mardi 8 mai 2012

Bithérapie et libido: nostalgie de la belle époque

Comme nous le dit Richard Bohringer  en parlant du traitement de son hépatite:
[Ces pilules] m'ont coupé le sexe. Je n'ai plus rien entre les cuisses qu'une vieille trompe d'éléphant qui ne bat aucune mesure. En effet, la libido est la première mise à mal par les effets secondaires de la bithérapie. Voici donc, en antidote, quelques sonnets de Pierre Louÿs, poète et érotomane de la belle époque, qui me parait aujourd'hui presque aussi reculée que l'époque d'avant les pilules roses et les seringues rouges. A lire également, un passage d'un poème de Pierre Horn qui ne manque ni d'inspiration, ni de souffle.

AUX CHEVEUX


Donne, maîtresse, tes cheveux couleur de flamme
Prends une mèche entre tes doigts efféminés
Et pour le spasme aigu au fond de l'âme
Apprends le rituel des baisers condamnés


Tu cerneras mon gland dans tes cheveux de soie
Comme un casque de pourpre au cimier lourd de crins.
Et tu feras sourire en mon âme la joie
De m'envirginiser loin des coeurs utérins.


Car dans l'étreinte délicate de la boucle
Fonceront sur mon gland des rougeurs d'escarboucle,
Feux d'ombre, attisés par les sursauts nerveux


Et si tes rayons blonds, ta mèche d'or, maîtresse,
Précipite ardemment la subtile caresse,
De longs jets pâles pisseront sur tes cheveux.  
22 Novembre1890


COUTURIÈRE

Sous la planche de fer ses jambes semblent moudre
Elles se croisent, vont, viennent, en haut, en bas
Et scandent pied à pied, d'un geste faible et las
Le mouvement rythmé de la machine à coudre


Mais les cuisses à nu se frôlent ardemment
Le clitoris s'éveille et s'excite et raidit
C'est encor le désir de baiser qui grandit
La rage d'être jeune et chaude sans amant.


Ô joie ! au frottement la vulve s'exaspère;
La masturbation clandestine s'opère;
Dans l'atelier couseur personne n'en sait rien


Et l'étau convulsif des cuisses opprimées
Fait jaillir au hasard dans les jupes fermées
Le pâle écoulement du flot vénérien.   
3 Novembre 1890


Et si ces vers osés restent impuissants à nous remembrer la belle époque d'avant les pilules, d'autres vers plus doux sauront nous consoler. Voici les dernières strophes d'un poème plein de tendresse et d'humour par Pierre Günst Horn. Illustration de Goya" La male noche".

QUAND JE SERAI MORT JE SERAI VENT… !
.../.. 

Je me glisserai au fond de ton oreille,
Pour t’avertir que je suis un vent fripon
Ta bouche de sourire deviendra suçon !.

Je creuserai ta nuque,
Te ferai raidir le dos,
Tendre les aréoles de tes seins.
De tes doigts tu m’accompagneras
Dans le creux de tes reins
Nous presserons ton ventre pour le mettre à plat,
Nous tendrons tes cuisses, bloquerons tes mollets,
Écarterons tes orteils. Tes genoux relâchés
Nous nous précipiterons
Non pas vers Astarté mais vers Vénus,
Nous entrerons comme chez nous,

Nous longerons le col et dans un cri vagissant
Nous partirons ensemble dans le pays de la transcendance, Jusqu’à la déliquescence.

Devenu un vent ramolli
Je dormirai d’un sommeil de bienheureux
Au fond de ton ventre,
Jusqu’au petit matin ou d’un coup de rein
Tu m’expulseras sans te souvenir,
Que j’ai été pour quelque chose dans tes plaisirs !

Je redeviendrai un vent, sous la forme d’un pet errant.

