Hygiène des mobiles : https://numaparis.ubicast.tv/permalink/v12515aee8006jl78wbq/

Le Parti pirate s'oppose à la mise en place d'une surveillance généralisée et à un filtrage du contenu d'Internet, qu'il considère comme une atteinte grave à la vie privée, mais aussi à la neutralité, sur le réseau des réseaux. 
 https://www.partipirate.fr/les-fondamentalistes-du-tout-economique-veulent-vendre-votre-vie-privee

Rapport Amnesty International sur les dangers Facebook et Google
https://www.amnesty.org/download/Documents/POL3014042019ENGLISH.PDF

mardi 10 octobre 2017

Existences

To be or not to be: Shakespeare/Ozias
"Je pense donc je suis". Tout le monde a déjà entendu cela et nous existons certainement au beau milieu d'un monde sensible et perceptible. Cela ne répond pourtant pas à la question bien connue : "to be or not to be ?".
Autrement dit qu'est ce qu'exister ? et peut on exister physiquement tout en ne comptant pas en tant qu'être ? 

Dans "Les existences moindres" David Lapoujade, prof de philo à la Sorbonne,  remarque que si l'existence est évidente sa réalité est elle contingente et pose la question de savoir qu'est-ce qui rend plus réel ce qui existe
L'auteur s'appuie notamment sur les travaux d'Etienne Souriau (philosophe) qui distingue différents modes d'existence* s'échelonnant de l'évidence du phénomène jusqu'à l'existence incertaine des réalités virtuelles. 
La problématique des existences est alors celle du champ de l’expérience et la connaissance, de la prise en compte d'existences 'moindres' et donc de nos facultés de reconnaissance de ce qui vit, de ce qui s'exprime.
Formulé autrement, comment changer de perspective pour voir le point de vue des autres ?  Puis comment le faire exister et qu'en faire ?
Citations :
"La connaissance devra t'elle sacrifier à la vérité des populations entières d'êtres, rayés de toute positivité existentielle" ? (Souriau p19)
"Rendre plus réelles certaines existences, leur donner une assise ou un éclat particulier, n'est-ce pas une façon de légitimer leur manière d'être, de leur conférer le droit d'exister sous telle ou telle forme ? Cela suppose que toute nouvelle forme d'existence est comme précédée par une question qui en mine souterrainement la réalité : 'de quel droit prétendez vous exister ? Qu'est-ce qui légitime votre 'position' d'existence ? 
Chaque forme d'existence artistique, scientifique, existentielle doit faire la preuve de son bien-fondé. Pour se 'poser', elles doivent vaincre le doute, le scepticisme ou le déni qui leur conteste le droit d'exister."(p20)

Toute chose, nous y compris, a une existence inachevée : tout est dans le demi-jour. Reste ainsi à savoir : comment chacun peut-il exister vraiment, pourquoi l’existence qui nous semble donnée n’est en fait jamais donnée, mais se conquiert pour devenir enfin réelle.

https://www.franceculture.fr/emissions/deux-minutes-papillon/les-existences-moindres-par-david-lapoujade
* Les différents modes d'existence. Etienne Souriau PUF 1943.
Comment exister autrement ? Article de fond  https://lundi.am/Entretien-avec-Josep-Rafanell-i-Orra

"Le problème de la Tour Eiffel
Une expérience de pensée
1. La Tour Eiffel existe-t-elle ?


