Alice Rivieres Manifeste de Dingdingdong.p78
Le point de départ et le pari de Dingdingdong c'est que la maladie est une occasion de faire pousser de la pensée. Le collectif Ddg crée en 2013 (je crois) se voue entièrement à la création d'une pensée vivante et opérationnelle sur le problème Huntington. Au delà du cadre de cette maladie la démarche subversive de Dingdingdong s'applique à d'autres maladies et intéresse plus largement encore tous les 'NBP (Non Bien Portants). Ce collectif ne vise ni l'information basique autour de la maladie, ni la collecte de fonds pour améliorer le sort des malades. C'est un rassemblement d'individus animés par une même tension vitale à produire de la pensée innovante à partir de l'expérience de cette maladie.
Le collectif REV , concerné par la schizophrénie, fournit un bel exemple de la démarche. Ce collectif ne considère pas qu'il regroupe des schizophrènes, mais des 'entendeurs de voix'. Entendre des voix, c'est compliqué, inconfortable et parfois douloureux, ce n'est pas normal mais ça n'implique pas forcément de prendre des neuroleptiques à vie parce que "schizophrène". 'Entendeurs de voix' parce qu'alors cela signifie avoir une compétence que les "normaux" n'ont pas. Cela veut dire aussi que le traitement doit viser à mieux vivre avec cette capacité plutôt qu'à l'éradiquer. Leur question n'est plus : comment je traite ma schizophrénie ? mais : comment je vis mieux avec ma faculté d'entendre des voix ?
Pour moi cela recoupe les questions de normalité et de normativité posées par Georges Canguilhem puis Philippe Barrier précedemment évoquées dans ce blog sur le post http://emagicworkshop.blogspot.fr/2014/05/guerir-du-desir-de-guerir.html
Enfin Dingdingdong parle d'usagers, plutôt que de patients ou de malades. Cette distinction est profondément subversive car elle permet « politiquement, de construire une différence entre les associations de patients mis au service de leur maladie telle qu’elle a été définie par les industriels (et, à leur suite, les scientifiques), et les associations d’usagers produisant un savoir propre à propos du paysage de diagnostics, de traitements, de rapports thérapeutiques dont ils sont usagers. .../... Les associations d’usagers pourraient jouer un rôle crucial (…) car elles pourraient devenir capables de changer le problème : d’échapper à la dénonciation toute faite – la cupidité des industries, la faiblesse des « preuves » scientifiques, la crédulité du public – et de mettre en question la machine elle-même, c’est-à-dire ce qui fait tenir ses différentes pièces. »
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