jeudi 21 novembre 2013

Lou Reed, mort du foie.

Lou Reed. Automne 2013.
Lou Reed, chanteur underground, poète maudit et photographe ignoré est mort à 71 ans des suites d'une hépatite virale. Intraveineuses, hépatite C, alcool, transplantation hépatique… un calvaire classique et tragique mais un parcours exceptionnel où Lou reed fut successivement Rockeur, acteur (Brooklyn Boogie), écrivain , poète (Traverser le feu), et photographe (Rimes Rhymes).  
Lou Reed nait en 1942, à Brooklyn d'une famille juive, middle class. Au cours de l'été 1958, ses parents lui font subir 24 séances d'électrochocs pour le guérir de ses pulsions homosexuelles. Insomnies, dépression. Etudiant, Lou Reed aime Ornette Coleman, William Burroughs, Bo Diddley et  Kierkegaard. En 1962, à l'université de Syracuse, il fait une rencontre décisive, celle de son professeur Delmore Schwartz, poète beat, essayiste, défoncé et alcoolique.

L'année suivante, à Harlem, il se shoote à l'héroïne et probablement attrape son hépatite en partageant des seringues contaminées. Il passe une licence de lettres, compose "Heroin", gratte dans les bars du Village, découvre la Dream House, les expériences radicales de La Monte Young, pionnier de la musique minimaliste, grâce à John Cale. C'est avec lui qu'il fonde le Velvet Underground ( titre d'un livre de Michael Leigh sur les pratiques sexuelles transgressives). 

Le Velvet Underground ne trouvera pas le succès, mais restera comme un des groupes les plus inventifs de toute l'histoire du rock, à la portée aussi grande que celle de Bob Dylan. Avant de quitter ce groupe le 23 août 1970, Lou Reed aura traversé une des périodes les plus marquantes de sa vie, dominée par sa collaboration avec Andy Warhol

En 1972 David Bowie produit l'album Transformer (1972), véritable manifeste gay du rock, dont est tiré « A Walk On The Wild Side ». Ce titre devenu légendaire, avec ses choristes et son solo de saxophone, reste le seul véritable grand succès de sa carrière. Cet excellent album contient les classiques : « Perfect Day » , « Vicious » et « Satellite Of Love ». 



En 1973 Lou Reed  âgé de 37 ans triomphe. Il connaît pourtant une grave crise personnelle : furieux de s'entendre accuser d'avoir copié David Bowie, il se fâche avec celui-ci. Après avoir brusquement quitté sa femme, qui tente de se suicider, il se retrouve seul. Un des sommets artistiques de la carrière de Lou Reed naîtra d'une des périodes les plus noires de sa vie. Avec le producteur Bob Erzin, alors âgé de 24 ans ; il conçoit un projet ambitieux : Berlin. un album, qui serait un film pour les oreilles. Ce disque romantique narre l'histoire de la déchéance extrême d'un couple drogué, dépressif et suicidaire à Berlin-Ouest. A la fois sinistre et sublime, terrifiant et grandiose, Berlin (1973) est une remarquable réussite artistique. Il est pourtant fustigé par une grande partie de la critique et boudé par le public, habitués à des thèmes plus faciles. Lou Reed en est profondément blessé : se sentant abandonné de tous, il se drogue plus que jamais, substituant à l'héroïne la méthédrine  et l'alcool.


Depuis, Lou Reed réapparaît  comme un nouveau personnage, auquel il restera associé de manière indélébile : celui d'un mort-vivant décadent, d'apparence squelettique, sarcastique à l'extrême. En 1978, Alcoolique, il s'isole dans sa maison, et ce ne sera qu'avec les réunions quotidiennes d'une association d'anciens toxicomanes anonymes qu'il parviendra en 1981 à se sortir des drogues et de l'alcool.En 1992 il écrit : "J'ai essayé de me débarrasser de la drogue en buvant, mais ça n'a pas marché."

