samedi 31 janvier 2015

consolations


Œil de mon chat, malade.
Quand on est malade, quand on n'est pas bien le moral pâtit, les repères basculent. La sincérité ne va plus de soi. La communication avec l'entourage devient  plus délicate.  
Certains proches veulent alors à tout prix aider et consoler la personne malade qui peut alors se sentir niée ou étouffée. Ne cherchez pas à tout prix à rassurer, consoler ou « secouer » un proche malade, même « pour son bien ».
Voici, ence qui me concerne, quelques petites phrases bien optimistes (ici en italique)  qui ne m'ont pas remonté le moral, mais qui me sont restées :

'Le traitement, tu verras, c'est rien du tout.'  Pourquoi ce  'tu verras' puisqu'il n'y connaissait rien, mais alors vraiment rien du tout.

'Le foie, c'est pas grave, de toute façon, ça repousse'. Peut être, mais pas forcément non plus si il est trop abîmé.
John Ranard. Selfie après transplantation hépatique.
"Une greffe du foie, ça n'est plus un problème. Le foie c'est facile à trouver, c'est pas comme les reins.  Le foie c'est un organe qui ne s’abîme pas donc on en trouve facilement car il y a beaucoup de donneurs de plus de 50 ans. Des greffes de foie, maintenant on en fait tous les jours."
C'est gentil de s'être documenté pour mon cas. Mais moyennement rassurant quand même, car comme le montre la photo de John Ranard, une transplantation, c'est plus qu'une simple boutonnière. Lou Reed et bien d'autres pourraient en témoigner.

D'autres tirent parfois des conclusions hâtives sans prendre le temps d'écouter 

'Tu as de la chance, l'hépatite C, c'est une maladie qui se soigne très bien !' . 
Pas faux, mais pour un Génotype1 avec bithérapie le taux de réussite est de 50%.

Il y a aussi le déni de ce que l'on dit :
moi : -"Je me sens vraiment fatigué
elle : -"Tu es fatigué, c'est normal tu n'as plus vingt ans."
moi : -"Oui, c'est vrai, je me trouve vieux aussi. "
elle : -Ah mais non !  tu n'est pas si vieux que ça !"

Ou encore avec 'la médecine' :
-"Docteur, j'ai mal au foie. ça me serre, et après un repas ça me lance, juste là."
-"Le foie ça fait pas mal. La vésicule non plus on la sent pas. C'est les intestins."
Bon, d'accord...mais quand même, comment les docteurs peuvent ils être sûrs qu'un foie abîmé ça ne se sent pas puisque le leur va bien ?

Il y a aussi ceux qui en rajoutent . Exemple, après une nuit sans dormir, un jour où j'étais vraiment mal, il me salue aussi chaleureusement qu'il peut et il en rajoute, en rajoute
"Holla-là ! quelle mine superbe tu as !" Oui. tu parles....

Ceux qui savent, ou alors qui ne veulent pas savoir :
"Ce qu'il te faut c'est oublier. Ne plus y penser. Surtout, tu oublies ça !". En tout cas je me rappelle avoir pensé que pour un deuil, il suffit d'avoir la même attitude, et hop ! fini. Sauf que bien sûr, ça ne marche pas comme ça.

Et enfin il y a aussi tous ceux qui ne demandent plus jamais "comment ça va", et ceux qui ne demandent plus rien.

Petite bibliographie
CANCER: LE MALADE EST UNE PERSONNE. Par Antoine Spire,Mano Siri
VIVRE ENSEMBLE LA MALADIE D’UN PROCHE. AIDER L’AUTRE ET S’AIDER SOI MEME Dr Christophe Fauré, Albin Michel, 2002

Rassurer trop vite le malade, voilà une attitude très souvent adoptée, soi-disant pour rassurer ce dernier. Mais cette façon de faire ne permet pas d’entendre l’angoisse du malade, d’essayer de comprendre ce qu’il veut nous dire et par là même on l’isole toujours plus. La confiance se réduit alors peu à peu à néant.

Moraliser trop vite
A force de secouer le malade, de le pousser à réagir, on prend le risque de l’écraser davantage. Il va se sentir de plus en plus coupable de ne pas être à la hauteur, incompris, frustré et découragé. Le fait de parler avec le malade de ses maux, de sa maladie est un moyen privilégié de mieux faire face à l’adversité et d’évacuer le trop plein de tension intérieure.

Conseiller trop vite, donner des solutions trop vite
Nos solutions ne sont pas forcément adaptées au malade. Ce qui est bon pour nous ne l’est pas forcément pour lui. Nos réponses hâtives, nos conseils bien ficelés traduisent notre peur de ne pas être à la hauteur, notre incapacité à percevoir le monde au travers des yeux du malade. On oublie de l’écouter et ce dernier se sent incompris et se trouve prisonnier.

Consoler trop vite
Le malade exige et compense une série de pertes, de renoncements et de deuils. Il faut beaucoup de temps pour ce processus d’acceptation de la réalité. L’écoute attentive facilite ce travail intérieur pour le malade même s’il est parfois difficile d’entendre un tel désarroi pendant des jours et des jours. Vouloir consoler trop vite revient à stopper cette démarche intérieure et laisse le malade une fois de plus seul face à ses deuils silencieux.

Argumenter, persuader trop vite
On utilise le recours à la raison afin d’évacuer l’émotionnel de la situation et l’on barre ainsi l’accès à l’affectif. Les médecins mettent en place cette stratégie pour maintenir à distance la peur et l’angoisse du patient, de même que certains proches. Les protagonistes se rassurent, mais laissent le malade seul avec lui-même.


Esquiver trop vite, banaliser
Afin d’éviter les sujets brûlants et inquiétants avec le malade, on lui parle d’aspects anodins, on ignore le sujet qui le préoccupe consciemment ou non. Ce dernier comprend qu’une partie de ce qu’il veut dire veut être délibérément ignorée par ses interlocuteurs.

Questionner trop vite
Assommer le malade de questions est un moyen efficace pour obliger celui-ci à rester à la surface de ses pensées et à supprimer le silence tant redouté. Ce silence nous renvoie à nos peurs, à nos interrogations. Il peut s’apprivoiser. Le regard et le toucher peuvent prendre le relais d’une communication dans la quiétude, dans un langage silencieux, plus éloquent que les discours.


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