Pierre HORN.

samedi 5 mai 2012

Hepatite, interferon et littérature

Au fil des semaines, Immanquablement l'interféron et la ribavirine nous ramènent à notre canapé. Ecroulé dans un sofa nos journées se traînent. Alors, pourquoi pas un peu de lecture ?
D’autant plus que nous aimerions bien pouvoir décrire à nos proches ces  mystérieux effets secondaires psychiques, qui ne  sont pas tant secondaires que ça (les effets :). 
Voici donc  trois livres qui traitent de manière romanesque des affres de l’hépatite, des déboires de la ribavirine et des surprises de l’interféron. Deux autres ouvrages sur le même sujet sont aussi parus, malheureusement je ne les ai pas encore lus.

On aurait pu craindre le pire, comme chaque fois qu'un écrivain annonce un texte sur sa maladie, son cancer, son infarctus et, plus généralement, sa découverte de la métaphysique à l'occasion d'ennuis de santé. Au contraire, le roman de Ravalec se place dans l'excellente lignée de Copi - bel esprit argentin de Paris qui osa nous faire rire avec son sida. Le narrateur ahuri commence par découvrir le détail des souffrances qui lui sont promises, son agonie prochaine et les effets secondaires du traitement - le tout gonflé par la masse cafardeuse des informations glanées sur Internet, quand on n'est pas médecin. Dans cette déconfiture, Ravalec conserve un ton alerte, rapide, incisif, toujours à l'aise pour mêler langue écrite et langue parlée, « la situation n'était pas joyeuse joyeuse ». D'ailleurs, sa malchance nous concerne tous, comme une version de cette approche de la mort qui se précise dans nos têtes après quarante ans. Sauf que, pour le dire, Ravalec sait rester au plus près de la vie concrète, tempérer l'horreur de la maladie par les détails drolatiques, la résignation ahurie des enfants quand il commence à « péter les plombs », puis son entrée dans un groupe de soutien psychologique où les malades apprennent à lutter contre la déprime en criant ensemble « Houla-la ».
Benoît Duteurtre, à propos d'Hépatite C de Vicent Ravalec, le Figaro, 10 mai 2007
Mon avis : A lire et à faire lire à vos proches avant le traitement pour dédramatiser et faire savoir.


Rien n'est simple chez Richard Bohringer , même les textes. On délire on se perd parfois dans la poésie de cette histoire mais on reste sur ce 'bateau ivre' jusqu'au bout car Bohringer est un conteur né qui sait parler avec humanité de cette maladie qu'il connait trop.
Quelques extraits pour donner le ton :
"Grand singe, qu'est ce que je vais foutre dans la jungle avec ces pilules ? Elles m'ont coupé le sexe. Je n'ai plus rien entre les cuisses qu'une vieille trompe d'éléphant qui ne bat aucune mesure. De pilules en pilules, je descends au fond d'une fournaise éteinte, comme dans une fente trop grande  où je noie mon bas-ventre sans aucune conviction."(p76)
"Ne laisser aucune vie au serpent !
Je vais vous dire, belle infirmière. Cette putain de maladie plus les petites pilules roses. Je me souviendrai toujours de leur exacte couleur. Un rose qui ne veut pas le dire ! Un rose chimique ! Et puis cette putain de piqûre qui te transperce la tête et fait basculer la raison, comme un cargo coulerait. Lentement, puis d'un coup pris par la pieuvre géante des abysses. La petite bête, le petit virus, c'est une vraie saloperie.../... "(p152)
Mon avis : Pour les amateurs de croisières en bateaux ivres et les fans de Richard Bohringer.

