jeudi 13 avril 2017

je m'isole

Je sors ce soir (MD). 
D'abord je me demande un peu pourquoi, puis j'ai chaud dans les mains, et ensuite tout mon corps transpire. Puis autour de moi tout se dilate, les sons deviennent lointains et je fonds. Ne pas bouger dans la chute, attendre un peu. 
Alors tout se remet en place et je sens la musique dans les pieds et jusque au bout des doigts. Et je danse. Je danse et alors sort de moi un autre que je suis. La danse est une évidence. C'est bon de sentir que je ne suis pas vide. Plein phares, je cherche d'autres avec qui me connecter.  
Je danse jusqu'à avoir des crampes dans les pieds, jusqu'à n'avoir plus rien à dire. 
Au matin je rentre seul. Il me faut deux jours pour récupérer.

Le sur-lendemain :
-Salut, tu es allé au concert de JiPé samedi  soir ? 
-Non, j'étais à la nuit de la rave
-Ah oui, ma fille y est allée aussi. Le lendemain elle avait l'air fatiguée. Je me demande bien ce qu'elle peut faire là bas.
- ...[courbatures dans la mâchoire]

Dans ma chambre (DXM).
C'est le week-end. Je me couche au milieu de la nuit, tranquille, immobile et bien dissocié.  J'ai mis le casque sur les oreilles. Au programme des mix techno et surtout dark-house, dark-dubstep.
Les rêves arrivent. Tiens, cette fois je viens de mourir et ça me réveille. Dans la chambre je flotte, et je ne retrouve plus mon corps. Heureusement, "Dont be afraid, we are protected" dit la musique. Une autre fois je parle couramment une langue que je ne comprends pas. Et voilà que maintenant je ne sais même plus écrire la lettre E, comment écrire TigrE ?  
Une autre nuit je suis l'aiguille sur mon corps disque microsillon qui tourne comme une vie. Avec le matin ces délires prennent fin et il est l'heure de déjeuner.

(1p-LSD).
Gobé un peu moins d'un buvard. D'abord physiquement agréable, puis sensation de 'speed' au niveau du ventre, comme une tension. Mon 'cerveau d'en bas' ne semble pas apprécier le produit. Pas d'hallucination sonore, visuellement rien de bien spectaculaire non plus à part les pierres du mur d'en face qui se couvrent d'une sorte de mousse brillante. Comme je suis parcouru de tensions nerveuses dans l'abdomen et que mon corps a du mal à réguler les impressions de chaud et de froid (effet classique des psychédéliques), sans me poser de question je laisse le ventre et le cœur gérer mon métabolisme tandis que je focalise mon attention sur ce qui se passe dans ma tête. Cette dissociation, facile avec les psychédéliques, me donne à croire que le corps et l'esprit sont deux entités distinctes. Physiquement, je ressens mon corps posé comme un tas dans le lit  tandis que mon esprit rejoint un espace grand comme un ciel fait de formes colorées qui rappellent les photos des galaxies. L'ectoplasme de mon esprit s'y dissout et je m'y disperse. De nouvelles pensées, discordantes et qui ne semblent pas les miennes prennent alors place entre mes oreilles. Étrange sentiment de m'être perdu, dissout dans l'éther. Je laisse faire...  
J'ai trouvé ce trip dissociatif, avec un passage intéressant mais suivi d'une descente trop longue et fatigante malgré l'aide de l'alprazolam.


Ces expériences sont une cause d'isolement autant que la conséquence de me sentir trop souvent sans réponse, sans retour ou sans un signe. Seul aussi d'être en constant décalage par mes goûts ou mon âge. Ce que je fais ne compte pas, ce que j'écris met mal à l'aise et je reste sans retour, ni personne pour échanger. Trop de mails sans réponse, d'invitations qui tombent à plat, d'images sans commentaires de la part de ceux qui me côtoient. Le sentiment d'incompréhension et le silence conduisent à l'isolement. 

J'ai pensé en anglais que "from pyschonaut to psychopath there is a path" et je pense qu'en français on pourrait traduire ça par "la came-isole". Pourtant mes cheveux poussent et je ne sais pas toujours pas avec qui partager ma situation, alors  je continue doucement, et je ne bois pas, et je ne fume pas.


Merci pour votre lecture, vos mots



"L'intoxiqué s'épanouit jalousement dans un monde qui n'a plus de sens que pour lui et réduit à leur strict minimum les communications extérieures. Il va à l'essentiel; il est souvent à se taire. Les autres se détournent de lui sans qu'il souffre de solitude. Isolé sur les cimes, ce qu'il aperçoit dans la vallée de larmes en contrebas, ne lui laisse au coeur aucun regret. La scission a eu lieu 

