vendredi 27 novembre 2015

Fait d'hiver


Dimanche après midi, le ciel était gris.  Je prends la voiture pour aller en ville et je décide de passer par les champs de maïs pour photographier un épouvantail à corbeaux  (corbac mort qui pourrit pendu à un piquet planté dans un champ pour dissuader ses congénères). Hélas et heureusement,  la dépouille n'était finalement  qu'un vulgaire  plastique noir sur un piquet (photo1).  Comme quoi, les traditions se perdent et ma vue baisse !
Au bout du champ,  une troupe de chasseurs du dimanche  traquait la galinette cendrée...

Il était près de 15h57 quand soudain, 200m  plus loin, là où le chemin agricole  longe l'autoroute, une poule faisane traverse la chaussée . Comme l'appareil photo était à portée de main,  et que l'oiseau ne courait pas vite, je m'arrête pour le photographier. La faisane grimpe alors le talus qui atteint l'autoroute. Je la suis. 
Et là, c'est le drame ! Une auto, et le bruit d'un choc suivi de plumes qui volent (photo2).  
Je n'ai plus qu'à me baisser pour récupérer ma proie tuée net,  toute chaude sur le bas côté de la route (photo3) et lui rendre les honneurs d'une belle faim (photo 4 et5).








mercredi 18 novembre 2015

Evaluations

Ecole, travail, Internet... Que nous soyons en position d'évalué ou d'évaluateur, impossible aujourd'hui d'échapper aux notes, évaluations, rankings et benchmarks.


L'idéologie de l'évaluation qui s'affiche sous la bannière de l'égalitarisme et de la méritocratie est en fait l'opposé du paradigme de l'émancipation. L'évaluation du travail est une pratique mortifère  qui modifie la nature du sujet et la définition de son travail pour établir une note. 
L'évaluation calibre, détruit la singularité, l'irremplaçabilité du travailleur. Aucune forme de capitalisation n'est alors possible pour le travailleur, dans la mesure où pour capitaliser il faut revendiquer une propriété intellectuelle, un droit d'auteur, un "nom". Faire disparaître l'individu derrière un chiffre permet simplement d'usurper son dû.

L'évaluation produit de la servitude volontaire , car elle s'assimile à un processus de formation du sujet. Aucune valeur n'est attribuée au sujet tant qu'il n'a pas été évalué. Créer l’évaluation, c'est placer la conscience sous surveillance, sous sous sa propre surveillance. Le sujet dépossédé de sa propre liberté de conscience suffit comme seul bourreau. L'évaluation se pose comme unique dispositif de visibilité de l'évalué. elle refuse au sujet la possibilité de poursuivre son individuation  ailleurs et autrement.  Placé sous le joug de l'évaluation le sujet reste à jamais sous tutelle.
C'est l'évaluation qui qui après avoir tué ce qu'il y d'agent dans le sujet le reconnaît en tant que tel, mais désormais devenu non plus un sujet libre mais un sujet domestiqué, sous domination. 
L'évaluation est une forfaiture de la vérité, mais aussi une légitimation réelle du pouvoir en place. Le pouvoir cherche à détruire la capacité d'individuation de chaque individu ou plutôt de faire croire à l'individu que son individuation nécessite un strict individualisme. Le pouvoir tient par l'intérêt qu'il alimente. Il substitue à la notion d'individuation celle de l’intérêt, en donnant l'illusion qu'elle lui est similaire. Mais cet intérêt n'a de sens qu'à l'intérieur d'un système qui reconnait la valeur de la domination. Jouir de cet intérêt suppose la mise sous tutelle. L' "avoir" met en demeure la liberté d'être du sujet. 

Quand l'évaluation n'arrive pas à évaluer elle met en accusation. 
Contester l'évaluation ne permet nullement d'accéder à un débat sur l'évaluation. Contester l'évaluation c'est risquer sa propre marginalisation ou stigmatisation. Le procédé est bien connu avec la surenchère sécuritaire liberticide : qui peut avoir peur des contrôles de police, des surveillances électroniques sur le web... si ce n'est le fautif ou celui qui se reproche quelque chose ? 
Ainsi le mythe de la neutralité de l'évaluation suit les rails du mythe de la neutralité de la technique. Chacun est tenu par le pouvoir anonyme de l'évaluation, pour plus d'illusion d'égalité.

Extraits du livre de Cynthia Fleury 'Les Irremplaçables' Chapitre 'le dogme du pouvoir' .
Mes notes de lecture dans  http://sansdire.blogspot.fr/2015/11/les-irremplacables.html?view=flipcard
Prisonner in Panopticon (early XIXth)                                                Worker in open space (early XXIst  )

"L’évaluation généralisée est une pratique néolibérale pathologique. Née dans la finance la pratique de l'évaluation est en voie de coloniser toutes les sphères de la vie sociale, organisant par là leur soumission à la logique d'une société de marché de part en part régie par le principe de concurrence. On évalue les chauffeurs de VTC, les appartements de location, les toilettes d'aéroport, et sans doute bientôt les dîners entre amis. "
Frédéric Lordon 22 février 2017

mardi 10 novembre 2015

Inégalités et économie du partage


"En 2014 si on mettait quatre-vingt cinq multimilliardaires dans un autobus, il contiendrait une fortune équivalente à celle de la moitié la plus pauvre de l'humanité, environ trois milliards de personnes. Un an plus tard, l'autobus a rétréci : il n'a plus que quatre vingt places" (Joseph Stiglitz).

En 2015, la moitié des richesses mondiales sont détenues par 1% de la population.

En 2016, 1% de la population mondiale possédera autant que les 99% restants.
Un nombre de fortunes de plus en plus réduit concentre les richesses. 

Le problème avec le système capitaliste, c’est qu’il y est toujours question de concentration mais jamais de redistribution. Son mouvement global tend donc à l’hyper-concentration des richesses, à l’accaparement des moyens sans prendre en compte la réduction des inégalités, ni le développement humain. Le système résulte notamment dans l'accaparement des terres, ou l'accélération de la progression des revenus les plus élevés


La nouvelle 'économie du partage' pose aussi beaucoup de questions. Même si 'j'adore le concept', je vois arriver les grands acteurs qui tirent les marrons du feu en prélevant leur dîme sur chaque échange enregistré tandis que nous mutualisons nos ressources dans le cadre d’un ‘libre marché’ où la règle est celle de la dérégulation et de la concurrence.  Collaboratif peut être, mais surtout libéral avancé.
Que ce soit pour le covoiturage, l'hébergement, la restauration, les prêts de matériel, la tarification touche de plus en plus l’hospitalité les échanges de service, la solidarité. 
On peut se demander dans quelle mesure la consommation collaborative crée réellement du lien ou si elle n'installe pas plutôt un rapport marchand à la solidarité et l'échange. L'uberisation de l'économie n'est rien d'autre qu'un libéralisme augmenté, une gigantesque marchandisation du monde.
A vous l'antenne...
Ozias
D'après Développement durable et territoires.'Collaborative Consumption, the ambiguous aspect of the functional economy'.