Scenario1 :
M. Wang est un homme d’affaire chinois qui adore la tour Eiffel. Il s’est mis dans la tête de l’acheter et de la faire installer dans sa grande propriété de Pékin. Comme il est extrêmement riche, il fait à M. Delanoë une offre que ce dernier ne peut pas refuser. Ainsi les travaux de déplacement commencent : comme il est trop difficile de déplacer la Tour Eiffel toute entière, les déménageurs choisissent de la démonter, élément par élément, de transporter ensuite les éléments séparés, puis de la reconstruire en Chine.
M. Wang, débordé par ses affaires au moment du déménagement, n’est mis au courant du démontage/remontage qu’une fois que tout est fini. Il s’emporte contre ses déménageurs et les attaque en justice : d’après M. Wang, la Tour Eiffel a été détruite ; elle n’existe plus ; ce qui a été reconstruit, ce n’est pas la Tour Eiffel elle-même, mais seulement quelque chose qui lui ressemble parfaitement et contient les mêmes éléments.
2. M. Wang a-t-il raison ? La Tour Eiffel existe-t-elle encore après le remontage ?
3. Si vous pensez que la Tour Eiffel existe encore, pourquoi le pensez-vous ? Quels sont les critères qui vous semblent suffisants pour dire « mais non, c’est la Tour Eiffel qui se trouve dans la propriété de M. Wang » ?
4. Si vous pensez que la Tour Eiffel existe encore après remontage, existait-elle aussi pendant le trajet, entre le démontage et le remontage ? Pourquoi ?
5. Les critères donnés en 3 sont-ils en accord avec votre réponse à la question 4 ?
Scénario2 :
M Wang est un homme d’affaire chinois qui adore la Tour Eiffel. etc. Mais il sait que Paris a besoin de la Tour Eiffel comme émetteur radio et pour le symbole. Il lui vient l’idée suivante : proposer à M. Delanoë de lui envoyer les éléments de la Tour Eiffel un par un, tout en remplaçant ces éléments par des éléments neufs au fur et à mesure qu’on enlèvera les éléments d’origine. M. Delanoë accepte cette offre, et cinq ans plus tard, la totalité des pièces d’origine a été remplacée par des pièces neuves ; les pièces d’origines ont par ailleurs été envoyées au fur et à mesure en Chine, où M. Wang les a fait réassembler à l’identique.
6. La Tour Eiffel existe-t-elle encore à l’issue de toutes ces opérations ?
7. Si oui, où se trouve-t-elle ? En Chine ou à Paris ? … les deux ?
8. Si elle se trouve en Chine, y a-t-il eu un moment (pendant les opérations) où elle n’existait plus avant de ré-exister ou n’a-t-elle jamais cessé d’exister ?
9. Si elle se trouve à Paris, cette réponse est-elle cohérente avec votre réponse à la question 3 ?
Scénario3 :
M. Delanoë est inquiet de l’état de la Tour Eiffel. Des ingénieurs lui ont affirmé que les éléments d’origine risquaient d’être fragiles d’ici 100 ans, et qu’il faudrait donc les changer. Il lance donc le programme suivant : observer l’état des éléments tous les mois, et remplacer les éléments défaillants par des éléments neufs indiscernables (à l’œil nu) des éléments d’origine. Ce programme est mené à bien, et au bout de 60 ans, absolument tous les éléments d’origine ont été progressivement changés par des éléments neufs. Les éléments d’origine ont été par ailleurs jetés au fur et à mesure, mais à l’insu de M. Delanoë, un certain M. Wang les a recherchés et collectés au milieu des déchets, et il a ainsi réussi à tous les retrouver. Il les a ensuite transportés chez lui en Chine et réassemblés selon les plans d’origine de la Tour Eiffel.
10. La Tour Eiffel existe-t-elle encore à l’issue de toutes ces opérations ?
11. Si oui, où se trouve-t-elle ? En Chine ou à Paris ? … les deux ? Cette réponse est-elle cohérente avec votre réponse à la question 7 ?
12. Si elle se trouve en Chine, y a-t-il eu un moment (pendant les opérations) où elle n’existait plus avant de ré-exister ou n’a-t-elle jamais cessé d’exister ?
Scénario4 :
M. Delanoë est inquiet de l’état de la Tour Eiffel. Des ingénieurs lui ont affirmé que les éléments d’origine risquaient d’être fragiles d’ici 100 ans, et qu’il faudrait donc les changer. Il lance donc le programme suivant : observer l’état des éléments tous les mois, et remplacer les éléments défaillants par des éléments neufs indiscernables (à l’œil nu) des éléments d’origine. Ce programme est mené à bien, et au bout de 60 ans, absolument tous les éléments d’origine ont été progressivement changés par des éléments neufs. Les éléments d’origine ont été par ailleurs dispersés au fur et à mesure, l’un réemployé dans une construction à Châteauroux, tel autre fondu et récupéré pour faire un lampadaire à Nantes, etc.
13. Dans le scénario 4, la Tour Eiffel existe-t-elle encore à la fin du processus ?
14. Si oui, où se trouve-t-elle ? A Paris, ou quelque part entre Nantes et Châteauroux ?
15. Si elle se trouve à Paris, cette réponse est-elle cohérente avec votre réponse aux questions 7 et 11 ?
16. Si elle n’existe plus, quand a-t-elle cessé d’exister ?
17. Êtes-vous d’accord que si la Tour Eiffel n’existe plus à la fin de ce scénario 4, alors soit elle a cessé d’exister à un moment donné soit elle n’a jamais existé du tout ?
Conclusion : si vous avez répondu ‘oui’ à la question 1, êtes-vous toujours aussi sûr de votre réponse ?"
 