dimanche 2 avril 2017

La société de contrôle

"La société de contrôle moderne se distingue de la société disciplinaire  selon quatre points.
Premièrement, c'est moins le corps qui est mis en jeu que l’affect. Il s'agit moins de produire des habitudes corporelles par le jeu de la peine et du plaisir que de susciter des besoins et des envies. Le contrôle des représentations grâce aux outils de communication, ceux du spectacle en particulier permet de susciter et de proposer des formes utiles de jouissance.
Deuxièmement, l'énergie utilisée pour assurer le contrôle émane de l'individu contrôlé plus que de l'institution. Les dispositifs de contrôle ne produisent pas l'énergie de leur propre fonctionnement. Ils émettent des informations, dont le coût énergétique est très faible, pour guider les dépenses d'énergie de leurs composants. ' L'alternative n'est pas de se soumettre ou de se révolter, mais de rassembler son potentiel personnel au service de la tâche à accomplir, ou d'être marginalisé'. .../...
Troisièmement, les règles du contrôle sont intériorisées et revendiquées. Les contraintes sociales sont moins vécues comme émanant d'institutions dogmatiques, fixes et situables qu'appréhendées comme les données inévitables du monde. Obéir, ce n'est plus s'assujettir à une norme centrale, c'est jouer un rôle parmi les multiples individualités compatibles avec les dispositifs.
Et quatrièmement, les objectifs d'un dispositif de contrôle tendent à être les mêmes que ceux de ses membres.
Contrairement à la discipline, le pouvoir de contrôle fonctionne plus au plaisir qu'à la peine. Il propose survie, confort et petites jouissances contre une docilité d'autant plus facile qu'elle peut prendre un très grand nombre d'aspects. Dans le mesure où toutes les formes d'existence tendent à dépendre directement des dispositifs de contrôle, il suffit de vouloir survivre pour être un collaborateur de la société de contrôle.

La société de contrôle évite la violence directe et réserve les dispositifs disciplinaires  aux mauvais éléments qu'elle marginalise. Elle continue pourtant à exercer une véritable violence sur ses bords (marginaux, migrants, quartiers) ou lorsqu'il se produit de l'imprévu au centre (manifestations contre la loi travail) , mais pour la masse, cette violence n'est qu'un  risque potentiel. 
Dans la société de contrôle la violence est surtout virtuelle.../...
La violence postmoderne s'exerce avant tout sur des virtualités, sur des comportements possibles dont elle limite l'apparition par découragement ou incitation."

Olivier Razac
Disséquer la société de contrôle. p112.
L'Harmattan 2008

mercredi 29 mars 2017

Salch

L'individualisme conduit au cynisme qui mène au nihilisme. Dans ses croquis Salch,  porte un regard moderne qui n'a rien de bienveillant.  C'est mal ! et c'est bien vu. Je trouve ça drôle, et je ris jaune.
Et vous ?











dimanche 19 mars 2017

Groupie

Ce soir je sors. Concert à Bourgoin-Jallieu, ville-nouvelle du nord Isère. Le Peuple de l'Herbe joue aux "Abattoirs", salle régionale connue des locaux amateurs de "musiques actuelles".  Après la ligne sans fin de l'avenue Henri Barbusse mon vélo traverse les zones commerciales, puis l'autoroute.
Première partie de soirée avec TAMGRAM, groupe français poético-psychédélique.
Les basses sont à 7 sur l'échelle de Richter. Je m'assois sur un escalier à côté d'une fille et on échange quelques mots au sujet des paroles du groupe, recherchées et difficiles à suivre. Entracte. Un jeune garçon qui est son fils vient alors la rejoindre accompagné d'un rugbyman tondu aux zygomatiques plutôt tendus. Elle fait les présentations :
"Un monsieur (c'est moi), Mon mari (le rubgbyman berjallien)".  Je descend alors de vélo (au figuré) et je réalise que je ne suis pas en rave, mais à Bourgoin-Jallieu ville-nouvelle et berceau du RCSBJ (Vice champion de France de Rugby 1997 !).
C'est un concert local, dans une salle municipale où beaucoup sont venus en famille. Si ça se trouve, je ne suis même pas le plus âgé dans la salle ce soir !
C'est vrai que l'ambiance est plus salle des fêtes que festive. Peu de teuffeurs tazés ici. Quelques pétards, pas mal de bières. Des polos et des jeans avec coupes courtes, épaules larges et bedaines en formation.
L'entracte n'en finit pas, la salle est éclairée comme en plein jour. Les types qui ne sont pas au bar font les jeux sur leurs portables, parlent boulot, bouchons...Mi-temps et pause café.

Puis "LE PEUPLE DE L'HERBE" monte sur scène. Ce sont des enfants du Pays, qui ont fait leurs classes aux "Abattoirs" de Bourgoin.  Éclectique, pêchu, de bon goût, leur style va du raggamuffin au dub en passant par le rap. Ils sont sympathiques, pros et en forme. 
Au premier rang, quelques lycéens pogotent en douce. Le tox de service, qui est un ancien pote des musicos, gesticule hors de lui prêt à monter sur scène. Le SO fait des rondes avec bouchons dans les oreilles. Un relou drague une fille qui danse à côté de moi. La meuf se casse suivie par sa copine.  Pour faire plus bal des pompiers y a même un bourre-pif qui vole. Au parterre, ça se dandine, mais ça ne danse pas. 
C'est un concert, ça n'est pas le grand-soir de l'underground.
Applaudissements, rappel, vélo, bédo, dodo.

lundi 13 mars 2017

bore-out

"Etre en bore-out c'est être à bout, par manque de travail, de motivation, ou de défis professionnels" selon François Baumann, médecin et auteur d'un ouvrage sur ce sujet.
Ce phénomène a été identifié pour la première fois en 2007 par des consultants suisses.
Le Bore out touche selon de difficiles estimations entre 15 et 30% des salariés. Il provoque une attaque de l'estime de soi, un sentiment d'inutilité qui génère la démotivation, la perte de confiance en soi, et peut se transformer en angoisse, en dépression.