Je suis en train de lire esprit de combat. C'est à la fois le récit de soixante douze semaines de bi-thérapie et celui d'une lutte contre un traumatisme passé catalysé par le traitement. Le ton est  lyrique  mais précis avec quelques traits d'humour bienvenus. Je cite :
"l'épuisement fréquemment induit par le traitement, confère spontanément à "l'hépatant" une propension irrésistible pour la décompression prolongée sur canapé, accompagnée pour moi d'un état d'hébètement et de sidération avancé. La descente d'hémoglobine permet d'aggraver le phénomène et de tester dans son salon les effets d'une ascension rapide, suivie d'un séjour prolongé vers les sommets de l’Himalaya, mais sans les agréments du panorama.../... (p37)
Tous les détails sur le livre et le parcours de son auteure : http://survivreausida.net/a10339-laure-a-ecrire-pour-survivre-aux-traitem.html
Mon avis: Un livre  précis dense et dur qui au delà des notices de mise en garde et des articles médicaux dépeint la réalité des effets secondaires ressentis.  Avis aux interferonés bilieux: en raison du réalisme dramatique de certains passages, n'ouvrez ce livre que les jours de grande forme, sinon prétez le à votre hépatologue .


Une nouveauté, parue en juin 2012:

La diagonale du foie - Chroniques sous interféron Andrea Visconti Editions La Tintaine
Après des années d’errance, quand le corps se rebelle et nous rappelle qu’il n’est pas indestructible, quand l’hépatite C se déclare comme une séquelle des mauvais traitements infligés, sur qui peut-on compter ?
Avec beaucoup d’humour, Andrea Visconti nous entraîne à sa suite dans ce maelström physique et psychologique qu’est une bithérapie interféron – ribavirine, au cours de laquelle son irrésistible envie de vivre pourra s’appuyer sur une amitié atypique.


Nul besoin de s’éloigner pour une grande aventure, un traitement par interféron suffit (...) Dr Patrick Delasalle.
http://www.ladiagonaledufoie.com/index.html 


Paru en octobre 2012,
L'autobiographie de Nicole Bordeleau est un témoignage rempli d'espoir sur la puissance de la force intérieure, du courage et de la résilience.

'A 38 ans un diagnostic d'hépatite C vient fracasser la vie de Nicole Bordeleau. Débute alors un long parcours de recherche intérieure qui l'entraînera au coeur des zones sinistrées de son passé, dont elle doit s'affranchir pour mieux se recontruire. Peu à peu l'évidence se révèle : il ne faut pas attendre de guérir pour vivre. Vivre, c'est guérir.'

http://www.editions-homme.com/vivre-guerir-/nicole-bordeleau/livre/9782761934954


Paru en juillet 2013 ,
Hépatite C, le roman d'un malade. Michel Bonjour
 " Ceci n'est ni un livre, ni un roman, ni une communication médicale. Ceci est le témoignage de la transformation d'un malade en " hépatant ". Un malade, une maladie chronique, un érudit, une formidable envie de comprendre, des rencontres, de l'humour, des heures de recherche, de souffrance et voilà ce qui sort du cocon, une chrysalide. Ce témoignage veut écrire une autre citoyenneté de la maladie. On peut rêver d'un malade véritablement acteur de sa prise en charge, on dépasse consentement éclairé car c'est le patient qui met lui-même la lumière sur sa pathologie. Le patient n'a plus à être impatient car il est acteur d'un nouveau champ relationnel : l'éducation thérapeutique. " Docteur Melin.






Encore un texte à signaler, paru aux éditions pepper chez  l'harmattan : Merci de vos commentaires car je ne l'ai pas lu.

http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=27187





Enfin, un ouvrage paru en 2003 et que je viens de découvrir : 'Comment vit on avec une hépatite' de Thomas Laurenceau et Patrick Marcellin. Du diagnostic à la prise en charge, de la prévention aux traitements, des problèmes sociaux aux médicaments de demain, ce livre aborde dans un style accessible à tous l’ensemble des questions qui peuvent se poser aux personnes atteintes d’hépatite et à leur entourage. Fruit d’un dialogue entre un malade et un médecin, il est symbolique de cette approche nouvelle que prônent les auteurs, pour un combat commun contre la maladie. Cette nouvelle édition, entièrement remaniée, est attendue par de nombreux malades, mais aussi par les médecins, tant il est vrai que cet ouvrage est devenu une référence en matière de vulgarisation des hépatites. Thomas Laurenceau, journaliste et écrivain, est l’une des 500 000 personnes atteintes d’hépatite chronique C en France. Il est membre de l’association SOS Hépatites.
Le professeur Patrick Marcellin, expert international dans le domaine des hépatites virales, exerce dans le service d’hépatologie de l’Hôpital Beaujon, à Clichy. Il est aussi chercheur dans le laboratoire U481 de l’INSERM.