vendredi 15 septembre 2017

Obeir

Philosopher c'est désobéir. Est-ce pour cela que la désobéissance n'est pas la chose au monde la plus partagée ?
Quatre lectures pour mieux comprendre ce nous pousse à filer droit, au travail et en société.

La formation de l’obéissance des ouvriers dans le travail a été étudiée dans le courant des années 70' par Michael Burawoy, un sociologue qui s'est demandé "pourquoi les ouvriers travaillent ils aussi dur ? et qu'est-ce qui les fait consentir à leur propre exploitation ?"
Au cours d'une année d'immersion sur la chaîne d'une usine de moteurs, Burawoy a analysé le processus de production comme un jeu dont les travailleurs élaborent en partie les règles. Il montre que cet ensemble de pratiques informelles (tous les ajustements de terrain), loin d'atténuer l'exploitation, la renforce. D'abord le jeu obscurcit les relations de production sur lesquelles il se fonde; ensuite, jouer le jeu génère un consentement à ses règles et aux rapports sociaux qui les définissent.(p109) . Le Jeu n'est pas le produit d'une harmonie préalable, c'est au contraire le consentement qui repose sur la participation au jeu. Si on joue le jeu, c'est parce qu’il apporte des satisfactions toutes 'relatives', qu'Herbert Marcuse appelle 'des satisfactions répressives' . Ce sont des satisfactions liées à des besoins déterminés par des forces extérieures sur lesquelles l'individu n'a pas de contrôle. Ainsi, dans l'atelier, l'atteinte des objectifs de production aide à réduire la fatigue et l'ennui au travail, permet d'obtenir des satisfactions sociales et psychologiques et surtout permet d'éviter le stigmate social et la frustration.
D'après Produire le consentement. Michael Burawoy.

Les travaux concernant l’obéissance des cadres sont plus récents. Je citerai ici Sébastien Stenger. Pour lui, le contrôle des cadres s'appuie sur la notion d' identité sociale, car l'enjeu de leur travail est aussi bien personnel (leur carrière, la conservation de leur statut) que professionnel (le travail fourni à l'entreprise) Les satisfactions issues du travail (sentiments d’autonomie, de réalisation de soi, d’acquisition de nouvelles compétences) procurent aux cadres l’impression de travailler pour eux alors que l’entreprise qui les emploie leur extorque des soumissions qu'ils ne perçoivent pas comme telles. Dans un tel contexte il serait inefficace de contrôler directement le comportement (à travers des systèmes de sanction par exemple). Le management cible alors indirectement  les comportements, à travers les normes et les valeurs et exerce via le discours et les pratiques managériales, ce que Etzioni, ou Kunda, appelle un contrôle normatif  afin de «susciter et orienter les efforts requis des employés en contrôlant leur expérience sous-jacente, les pensées et les sentiments qui guident leurs actions» (Kunda, 1992).
Cet intérêt pour ces formes de contrôle idéologique s’inscrit dans le courant critique inspiré des théories de Michel Foucault. Selon lui, le pouvoir, c’est-à-dire la faculté de modifier le comportement d’un individu, ne s’exerce plus de manière verticale. D’un pouvoir disciplinaire on serait passé à un pouvoir de surveillance sans sujet, où le contrôle est diffus et relayé par les pairs via l’intériorisation de normes. Le contrôle s’exerce sur l’individu à travers des normes qui façonnent la subjectivité à travers des techniques de gouvernementalité de soi.
D'après Domination et résistance dans un cabinet d’audit. Sébastien Stenger