Dans une société qui valorise le travail au point d’en faire une raison d’être et alors que 17% des salariés s’estiment être « potentiellement en situation de burn-out », les victimes du bore-out tentent de dissimuler leur inactivité en jouant la comédie du job ‘normal’. C’est logique, car en période de fort chômage c’est difficile de se plaindre d’être payé à ne rien faire. D’autre part, dans le climat hyper compétitif de l’emploi cadre, la disgrâce de la mise au placard apparaît comme une forme de sanction, de déchéance. Qui dit sanction suppose faute. Reconnaître que l’on est mis au placard revient donc à reconnaître son d'infériorité et obère donc toute chance de rentrer dans le rang. Aussi lorsqu’ils sont mis sur la touche, par orgueil et par stratégie, peu de cadres l’admettent et la plupart s’inventent des tâches, des responsabilités pour pouvoir donner le change à leurs pairs dans l’attente d’un rebondissement. 
En fait, on voit que l'entreprise s'accommode très bien de la paresse et de l'inefficacité, mais à condition que cela soit déguisé par une activité comme la consultation d'écrans, de documents. Par contre, ne rien faire ouvertement au bureau déstabilise profondément le fonctionnement du système car celui qui ne fait rien, qui n'est engagé dans aucune activité, devient imprévisible et peut faire n'importe quoi.

Du côté de la DRH (Direction Ressources Humaines) des entreprises « L’ennui au travail fait un peu souci de riche. L’urgence peut sembler ailleurs : il faut d’abord s’occuper de ceux qui sont submergés », confirme Pierrèle Boursaly du cabinet PSYA.
Ici aussi, rien que de très logique, car pour une DRH, admettre le bore-out c’est reconnaître les dysfonctionnements du management de l’entreprise qui ne sait pas tirer parti des ressources et équilibrer la charge des postes.
De plus, la logique d’évaluation et de notation des salariés conduit naturellement à la création d’une catégorie de ‘low performers’ (‘derniers de la classe’) constitué des 5 à 10% les moins bien notés pour lesquels la mise sur la touche, constitue un plan de carrière dans l’attente d'une ‘réforme’ ou de leur départ.

Enfin le chômage et la difficulté à trouver un emploi « conduit les gens à s’enkyster dans des jobs qui ne les satisfont pas. Avant on changeait de poste. Aujourd’hui on doit apprendre à vivre malheureux au travail » nous dit Philippe Zawieja.
Face au bore-out je ne vois que deux attitudes possibles : changer de job si on peut ou alors apprendre à vivre en dehors du travail. Le lâcher-prise n'est pas une chose facile car personne ne vous comprend, et les meilleures techniques de développement personnel sont inefficaces. Apprendre à vivre en dehors du travail ne se décrète pas, et ne peut se faire qu'en s'épaulant aux collègues qui sont ou ont été dans la même situation.

Ainsi, ces derniers temps, on voit un nouveau 'santon' dans la crèche de l'entreprise, la figure du cadre 'low performer'/bore-out qui parle sans honte de la vacuité de son job. Il n'est ici plus question d'histoire personnelle mais de remise en cause du système du travail en entreprise. Le bore-out subversif qui s'assume peut alors moquer la vanité des 'bull-shit jobs' de ses collègues bien notés et dénoncer l'absurdité du monde du travail en entreprise. 

En ce lundi, je vous souhaite une bonne semaine de travail,
Ozias

mercredi 1 mars 2017

musique

De la techno à l'opéra  j'écoute et j'aime la musique. La musique vivante est comme une pensée, la musique enregistrée comme une lecture. Depuis plusieurs mois j'écoute plus que je lis, moins de radio plus de musique.
  La techno me fait vibrer, l'opéra me fait frissonner. Dommage pour moi de ne pas savoir parler en musique. 
Quelle musique ? Voici le hit parade du moment.


Torrent voluptueux : Tristan  opéra de Richard wagner. C'est sombre, coloré, profond, et aussi très pessimiste.

Pour le psychonautisme underground introspectif : Derek Pitral 

Inspiration, vibrations et le plaisir de la danse : Boris Brejcha

Quelques mix pour tenir la distance : 

Un rien  de house peut être ...




Pour la fin de la nuit, détente, retour au calme: chill-out

Lumineux comme le matin, les noces de Figaro Mozart

dimanche 19 février 2017

fckng serious

"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit"
Ce soir, clubbing techno-minimal avec Boris Brejcha au ZigZag (Paris VIII).  
La piste est vaste, circulaire, le parquet ciré attend. 
Minuit passé, warm-up. Dans la salle ça déboule et ça glisse déjà. Décor assez simple, comme le look des gens qui étaient dans la queue, certains venus de loin pour cette soirée. Sur les tables, des seaux à glacer sont grands comme des bidets.
Public middle-class, plutôt bien rangé, blanc et jeune. Je suis même frappé par le peu de visages étranges autour de moi. Pas de déguisement ni de maquillages baroques, peu de talons hauts. Quelque part un mec danse avec un laser multicolore dans la bouche...
Jeu de lumière à tendances tricolores. Forêt de smartphones brandis à bout de bras pour un selfie avec ou sans Boris. Autour de moi je capte plus de likes que de french kisses. La musique n'est pas trop forte (on peut s'entendre sans coller les lèvres au pavillon de son interlocuteur). Le son est de qualité variable selon où on se trouve (attention aux balcons ! le meilleur son c'est depuis l'escalier qui descend au parterre).
Je savoure un grand sentiment de liberté. Je me sens vivant, plongé dans un grand bain de jouvence -eaux/elles-, et je me sens seul aussi. C'est vrai, dans ces bals technos je me demande toujours si je suis seul à être seul. C'est vrai que je viens toujours seul et un peu sans trop d'envie de tout quand même. Alors, je danse avec une fille qui porte des 'lunettes pas de soleil', comme moi.  Souris moi, montre moi tes dents, souris moi, montre moi dedans. Autour de moi les danseurs sont cools, souriants, sympathiques. De temps en temps je cale l'un d'eux sur une banquette car il penche un peu trop, je retiens un autre qui a raté une marche. Alors que j'avais piqué du nez une jeune fille m'embrasse gentiment.
La musique, les lumières et tout le monde danse cette nuit.