Le temps passant, Lou Reed  était devenu un paradoxe vivant. C’était aussi un dossier hors du commun, le reflet des errances et des performances de la médecine moderne. Méchamment électrochoqué dans l’enfance sur prescription psychiatrique, il avait aussi longtemps pris toutes sortes de médicaments. Il  expliquait qu'il en prenait parce que, au XXe siècle et dans les villes, on ne pouvait pas ne pas en prendre si on voulait se tenir debout; debout comme l’homme l’est depuis les cavernes. Le temps passant la plupart de ses amis proches étaient morts du sida, ou du cancer. Inspiré par le décès de plusieurs amis, il a cherché à transmettre dans Magic And Loss (1991), un message de réconfort à tous ceux qui sont touchés par la maladie et la disparition d'un proche. Il est alors fait officier de l'ordre des Arts et Lettres par le ministre de la Culture Jack Lang.

Drogué, alcoolique puis métamorphosé par l’amour, le régime et le TaI Chi Lou Reed fit et fera durablement rêver. Lou Reed ne cachait pas sa bataille contre son hépatite C. Transplanté du foie en avril 2013, il avait repris espoir comme beaucoup de malades, mais malheureusement, les complications de la greffe lui furent fatales.


Lou reed est mort du foie. Les maladies du foie sont des maladies de pauvres ou de marginaux, comme les maladies du coeur sont des maladies de riches.
Aujourd'hui, Lou Reed est plus que jamais underground.

Ozias

Jardin italien. Rimes & Rhymes. Lou Reed.

vendredi 15 novembre 2013

Érotique brut art.

Art brut, des représentations amoureuses affranchies des conventions culturelles.

Ann Van der Linden
Celine Malépart. Le chat du milieu.
Friedrich Schroder Sonnenstern.
Dominique Cauvé. Effusion amoureuse 3247.

Hubert Duprilot
Eric Demelis. La branleuse et ses deux filles.


Jean Kiboi. Animo Chô.

Jean Rustin.
Marinela Pelosi.
Ody Sabran
Royal Robertson.
Stephff tribal. Orgasm 7.
Antoine Rigal.
Kler. Retour sur l'origine.

dimanche 10 novembre 2013

Bon goût - Mauvais goût.

CATEGORIE MAUVAIS GOUT.





http://www.tdg.ch/vivre/societe/calendrier-sexy-cercueils-polonais/story/19367583


La femme de fer.  Klub des loosershttps://www.youtube.com/watch?v=xlmHggsWyIU


Chantal. Apoplexiehttps://www.youtube.com/watch?v=zV3UlejU7fI

CATEGORIE BON GOUT.

Le noces de Figaro. Mozart. J.H Gardiner https://www.youtube.com/watch?v=fxm0lkoSMU4

Girl from Ipanema. Stan Getz and João Gilberto. https://youtu.be/c5QfXjsoNe4
Hiroshi Sugimoto. Méditerranée.
Merci de vos votes et vos commentaires. Ozias.


vendredi 8 novembre 2013

Art brut, artiste singulier.

Illuminations. Christine Soler.
La distance qu'introduit la représentation et la mise en scène de nos maux est un moyen de s'en libérer de reprendre le contrôle. Donner une forme à son malaise, à ses souffrances permet de les objectiver et de leur donner du sens. C'est le principe de l'art-thérapie.

Pourtant l'art peut engendrer des souffrances quand il déclenche des pulsions incontrôlables ou quand la réalisation de l'oeuvre réclame trop d'efforts ou d’énergie à son auteur.  
L'oeuvre peut devenir injonction, tyrannie lorsqu'elle compte plus que l'auteur, et que son entourage. L'artiste se trouve exécuteur de la vision ou de la mission qu'il porte ou plutôt qui le porte. La complexité de la réalisation  engendre une souffrance  faite de frustrations, d'efforts et de regrets. D'autre part la quête du contenu et du sens de l'oeuvre peut renvoyer l'artiste à de profondes questions sur son identité son rôle ses choix. Aux souffrances et aux peurs de 'ne pas y arriver', de se tromper de style, de forme ou de sujet, s'ajoute la peur d'apprendre ce que l'oeuvre veut dire et  la découverte de territoires inconnus du Moi. 