A lire également l'article 'Les cadres des dominants très dominés' issu du livre de Gaétan Floco.  

Dans le travail le contrôle consiste donc à "développer un individualisme porteur d'un certain sens de la liberté, de l'indépendance, tout en aiguisant la concurrence entre les uns et les autres"


D'une manière plus générale, Herbert Marcuse, dans son essai "L'homme unidimensionnel",  s’intéresse en 1964 aux formes de contrôle des sociétés industrielles: 
" Le confort, l'efficacité, la raison, le manque de liberté dans un cadre démocratique, voilà ce qui caractérise la civilisation industrielle avancée .".../... "Une telle société peut exiger l'acceptation de ses principes et de ses institutions; il faut débattre des alternatives politiques et les rechercher à l'intérieur du statu-quo et c'est à cela que se réduit l'opposition.".../..."Aujourd'hui l'individu est entièrement pris par la production et la distribution de masse et la psychologie industrielle a depuis longtemps débordé l'usine.../..Par conséquent, il n'y a pas une adaptation mais une 'mimésis', une identification immédiate de l'individu avec sa société et à travers elle, avec sa société en tant qu'ensemble. .../... L'efficacité du système empêche les individus de reconnaître qu'il ne contient que des éléments qui transmettent le pouvoir répressif de l'ensemble."
"Que la réalité ait absorbé l'idéologie ne signifie pas cependant qu'il n'y a plus d'idéologie. Dans un sens, au contraire, la culture industrielle avancée est plus idéologique que celle qui l'a précédée parce que l'idéologie se situe aujourd'hui au niveau du processus de production lui même. L'appareil productif, les biens et les services qu'il produit, "vendent" ou imposent le système social entant qu'ensemble."

Enfin, le verrouillage se confirme au niveau des institutions politiques : "On voudrait faire croire qu’en démocratie, la désobéissance ne peut être le fait que d’anarchistes irresponsables ou de «traîtres» à l’expression de la volonté populaire. «Mais enfin pourquoi désobéir ? nous explique-t-on. Tout a été décidé et voté dans les règles. Les procédures ont été respectées.» Ce modèle d’obéissance «républicaine» fonde notre modernité politique. Il repose sur le mythe du consentement initial, celui du contrat social raconté par Hobbes ou Rousseau : ce moment fondateur où les hommes auraient accepté d’obéir à l’Etat en échange de leur sécurité. Il est d’autant plus actuel aujourd’hui, face au risque réel du terrorisme et à la mise en place d’un état d’urgence." 
Frédéric Gros "Désobeir". 2017 (pas lu..)


Sources :
https://traces.revues.org/365
L'homme unidimensionnel. Herbert Marcuse. Editions de minuit.
Produire le consentement. Michael Burawoy. La ville brûle 
Des dominants très dominés. Gaétan Flocco, éditions Raisons d'agir

Articles connexes à lire aussi dans ce blog :
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/07/un-autre-monde-est-possible.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/05/lhomme-letui.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/04/la-societe-de-controle.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/02/le-spectacle.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/02/le-temps-de-la-societe-du-spectacle.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2016/06/democratie-tabou.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2015/12/la-comedie-humaine-au-travail.html
http://emagicworkshop.blogspot.fr/2015/11/evaluations.html
https://emagicworkshop.blogspot.fr/2015/05/au-travail.html

A lire aussi:
https://www.hacking-social.com/2019/12/03/comment-desobeir-quelques-listes/