5h40. 'Paris s'éveille' et je rentre. La lune est gibeuse, un oiseau chante.
Je marche et je réalise toute la chance que j'ai d'être ici, instruit, libre et avec un bon lit qui m'attend.

"Ne savez-vous pas qu'il vient une heure au milieu de la nuit où tout le monde doit faire tomber son masque." Søren Kierkegaard
" Ce qui se dit la nuit ne voit jamais le jour" (Jacques de Bascher ?)


Autres sorties sur ce blog : http://emagicworkshop.blogspot.fr/2016/05/je-sors-ce-soir.html
 et aussi   https://emagicworkshop.blogspot.fr/2017/04/je-misole.html




mercredi 8 février 2017

Le temps de la société du spectacle

La première partie de la Société du Spectacle montre l’aliénation de la vie par procuration dans la sociétés des marchandises. L’auteur, Guy Debord,  consacre ensuite un long chapitre à l’histoire des luttes révolutionnaires. La  troisième partie du livre, titrée ‘temps et histoire’,  est une réflexion sur  l’appropriation sociale du temps  au profit de la classe dominante.

Pour Debord « Le temps est l’aliénation nécessaire, le milieu où le sujet se réalise en se perdant, devient autre pour devenir la réalité de lui-même. Mais son contraire est justement l’aliénation dominante, qui est subie par le producteur d’un présent étranger. Dans cette aliénation spatialela société qui sépare à la racine le sujet et l’activité qu’elle lui dérobe, le sépare d’abord de son propre temps. (#161 p124)

Guy Debord oppose le  ‘temps cyclique’ des sociétés anciennes rythmé par  les  saisons de l’année et de la vie, c’est-à-dire le temps réellement vécu par les individus, au ‘temps spectaculaire’ (temps marchandise) de nos sociétés qui est un temps irréversible vécu illusoirement.
« Le temps de la production, le temps marchandise, est une accumulation infinie d’intervalles équivalents. C’est l’abstraction du temps irréversible, dont tous les segments doivent prouver sur le chronomètre leur seule égalité quantitative. C’est dans cette domination sociale du temps-marchandise que « le temps est tout, l’homme n’est rien ; il est tout au plus la carcasse du temps ». #147 p117
Le temps irréversible est le temps de celui qui règne. Les dynasties sont sa première mesure, l’écriture est son arme. ../… Avec l’écriture apparaît une conscience qui n’est plus portée et transmise dans la relation immédiate des vivants : une mémoire impersonnelle qui est celle de l’administration et de la société. « Les écrits sont les pensées de l’Etat ; les archives sa mémoire »(Novalis) #131 p101
« Le temps spectaculaire est le temps de l’aventure et de la guerre, le temps qui apparaît dans le heurt des communautés étrangères, le dérangement de l’ordre immuable de la société. L’histoire survient donc devant les hommes comme un facteur étranger, comme ce qu’ils n’avaient pas voulu et ce contre quoi ils se croyaient abrités. »
Pour Guy Debord  « Les possesseurs de l’Histoire [classe dirigeante] ont mis dans le temps un sens qui est aussi une signification…/…Les maîtres qui détiennent la propriété privée de l’Histoire, sous la protection du mythe, la détiennent eux même sur le mode de l’illusion [c’est-à-dire du Spectacle].

Cette dépossession de l'individu par le pouvoir renvoie au travail de Cynthia Fleury dans son ouvrage 'les irremplaçables'  dans lequel elle affirme que "Le pouvoir tient par l'intérêt qu'il alimente. Il substitue à la notion d'individuation celle de l’intérêt, en donnant l'illusion qu'elle lui est similaire. Mais cet intérêt n'a de sens qu'à l'intérieur d'un système qui reconnait la valeur de la domination. Jouir de cet intérêt suppose la mise sous tutelle. L' "avoir" met en demeure la liberté d'être du sujet."

Dans notre quotidien, le slogan "l'actualité n'attend pas" matérialisé par le fil d'actualité de BFM diffusé en continu dans de nombreux établissements publics illustre bien cette spoliation de notre temps vécu et la façon dont on nous impose chaque jour une histoire symbolique qui porte nos destins.
Bref, les peuples heureux n'ont pas d'histoire.