 
L'art brut est en prise directe avec le Moi l' intime et l'inconscient car l'artiste s'engage totalement et sans alibi ni refuge d'une école, d'une esthétique. L'artiste 'brut'  s'expose si crûment qu'il frôle forcément l'exhibitionnisme, l'obscénité, presque l'attentat à la pudeur. Comme le sexe l'expression du soi et de nos perceptions intimes dépasse les bornes de la pudeur et du savoir vivre. En s'affranchissant de l'esthétique et en privilégiant l'expression brute et sans censure, l 'art brut vulgarise l'expérience de l'extimité. Si je vois le monde un peu comme beaucoup ne le disent pas, alors quand j'exprime et je communique cette singularité, je deviens moi même singulier. Cette communication singulière, inouïe,  m'isole également et le monde qui m'entoure perd de son aspect familier, habituel, il n'est plus 'comme avant'. Cette expression de l'intime, de l'incommunicable tisse des liens subtils entre catharsis, création artistique,  et alchimie du monde.
Michel Nadjar.
Par nature secret, et parce qu’il n'est pas dit, l'intime n'est jamais consensuel , public ou partagé. L'expression de l'intime est transgressive. Elle réclame une forme d'initiation et porte avec elle une part de mystère. Elle joue avec les symboles et flirte avec l'ésotérisme. Comme l'autopsie des corps la révélation de l'intime au travers de l'art brut sent le souffre. Comme l'accouchement qui délivre à la vie des bébés où se lit la violence du passage et la marque d'un destin,la maïeutique de notre inconscient de nos douleurs et nos malaises peut faire peur. Peur de nos rêves , de nos ivresses ou de nos trips. Peur de se retrouver là où l'on ne se sait plus et peur d'avoir à assumer un destin incompris et révélé.
L'art brut en tant qu'expression portée par la nécessité d'elle même n'est pas innocent, esthétique ou anodin. Il joue avec l'alchimie des rapports subtils qu'il trace et des révélations qu'il offre. L'artiste singulier devient voyant, médium , presque sorcier. Ainsi Michel Nedjar fait de la poupée d'envoûtement son médium favori, les peintures de Joe Coleman sont à la fois plaisantes et inquiétantes. Un lieu comme la Demeure du chaos fait vaciller la rationalité et offre une lecture du monde brute, symbolique et alchimique. Ce côté déstabilisant  rebute ceux qui n'osent affronter ce trouble. 
'Création sans entrave, L'art brut préfère le visionnaire au visible, la vision intérieure aux apparences du monde réel.'
Heureuses découvertes,

Ozias
Joe Coleman. My birth.

Demeure du chaos.
“Nul n’a jamais peint, sculpté, modelé, inventé que pour sortir de l’enfer de la folie”

vendredi 1 novembre 2013

Camera obscura.

J'ai déjà consacré plusieurs posts à l'esthétique et de la sensibilité particulière à l' interféron, cet assombrissement général et cette mélancolie, que provoquent ces injections hebdomadaires. Journées sombres et nuits blanches sont alors de rigueur, et de saison comme en ces temps ci.
Pour illustrer le tableau, et pour le plaisir, voici quelques images belles et remarquables à l'image de la tristesse et de la mélancolie où porte l'interféron.

Erwin Olaf présente à la galerie Rabouan-Moussion une série de photos prises à Berlin. Pour cette série d'images Erwin Olaf a photographié de jeunes enfants affublés de vêtements anachroniques chargés de significations historiques ou ambiguës. Les décors sombres et l'architecture berlinoise 1920 créent des ambiances sombres propices aux tensions que dégagent ses personnages savamment mis en scène.  Ces images sont une réflexion sur le lieu du pouvoir et de l'histoire qui s'inscrit tant dans les décors et les masques que dans les personnages qui les portent bien que tout les oppose.  A noter enfin la présence récurrente d'escaliers  qu'Erwin Olaf ,avoue avoir  souffert  à  gravir lors des séances de repérage . Pensées ici aux hépatants anémiés de la ribavirine. 
"You need to try to master the ability to feel sad without actually being sad."