Ozias

vendredi 27 avril 2012

Interféron: les plus belles injections

Dans le traitement de l'hépatite C s'il est un grand moment, c'est bien celui de l'injection hebdomadaire d'interféron. Une plongée dans les eaux sombres du spleen et de la fatigue et la promesse de quelques jours de navigation ralentie entre canapé et la boîte de paracetamol. On trouve sur Utube de nombreuses vidéos à ce sujet. Je vous propose mon 'best of' des meilleurs films . Cliquez pour voir et bonne projection !
Ozias

Comme toujours,  vos mails sont bienvenus à: emagic.workshop@gmail.com

Isolated virus Killer version 2008. J'adore cette vidéo et particulièrement la chanson du film 'negative is positive, positive is negative'. C'est bourré d'humour noir. J'aime !
Voyez vous même en cliquant le lien suivant :


Isolated Virus killer 2008
                         




Isolated virus Killer version 2000. Une version plus ancienne, muette,  plus classique aussi par l'illustration musicale et le viré sépia, plus lyrique également, mais ô combien expressive ! Une vrai démonstration de spleen interféroné. Merci Isolated Virus Killer !

Isolated Virus Killer 2000
                         


Le troisième clip, en français et sur le ton de l'humour est réalisé par par Nicolas Pirson dont au passage je recommande vivement  le site : http://tatactic.blogspot.fr/
Le lien ci dessous présente cette  perle autant s pédagogique que truffée  d'humour et  d'autodérision.

Nicolas Pirson 
                         



Enfin un 'long métrage' hispanique nous faisant découvrir les joies d'une nuit sous interféron en cinémascope. La qualité technique, les prises de vue et la lumière sont d'un esthétisme élaboré. Ne ratez pas le générique !

                            
Voici donc les vidéos que je sélectionnerais pour Cannes dans la catégorie 'HVC'. Il en existe bien d'autres. Une simple recherche sur Utube avec les mots clé 'injection interferon HCV' renvoie 460 résultats. Merci de me faire découvrir les vôtres.
Ozias

lundi 16 avril 2012

Mon virus, ma crevette: portrait selon Francis Ponge.

Ma crevette 
Je l'ai déjà dit, alors que d'autres 'combattent leur crabe', ou bien chassent leur dragon, moi 'je me débats avec ma crevette', c'est à dire contre mon virus. Je trouve que le surnom  de crevette convient bien à ce cher VHC qui, comme la crevette est un gibier à la fois discret  et farouche. Comme la crevette, le VHC prend corps et identité suite  à une révélation : celle du minuscule monstre subtilement pêché par le laboratoire dans une goutte de sang. Enfin, tout comme la crevette le VHC est discret et capon, mais tant de circonspection ne lui suffira pas. Maintenant que je l'ai vu  je le traque sans répit ...avec mon épuisette. 
Pour le plaisir de l'illustration, quelques extraits de la prose virtuose de Francis Ponge  :

La crevette,


Plusieurs qualités ou circonstances font l’un des objets les plus pudiques au monde et le gibier le plus farouche peut être pour la contemplation d’un petit animal qu’il importe sans doute moins de nommer d’abord que d’évoquer avec précaution, de laisser s’engager de son mouvement propre (aux fosses, aux galeries) dans le conduit des circonlocutions, d’atteindre enfin par la parole au point dialectique où le situent sa forme, son milieu, sa condition muette et l’exercice de sa profession juste. La Crevette…/…

La tête sous un heaume soudée au thorax et l’abdomen qui s’y articule comprimés dans une carapace mais vitreuse et flexible. Pattes-mâchoires, pattes ambulatoires, palpes, antennules : soit en tout dix-neuf paires d’appendices différenciés,  Anachronique nef, tu as trop d’organes de circonspection et tu en seras trahie…./…Tes organes de circonspection te retiendront dans mon épuisette. Crevette.