Liens : 
Debord, derniere déclaration avant suicide

mercredi 1 février 2017

le Spectacle

La Société du spectaclede Guy Debord est un essai plutôt difficile d'accès. Son style fait penser à Lacan, son propos fait appel à l'histoire, à la sociologie, à l'ethnologie, à la philosophie, à l'histoire des luttes révolutionnaires. 
Ce livre paru en 1967  est une critique de la marchandise et de sa domination sur la vie, de l'« aliénation » de la société de consommation. La Société du spectacle est également une réflexion sur nos moyens de changer l'Histoire. 

Citations et extraits du livre (en italique) :

Thèse 1 "Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s'annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s'est éloigné dans une représentation." (p3)

Thèse 4 "Le Spectacle n'est pas un ensemble d'images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images." (p4).

Thèse 30 " L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. (p16)

"Selon Debord, le spectacle est le stade achevé du capitalisme, il est un pendant concret de l'organisation économique de la marchandise. Le spectacle est une "idéologie économique" qui permet à la société contemporaine de légitimer l’universalité d’une vision unique de la vie, en l’imposant aux sens et à la conscience de tous, via une sphère de manifestations audio-visuelles, bureaucratiques, politiques et économiques solidaires. Le but de ce dispositif est de de maintenir la reproduction du pouvoir et de l’aliénation. Ce qui conduit inexorablement à la perte du vivant, à la perte de la vie."

De la même façon que l'accumulation des moyens de production instaure un rapport social ceux qui possèdent le capital et ceux qui n'ont que leur force de travail pour survivre, le spectacle, qui constitue le modèle présent de la vie socialement dominante, instaure un rapport social entre le monde sensible de nos vies quotidiennes et l'ensemble des autres. Ce qui était directement vécu par l'individu est éloigné au profit de représentations dominantes.  
Le Spectacle met en scène un monde irréaliste, coupé de la réalité vécue par la population. Le spectacle est le monopole de l'apparence et le langage de la séparation.  Le spectacle est en cela une autre forme du Capital et de sa domination.
Dans un monde où l'économie n'est plus au service des hommes mais où les hommes sont au service de l'économie, la société du spectacle est, à la fois un remède et un poison. C'est un remède puisqu'il permet de supporter l'insupportable et un poison car il véhicule les idées de la classe dominante qui contrôle la production du Spectacle. 
Le spectacle est aliénation: en fantasmant une vie qui n'est pas la sienne et qu'il ne pourra jamais réaliser, le spectateur ne vit que par procuration et devient étranger à lui-même (aliéné) et à son propre désir. 

Le retour au sensible, au réel, à la vie quotidienne sont nos simples et humbles moyens de faire la guerre au spectacle et de devenir acteurs de l'histoire.
« Nous voulons que les idées redeviennent dangereuses !»

«Tout est fait pour que l'individu ne se rencontre pas dans une vie. Parce que s'il se rencontre c'est terrible, il développe un sens critique, il développe un jugement. Et alors là il est ingouvernable. Les politiques n'ont aucun intérêt à ce que l'individu se trouve.» Albert Dupontel
La société du spectacle est un film, regardez le ICI.
Crédits :

mercredi 18 janvier 2017

Politique

Koch brothers . Milliardaires libertariens.
Le forum économique mondial (WEF),  réunit actuellement à Davos en Suisse des dirigeants d’entreprise, des responsables politiques ainsi que des intellectuels et des journalistes, afin de débattre des problèmes les plus urgents de la planète.
A cette occasion OXFAM, une ONG très 'people' (Scarlet Johansson a longtemps été son ambassadrice) et sur laquelle je n'ai pas vu grand chose concernant le financement, fait paraître un rapport qui dénonce la concentration indécente des richesses dans le monde actuel. "Une économie au service des 99%"

Le constat de départ, c'est que depuis 2015 les 1% les plus riches détiennent autant de richesses que tout le reste de la planète. (source crédit Suisse "Global wealth databook 2016"), 'ce qui rend la stabilité mondiale illusoire" (Barak Obama ONU septembre 2016). Rien de subversif ici. Face à ces inégalités qui menacent de disloquer nos sociétés, pour OXFAM le défi consiste "à proposer une alternative positive qui n'exacerbe pas les divisions". "Une économie au service des 99%" analyse donc comment les grandes entreprises et les plus fortunés alimentent la crise des inégalités et ce qui peut être fait pour changer la donne (p3).

Les grandes entreprises jouent un rôle capital dans la création de ces inégalités car en vue de maximiser les rendements de leurs propriétaires et actionnaires fortunés elles exploitent au maximum leurs travailleurs et fournisseurs au nom de "l'intérêt du consommateur" et échappent à l'impôt par le biais de "l' ingénierie fiscale". 
Ainsi, dans les années 80, les producteurs de cacao recevaient 18% de la valeur d'une barre chocolatée, contre 6% aujourd'hui. 
Parallèlement, les taux d'imposition sur les sociétés sont en baisse partout dans le monde. Apple aurait été imposé à seulement 0,005% sur les bénéfices réalisés en Europe en 2014. Pour les pays en développement, l'évasion fiscale entraîne chaque année un manque à gagner estimé à 100 milliards de dollars.

L'objectif de ces entreprises, et de la plupart des entreprises industrielles et commerciales est de maximiser leurs bénéfices afin d'optimiser la rentabilité de leurs actionnaires. Ainsi Royaume Uni, la part des bénéfices revenant aux actionnaires qui était de 10% dans les années 70 est aujourd'hui de 70%. Cette hausse des dividendes profite aux plus riches puisque la majorité des actionnaires font partie de la frange la plus aisée de la société.