Référence Berlinoise et ressemblance chromatique: Otto Dix peintre expressionniste de l'Allemagne des années 20.
Otto Dix. Salon.
Pour finir sur un trait d'humour (noir) tout en restant dans le même registre (sombre),  trois photographies du Suédois Peter Lundström extraites de la série  « Circus Depression ». 
Ces images séduisent par leur aspect tragico-clinquant, renvoyant des clowns aux allures de Ronald McDonald dans les méandres des consciences agitées des humains dissimulés sous le costume. Ici, successivement  'Ballons',  'Les bananes' (la sortie), 'Ils n'arrêteront jamais'.





Joyeuse Toussaint !
Ozias

vendredi 25 octobre 2013

Prométhée déchaîné.

Parce qu'il a beaucoup souffert du foie, Prométhée est le saint patron des hépatants.
Titan de son état, Prométhée est connu pour avoir crée les hommes à partir d’argile et d’eau et pour avoir volé le « savoir divin », le feu sacré, pour l’offrir aux humains. Hyper contrarié, Zeus le condamna à finir enchaîné et torturé éternellement. Héphaïstos, l’homme de main du Roi des dieux, l’enchaîna nu à un rocher dans les montagnes du Caucase, où un aigle vient lui dévorer le foie chaque jour. Sa souffrance était ainsi infinie, car chaque nuit son foie repoussait. ( Ce qui, selon Wikipédia, laisse supposer que les Grecs avaient découvert que le foie est l’un des rares organes humains à pouvoir se régénérer. héhé).
Quelques images donc de notre sympathique héros.




Dans cette galerie, on trouve successivement Theodoor Rombouts; Jacob Joardaens; Jean-Louis César Lair; Ecole italienne XVIIème; Gustave Moreau; Celine Excoffon; Ettore Aldo Del Vigo.


Un collectif a eu la très bonne idée de reprendre le mythe cruel de Prométhée et d’en faire un jeux version 8 bits. Un vrai régal ! Ne soyez pas effrayés, Zeus ne s’est pas manifesté depuis longtemps, et en plus maintenant on peut jouer pour oublier.
http://www.pippinbarr.com/games/letsplayancientgreekpunishment/LetsPlayAncientGreekPunishment.html

Prométhée, trouve également sa place au théâtre. Il y a bien sûr la pièce éponyme d'Eschyle, mais beaucoup plus drôle, en 1982, Jacques Livchine, dans le cadre de son théâtre pour chiens, propose une spectacle de rue où Prométhée enchaîne par des chapelets de saucisses est délivré par une meute de chiens. Récit d'un témoin:


J’ai vu le cul de Livchine. Il y a trois acteurs et une actrice. Ils vont jouer PROMÉTHÉE ENCHAINÉ dans la rue pour un public jusque-là délaissé, les chiens ! Livchine sait bien par quelle partie du corps passent les jeux favoris des spectateurs qu’il a choisis pour L’UNITÉ ET Cie. Il a donc dénudé son derrière. Mais il n’a pas osé l’enduire de friandises telles que rillettes, pâtés ou sucre de betteraves liquide. « Si les chiens viennent me lécher le cul », dit-il, « j’ai peur que ça me choque !!! » Le public chien a évidemment la vedette et chaque représentation aura sa physionomie, faite par les spectateurs. Gloutons, ou au contraire chipoteurs ; curieux, attentifs, remuants les queues ou au contraire méprisants, indifférents, tournant les dos ; agressifs ou peureux ; tranquilles ou timides, ils étaient fascinants à celle de ce midi sur la Place du Vieux Marché à Sarrebrück, et très actifs, hurlant lorsque les artistes jouent « de la musique pour chiens » et dévorant consciencieusement saucisses et salami ! Quant à la parodie de PROMÉTHÉE, très improvisée, elle s’inscrivait dans le souci de donner (enfin !) aux chiens une CULTURE, celle qui leur avait toujours été refusée. La troupe retournait donc aux sources de la culture des hommes, à la tragédie grecque.../...
http://histoire-du-theatre.over-blog.org/article-15704794.html

Prométhée a également inspoiré des musiciens tels que Alkan (peu connu) , mais aussi Scriabine. 
Oyez! Oyez !
http://www.youtube.com/watch?v=aqGn86ZPdIA
http://www.youtube.com/watch?v=oNVA6Oh6hcc
Crédits :
http://albumsceline.blogspot.fr/2012/03/promethee.html
http://emagicworkshop.blogspot.fr/2011/12/c-et-grand-c.html

Les catholiques fervents adresseront leurs Prière pour le Foie à Saint Roch (ancien pestiféré et ministre des maladies transmissibles 'chez qui la foi est comme un roc'). Mais chut, n'en dites rien à Prométhée.