Une bonne partie des plus fortunés utilise également son pouvoir, son influence pour accaparer les politiques et s'assurer que les règles adoptées lui sont favorables. Certains utilisent leur fortune pour acheter les décisions politiques qui les arrangent. Les dirigeants politiques rivalisent donc de zèle pour attirer les plus fortunés en bradant la souveraineté des états qu'ils gouvernent. L'exemple de Jean-Claude Junker nommé champion de la lutte contre l'évasion fiscale en Europe alors même qu'il est acteur des LuxLeaks fait penser au braconnier devenu garde chasse. L'inculpation d'Antoine Deltour, le lanceur d'alerte des Luxleaks rajoute une couche d'indécence à l'iniquité du système.

La nocivité du néolibéralisme est maintenant dénoncée par le FMI lui même qui déclare que: "Au lieu de générer de la croissance, certaines politiques néolibérales ont creusé les inégalités au détriment d'une croissance/développement durable".

Alors, cessons d'écouter, cessons de croire le catéchisme néolibéral qu'on nous rabâche depuis 40 ans et selon lequel le marché a toujours raison et le rôle des états doit être réduit le plus possible, que la richesse témoigne d'une réussite, que les inégalités sont justes et naturelles, que la croissance du PIB est un objectif sacré et que les ressources de la terre sont illimitées.
L'économie et la création de richesse à laquelle nous participons tous doit profiter au 99% de la population et plus seulement aux 1% les plus riches.
99% de tous les pays, unissons nous !

mercredi 11 janvier 2017

DXM

Le DXM (Dextrométorphane) est un opiacé de synthèse, utilisé en médecine comme antitussif. Contrairement aux autres opiacés il a un puissant effet dissociatif et hallucinogène et il est vendu sans ordonnance. DXM c'est aussi le titre du livre de Laurent Gersztenkorn, DXM paru chez 'Mon petit Editeur'  en 2011.

Laurent Gersztenkorn  c'est pour moi le Guillaume Dustan de la défonce. Même si le style est beaucoup plus plus lyrique que chez Dustan, DXM est une 'chronique défonces'  jusqu’au-boutiste comme  'Dans ma  chambre' ou 'je sors ce soir'  (de Guillaume Dustan) sont des chroniques  'pédés'  jusqu’au-boutistes. Les deux auteurs partagent un engagement total et aussi une même recherche initiatique des possibles, et de la limite. Le slogan olympique « Citius, Altius,Fortius » est quelque-part leur devise et leurs "exploits" ne sont pas à la porté de tout un chacun. En matière de purisme Gersztenkorn et Dustan atteignent tous deux l'excellence et une même hauteur de solitude. Certaines scènes comme une visite de Noel aux parents se retrouvent d'ailleurs chez les deux auteurs. Chacun est dans son genre champion dans sa spécialité et veut ne rien nous épargner.

Ce qui me plait dans "DXM" c'est que la défonce n' y est pas réduite à une simple addiction, ni un usage, mais  constitue un choix, une voie. La défonce est la spécialité de Laurent Gersztenkorn, son centre d’intérêt et son moyen de s’extraire du monde 'réel' qui ne l’intéresse pas (LG utilise les drogues pour "sortir d'un univers commun, banal à pleurer jusqu'à la mort"). Se défoncer ne l'empêche ni le dispense de penser, de lire de la philosophie, de faire du théâtre, d'écrire. Par contre la réussite et donc la domination sociale ne constituent pas la finalité de ces activités. C'est plutôt une attitude de dandy esthète en quête de connaissance et de liberté. 
"Il me faut regarder mon besoin d'évasion et de liberté non pas comme un asservissement à la drogue mais comme une ouverture totale de tout mon être sur l'univers exalté !"
Bien que très lyrique, Gersztenkorn évite aussi le new-age fumeux ou le trip mystique gonflant que l'on retrouve chez de nombreux auteurs (Castaneda par exemple avec "le diable et la petite fumée". Ses références sont Nietzsche, Foucault; c'est plus solide, et moins fumeux.
Par ailleurs 'DXM' est précieux car il aide à différencier les différentes façon d'utiliser les drogues. Le psychonautisme n'a rien à voir avec la dépendance à un produit. Les utilisateurs ne sont pas tous des toxicomanes. La toxicomanie n'est pas qu'un symptôme psychique comme le répètent trop facilement les psy ou l'OMS et les médias.
"Les psychiatres ne comprennent pas le principe de réalité; se droguer n'est pas un mal de société en soi, ni une échappatoire, ni un principe, mais une culture qui nourrit l'art et la beauté encore que tout dépende des substances et des individus" (p11).

Voici donc un nouveau livre sur la drogue. Plus cultivé que 'Portrait du jeune homme en fumeur de crack', moins gonflant que du Castaneda, sans visées éducatives et morales comme l'Herbe bleue ou Flash. Moins élégant pourtant que les 'rêveries du toxicomane solitaire' (écrites par Anonyme et publiées chez Allia ) que je recommande au passage.

Etant grippé alors que je lisais ce livre, j'ai vérifié personnellement l'efficacité du DXM pour ce qui concerne les toux sèches et les effets secondaires...
A ce sujet, voici quelques idées de lecture si vous avez la grippe :

http://www.psychoactif.org/psychowiki/index.php?title=Livres_stup%C3%A9fiants_:_les_livres_qui_parlent_de_drogues


dimanche 8 janvier 2017

le jeu de la vie

Un bien gros gâteau pour un tout petit vieillard !

Il dit avoir 146  bougies, mais ni le G
uiness-Book, ni les démographes ne veulent le croire.
Impotent, il ne peut quasiment plus se laver et le moindre de ses faits et gestes est devenu un calvaire. Il ne voit plus, il n'entend plus.
Pourtant, il fait le buzz sur la toile et dans la presse internationale. Même s'il peut dégoûter, il fait  aussi rêver et espérer beaucoup d'autres aspirants à la longévité. Pensez, à 70 ans vous seriez juste en milieu de carrière !

Le vieil homme a confié que le secret de sa longévité était la patience. A l'époque, en 1992, année de ses 122 ans, il a fait l'acquisition de sa pierre tombale. Voilà donc 24 ans qu'il attend patiemment. A ce jour, il a enterré ses dix frères et sœurs, ses quatre épouses et tous ses enfants. 
Sa carte d'identité, qui mentionne sa naissance sur l'île de Java le 31 décembre 1870, est le grand oeuvre de sa vie. Dommage qu'aucun registre des naissances ne puisse authentifier le document. 
Mbah Gotho a déclaré (pour son anniversaire ?) ne souhaiter qu’une seule chose : «Ce que je veux c’est mourir». Un sage heureux d'après ses dires, mais au niveau où il est rendu, il risque d'être seul à souhaiter sa disparition. Même si dans les années 90 il a soigneusement laissé des directives de fin de vie cela est remonte à si longtemps que ses supporters ont oublié et réclament maintenant avec impatience l'homologation, et le record !
Faut il lui souhaiter longue vie ou  mort prochaine ?

En tout cas le record officiel de longévité reste français avec notre Jeanne, Calment (122 ans).
Alors que l'homme le plus âgé vivant actuellement est Yisrael Kristal (113 ans):
http://www.7sur7.be/7s7/fr/1505/Monde/article/detail/2913953/2016/10/11/Le-doyen-de-l-humanite-fete-sa-bar-mitsva-a-113-ans.dhtml?utm_medium=rss&utm_content=mondepar7sur7betoutel%27actualit


- See more at: http://www.espritsciencemetaphysiques.com/un-homme-age-de-256-ans-revele-les-secrets-de-sa-longevite.html#sthash.skcUMZvG.dpuf
Sources http://www.parismatch.com/Actu/Insolite/Mbah-Gotho-qui-pretend-etre-le-doyen-de-l-humanite-a-fete-ses-146-ans-1158401
http://www.ouest-france.fr/leditiondusoir/data/906/reader/reader.html?t=1483550337407#!preferred/1/package/906/pub/907/page/7

Au sujet des directives anticipées et à lire dans ce blog 
http://emagicworkshop.blogspot.fr/2016/02/directives-anticipees.html


Plus loin, plus fort, pas sûr :
D’autres nombreux cas notamment dans les pays les moins développés, dont l’âge n’a pu être certifié de façon incontestable,sont souvent soumises à controverse,quelques exemples:
Turinah, une indonésienne de 157 ans, encore vivante (et en forme) aujourd’hui (Whatsonxia‌men.com/ne‌ws12688.html)
Moloko Temo, serait née le 4 juillet 1874 près de Bochum en Afrique du Sud, et décédé le 2 juin 2009 à l’âge présumée de 135 ans.
Habib Miyan (né au Rajasthan à Jaipur, en Inde en 1870 – mort le 18 août 2008)(http://new‌s.bbc.co.u‌k/2/hi/sou‌th_asia/7569656.stm)
La Géorgienne Antissa Khvitschava aurait fêté en juillet 2010 son 130e anniversaire.
Lien complémentaire :
En.wikiped‌ia.org/wik‌i/Li_Ching-Yuen

samedi 31 décembre 2016

artistes premiers


Visite à la Caverne du Pont D'Arc, l'artefact de la Grotte Chauvet.
Pour commencer, ce n'est pas au pont d'Arc, c'est à 300 m (à vol d'oiseau) mais par la route c'est plus long et du coup l'heure de la réservation était dépassée à notre arrivée. 
Architecture type caserne ou plutôt monastère. Visible de loin et  tout en béton nu, ce qui -étonnamment- ne semble pas avoir inspiré - jusqu'à ce jour- les grapheurs contemporains. 
A l'entrée de la grotte dégage une légère odeur d'espace public comme au Futuroscope. Là, le groupe de 36 visitants dont je fais partie poirote. Puis nous sommes appareillés d'un casque sur les oreilles, et d'un récepteur à la ceinture. Cet équipement est bien pratique pour empiler les groupes, ménager la voix des guides et éviter les 'bavardages' entre visiteurs.
Le pointeur laser hystérique du guide papillonne sur les détails des fresques qu'il commente. Tout au long de la visite, téléguidé par les commentaires du guide, je crains de me faire absorber par le groupe suivant qui tortille derrière moi sur le parcours de la 'grotte'.