Ô Dieu qui avez accordé à Saint Roch, votre serviteur fidèle, la grâce de guérir par le signe de la croix, tous ceuxqui étaient atteints de maladies (incurables) (du foie) (de la jaunisse), nous Vous prions, par ses mérites et par sonintercession, de nous préserver dans Votre miséricorde, de ces dangereuses maladies ainsi que d'une mort subiteet imprévue. Par jésus Christ Notre Seigneur. Ainsi soit-il. O Dieu que les pêchés offensent et que la pénitence apaise, exaucez les humbles prières de votre peuple prosterné devant vous et détournez les fléaux de votre colère que nous nous sommes attirés par nos crimes. Ainsi soit-il. (Sic !)

vendredi 18 octobre 2013

Le dandysme de la chute.

Kurt Cobain. Peu avant sa mort.
Le suicide est le dernier sacrement du dandysme disait Baudelaire, qui en connaissait un rayon.

'Les grands dandys finissent mal en général, meurent plutôt jeunes, désargentés. Un des grands aphorismes de Wilde dit qu’il faut « soit porter une oeuvre d’art, soit être soi-même une oeuvre d’art ». Or, tout le tragique du dandy, qui désire élever sa personne au rang d’oeuvre d’art, vient de ce que même s’il a été béni des dieux et possède la beauté, il ne peut indéfiniment échapper à la décrépitude. D’où la tentation chez beaucoup de mettre fin à leurs jours. « Le suicide est le dernier sacrement du dandysme » disait Baudelaire, repris par Michel Butor… Il y a une phrase cruciale de Baudelaire pour comprendre la portée philosophique du dandysme, tirée de son journal intime, « Mon coeur mis à nu » : « Il y a en tout homme deux postulations simultanées, la vocation à dieu, une spiritualité, qui est une joie de montée, et la vocation à Satan, qui est une joie de descente ». Cette double postulation simultanée, permet d’appréhender à quel point 
 le dandy pousse l’être jusque dans ses extrêmes limites. Il s’agit d’un jeu permanent entre pulsion de vie et pulsion de mort. C’est en cela que c’est un courant artistique et philosophique, ce qui n’est pas compris pas en général.
Cette tendance à l’autodestruction se retrouve chez certaines Rock stars, comme Amy Winehouse par exemple, morte récemment de ses excès…
Oscar Wilde, Brummell, Lord Byron, John Keats, la plupart des grands dandys historiques sont morts relativement jeunes et l’on retrouve en effet ce phénomène chez certaines Rock stars comme Jim Morrison, Kurt Cobain, Amy Winehouse donc (que j’ai définie comme une « femme dandy aux couleurs du crépuscule ») ou encore Jimmy Hendrix. Malgré un certain dévoiement, ils perpétuent l’esprit dandy, même de manière caricaturale. Il y a un album de 1972 de Bowie que j’aime beaucoup, sous-titré « the rise and fall of Ziggy Stardust and the spiders from Mars ». On y assiste à la montée vers la gloire, puis à la chute. Beaucoup de grandes rock stars ont à peu près le même trajet, et en ce sens incarnent, toute proportion gardée, une nouvelle expression de ce qu’était les poètes maudits au XIXe siècle, Baudelaire, Rimbaud, Gérard de Nerval. Il y a une ambiguïté fondamentale. Regardez encore John Galliano, patron de la haute-couture chez la plus grande marque qui soit en France… Et au moment où il est au sommet, il dit une énorme bêtise (pour autant que ce soit vrai)… Il y a peut-être une volonté de provocation inconsciente, mais ce mécanisme autodestructeur est en tout cas récurrent chez les dandys. Prenez Wilde, au sommet de sa gloire, « L’importance d’être constant » sa quatrième comédie fait le tour de Londres, il est adulé, et il se fait prendre en flagrant délit d’homosexualité, punissable alors de deux ans de travaux forcés. Il se croyait tellement fort, original et puissant, il pensait tout pouvoir se permettre, mais la société l’a rattrapé et lui a fait payer. Parmi les Rock stars Michaël Jackson, a pratiqué cette même autodestruction, avec chez lui en plus un travail sur sa propre personne physique,la multiplication des personnalités, du crooner au Bad boy… Il était devenu lui-même son propre masque, une oeuvre d’art, peut-être kitsch, de mauvais goût, mais en cela a rejoint l’aphorisme de Wilde..../...