Finalement je débranche le casque et je visite avec mes yeux.  Les peintures ont été faites dans les parties de la grotte qui n'ont jamais reçu la lumière. Plus on s'éloigne et plus les fresques sont complexes.
Ces dessins qui semblent effectués rapidement comme des tags sont en fait des mises en scène. Les grandes fresques sont dessinées sur des parois qui évoquent des sexes féminins. Sous le grand panneau des chevaux, par temps humide, l'eau sort en gargouillant d'un orifice de la grotte.
Panneau des chevaux. En bas à droite s'ouvre un orifice humide.
Sur une large stalactite pendant comme une large bite on peut voir un triangle (représentation de venus) qu'approche un faune moitié homme moitié bison.
Pendant calcaire avec dessin de triangle pubien, tête de bison et bras humain.
La grotte est un monde obscur, imaginaire et enchanté. Selon Jean Clottes la configuration géologique et l'atmosphère de la grotte permettent des hallucinations, autant visuelles qu'auditives, en raison notamment d'une présence importante de gaz carbonique. Dans cette grotte, il y a trois cents siècles, se serait donc jouée une expérience quasi-mystique chamanique. Pour ce chercheur, les cavités, en autorisant les visions, facilitaient le contact avec des esprits à travers les murs. "Ces hommes d'il y a trente millénaires sont exactement comme nous, sauf qu'ils n'ont pas du tout la même représentation du monde." 


En trente mille ans les paysages ont été bouleversés et nous avons muté. Notre monde et nos représentations diffèrent radicalement et pourtant ces dessins parlent une langue éteinte qui a été la notre.
Ces peintures nous plongent dans les abysses de notre passé.  Même si nous ne pourrons jamais comprendre la vision de ces artistes, il est évident que ces hommes maîtrisaient les représentations et  les techniques picturales qui leur permettaient de communiquer de façon plus durable que par le langage. 
Ces témoignages d'humanité préhistoriques sont rassurants car au travers du temps ils montrent ce caractère spécifique de notre espèce qui est de représenter et  communiquer. Ils ont aussi un côté  inquiétant car même si ces dessins sont aussi aboutis que les nôtres il faut admettre que leur sens est à jamais perdu. Transmission oui mais incommunicabilité aussi.
Art pariétal ou pas, "Tous les matins du monde sont à jamais perdus"

Ozias

A voir : "La grotte des rêves" de Werner Herzog 
Visite virtuelle : http://archeologie.culture.fr/chauvet/fr

Les spéléologues découvreurs en 1994
La caverne du Pont d'Arc synthétique (ouverte au public en 2015).

L'art pariétal est il psychédélique ?

vendredi 9 décembre 2016

la loi du marché

Le sofosbuvir (commercialisé sous la marque Sovaldi par la firme américaine pharmaceutique Gilead Sciences est une molécule, développée par Pharmasset comme médicament pour le traitement de l'hépatite C.
La firme californienne
 Gilead a racheté Pharmasset en 2011 pour 11 milliards de dollars tandis que les coûts de développement de la molécule de Sofosbuvir sont eux estimés à 62 millions de dollars. Excellente affaire donc pour Pharmasset, mais aussi pour Gilead qui a déjà vendu pour plus de 30 milliards de dollars de Sovaldi.

Aux USA, le prix d'un comprimé en 2014 a été fixé à 1000 dollars, ce qui fait revenir la cure de 12 semaines à 84 000 dollars. En France la cure de 12 semaines coûte 41 000 € par patient (novembre 2014). En 2014-2015 les dépenses publiques de traitement de l'hépatite C s’élevaient en France à 1.3 milliards d'Euros. 
Le prix de vente n'a donc rien à voir avec le coût de développement. Il est établi par négociation entre les états (rembourseurs) et le laboratoire pharmaceutique qui définissent un "prix socialement acceptable".
Dans ces négociations, les labos pharmaceutiques menacent les états de pénurie de livraison, de délocalisation des activités et jouent sur les remises accordées. Les états eux décident de l'autorisation de mise sur le marché, du déremboursement des médicaments, (le Royaume Uni refuse de rembourser si les prix sont trop élevés), et  disposent même de la possibilité de casser juridiquement le brevet pour ouvrir le marché aux génériques. Ainsi, en Algérie, les laboratoires Beker produisent un générique du Sofosbuvir commercialisé 30 fois moins cher mais ce générique est illégal en France où Sovaldi est protégé par brevet jusqu'en 2024.

Les prix exorbitants sont justifiés par la financiarisation de l'industrie pharmaceutique et non par les coûts de développement (environ 15% du Chiffre d'affaire) , ce que dit bien Eric Baseilhac de Gilead "L'innovation thérapeutique vient de la capitalisation. Pour pouvoir investir les firmes doivent donc avoir des niveaux de rentabilité élevés" En d'autre termes, les firmes pharmaceutiques prennent les systèmes de remboursement pour des vaches à lait pour le plus grand profit de leurs investisseurs. 
Le prix du médicament est le prix que le système social est capable de payer. Sachant qu'en France  l'enseignement post universitaire est financé à plus de 90% par les labos pharmaceutiques on sent que les lobbys sont omniprésents et que le système n'est pas prêt de changer sans une forte pression sur l'industrie pharmaceutique. 
Sources :
http://www.arte.tv/guide/fr/068399-011-A/vox-pop  (début à 7mn)

Autre cas intéressant, celui du Victrelis introduit en 2011 dans les tri-thérapies qui ont précédé l'arrivée du Sofosbuvir : http://www.liberation.fr/societe/2014/06/03/merck-attaque-pour-mauvais-traitement_1032966
http://hepatites.net/index.php?name=PNphpBB2&file=printview&t=22766&start=0