Ainsi des dandys se moquent éperdument de leur silhouette et la sabotent même volontairement, dans leur avatars contemporains pratiquant la provocation, le trash ou le kitsch, comme chez certains punks, Sid Vicious par exemple, qui est un suicidé de la société au même titre que Van Gogh l’était aux yeux d’Antonin Artaud, ou que l’ont été Kurt Cobain et Ian Curtis de Joy Divison..../...
Sid Vicious. Toxique.

Dans le clair-obscur, la lumière est la condition de l’obscurité. Tout est synthétisé dans la personne et l’oeuvre du dandy, c’est la totalité de l’être. Il n’y a plus de distinction entre l’être et le paraître, de séparation franche entre l’ombre et la lumière, le masculin et le féminin, l’âme et le corps. Il s’agit d’une tentative d’échapper au dualisme platonicien repris par le christianisme, cela est fondamental. D’où la figure de l’androgyne, qui se situe par-delà le masculin et le féminin, par-delà la sexualité, mais aussi au-delà du bien et du mal. "
(Daniel Salvatore Schiffer)


"Pas besoin d'une pulsion de mort ou de destruction, ni même d'effet pervers. C'est très logiquement et inexorablement, que la montée en puissance de la puissance exacerbe la volonté de la détruire. Et elle est complice de sa propre destruction. L'allergie à tout ordre définitif, à toute puissance définitive est heureusement universelle.Il y a incontestablement l'esthétique de la chute, une forme de dandysme eschatologique qui accompagne l'homme depuis la nuit des temps. Les fins du monde font partie de notre histoire, mais sont aussi élément fondamental dans la psyché universelle pour nous libérer de l'ancien monde. "Thierry Hermann
Le mot de la fin revient donc à Steve Jobs, qui lui aussi savait de quoi il parlait lorsqu'il disait" La plus belle invention de la vie, c'est la mort".


Steve Jobs.
Charles Baudelaire. www.deviantart.com

"Qu'est ce que le dandysme ? Une ascèse dont le but inatteignable est de transformer sa vie toute entière en miracle. Qu'est ce que le dandysme ? La volonté de prouver qu'une existence élégante, digne et haute est possible et ainsi conjurer la chute. Qu'est ce que le dandysme ? La vie comme oeuvre d'art en un sens radical : non pas seulement une vie élégante, mais une vie qui interpelle, donne à penser et change notre point de vue sur le monde - comme est censé le faire une oeuvre d'art. Le dandy est esthétique, moral, philosophique, spirituel et politique. Il incarne - du moins tente d'incarner - la figure d'un homme nouveau, une sorte d'aristocratie montante qui aurait vocation à l'exemple et à l'abolition du médiocre. Mais rassurez vous, le destin du dandy est d'échouer". Yann Kerninon . Le pingouin cannibale p35.

'La mort de l'ambition, enfin, on y est. L'obligation de réussir - cette menace qui pèse sur vous dès la naissance, cette lame que la société vous place sous la gorge, qu'elle maintient fermement jusqu'à la suffocation et ne retire qu'à l'heure de la proscription, ce moment où elle vous met hors jeu, vous disqualifie, c'est l'heure du grand nettoyage, on élimine comme on dérode ! - ce qu'il y a de jouissif dans ce bannissement dont on ne sait jamais s'il est provisoire ou définitif, cet instant où l'on est admis dans la confrérie des ratés/des has-been, ceux que l'âge ou l'échec ont marginalisés, les sans-papiers et les sans-grades, les petits et les simples, les inconnus et les ternes, ceux qui pointent aux Assedic, se lèvent tôt, dont le nom ne vous dit rien, ceux que l'on ne prend pas au téléphone, que l'on ne rappellera jamais, auxquels on dit "non", "plus tard", pour lesquels on n'est jamais libre et jamais aimable, les gros, les faibles, les femmes jetables, les amis ridicules, les débarrassant - enfin- de la peur de décevoir, de la pression que le souci de plaire fait peser sur eux, ces impératifs que l'on s'impose à soi-même, par individualisme/goût des honneurs/ soif de reconnaissance/de pouvoir/mimétisme/instinct grégaire - tous ces effets dévastateurs et ces rêves avortés de l'autorité parentale/du déterminisme/des utopies hallucinatoires, cette injonction brutale qui régit l'ordre social et jusque aux rapports les plus intimes - Soyez PERFORMANTS ! Soyez FORTS !...'
Crédits : 
L'invention de nos vies, Karine Tuil, Grasset.

http://journaldesgrandesecoles.com/metaphysique-du-dandy-rencontre-avec-daniel-salvatore-schiffer/

Thierry Hermann : De l'Histoire des fins du monde ou le principe de la tabula rasa à la demeure du chaos.


Le dandy

"En 1840, les mauvaises langues dirent à la mort de George Brummel : « Dandy ans on n'en parlera plus ». Mais pourtant le dandysme perdure, il plane sur un nuage pendant que la mode dissipe les brumes, elle. C'est que le dandy se donne des airs dorés à Paris - un petit côté oisif de bien-être - hors des châteaux bruyants de Saint-Malo. Tellement raffiné qu’on le surnomme le sucre, le dandy multiplie les sorties mondaines et les rentiers d'argent, se dandine et dine dans les meilleurs maisons. Il travaille naturellement à ne rien faire - c’est le mondain à l’envers me direz-vous - grâce à son talent pour alterner droit à la paresse et droit à l'apparence. Entouré d'une clique à chapeau claque, il fait dans l'avis facile et la vie gracile. Représentant parnassien de l’art pour l’argent, il accumule les bijoux précieux en clinquant des doigts. Sa devise est « fiacre luxe ! » ce qui lui permet, en amateur de danse et de champagne, de se transporter de bals en bulles pour y séduire de belles habiles. Tel Lord Byron, il erre l'âme en peine et l'amour en berne. Vêtu d'une étouffante toilette, même si la ouate aère, le dandy ne néglige aucun détail vestimentaire : canne, redingote, gourmette, monocle, montre gousset. Élégant pour les mains alors ? Jaunes, évidemment. Maniant l’arrogance aristocratique, le dandy affiche envers le petit peuple un magnifique visage méprisant. Voilà pourquoi il a l'hautain frais !"

Pascal Hambourg

dimanche 13 octobre 2013

Le foie, beauté cachée.

La beauté est souvent intérieure. C'est vrai dans le cas du foie. Cet organe en effet ne révèle son image qu'à l'occasion d'hépatoscopies alimentaires ou de blessures  sévères. Pourtant le foie, comme vous et moi peut se faire tirer le portrait. Par les symboles et le sens qu'il porte, ou par sa couleur lustrée due à une généreuse irrigation sanguine, le foie inspire de nombreux artistes. Visite de quelques galeries.


Hélène Lagnieu. Anatomie1.
Hélène Lagnieu. Anatomie2.

Le foie soigné. Par Aareps.
Maggie Hotchkiss.  Peinture anatomiques Pop Art.
Foie. Jane Nurse.

Couverture quilt représentant un foie.
Autres oeuvres et représentations du foie : http://www.easloffice.eu/jhep/contest/website/cat_drawings_1.html
Tryptique foie. Eric Avery.

Carte postale du foie. Bob Walmire.
Jan Niedojadlo. Foie (statue habitacle).
Visite de l'intérieur du foie de Jan Niedojadlo
(ci-dessus)


A votre santé !
Ozias.
Mio-Belladonna. Deviant Art.