…/…Enfin, si armée soit elle, si douée de perfection, [La crevette] a besoin d’une révélation pour devenir de sa propre identité tout à fait affirmative : et cette révélation peu d’individus parmi l’espèce la connaissent : par une mort privilégiée, la mort en rose à l’occasion de l’élévation (vraiment peu habituelle) de leur milieu naturel à une haute température. Le révélateur de la crevette est son eau de cuisson.

D’après Francis Ponge (La crevette 1926-34,  Pièces, Gallimard 1962).

jeudi 12 avril 2012

Votre Hépatite C, comment l'aimez vous?

En suivant le lien ci dessous vos trouvez un formulaire anonyme qui vise à connaître et témoigner des relations  qui existent entre nous et  nos virus et à caractériser la spécificité d'une maladie telle que l'hépatite C. 
Aucune question n'est obligatoire ni fermée. Les réponses sont anonymes le format de réponse est libre. Un commentaire, quelques mots  ou bien un texte en réponse aux questions qui vous parlent ou vous interpellent. Chacun de vos témoignages compte. Au cours des prochains mois je ferai un retour sur les réponses reçues. Donc, merci d'avance pour vos témoignages, vos commentaires et votre temps.
Ozias
Le lien du formulairehttps://docs.google.com/spreadsheet/viewform?formkey=dGRVVWctNXU2RlZ3V3M2QVUta3lheFE6MQ

mardi 10 avril 2012

Cent noms pour un innommable virus: aidez moi !

Dans Libération du 26 Août 2011 on pouvait lire "En congé maladie depuis le 17 janvier pour combattre son vilain crabe récidiviste, Steve Jobs a annoncé, mercredi, après la clôture de Wall Street, qu’il démissionnait de son poste de chief executive officer(PDG). "
Si certains 'combattent leur crabe', moi 'je me débats avec ma crevette'. Oui, ma crevette, c'est un des  petits noms que je donne à mon virus. Vous en trouverez quelques autres, un peu plus loin. 
Peut être vous avez  vous aussi des surnoms drôles ou évocateurs  pour votre fidèle compagnon.
 Si vous voulez les partager vous pouvez laisser un commentaire ou envoyer un mail à emagic.workshop@gmail.com en indiquant si vous souhaitez que vos trouvailles soient publiées. 

Quelques exemples :'ma crevette, mon invader, pacman (il a bon appétit), mon colon (il se croit chez lui) ,  prédator, mon ami de trente ans (datation estimée), Torchefoie, Fibrose( 13ème mois du calendrier révolutionnaire), mon coucou (il pond ses oeuf dans le foie des autres), Bob l'éponge (cf image du foie cirrhosé),ma troisième couille (qui ne me sert à rien), la C (classique), la grande muette (qui a sû se taire pendant trente ans), le sniper (discret et dangereux), kiscool (son fameux effet retard), mon teigneux (il l'est et aussi un peu ténia), charon (capable de faire traverser le léthé), ma charogne (amical mais pas tant que ça), l'Autre (c'est l'enfer), 55nanos (dimension estimée). 
Voilà vingt noms. A vous de jouer pour la suite. Le meilleur contributeur ainsi que le  découvreur du 100ème nom du virus   recevront un cadeau surprise !
Mon free rider Apprenti hépatant
Tanguy, mon colocataire VIPduVHC
Mon intrus, mon squatter Christine Soler
Tsé-Tsé Véronique Bordes
"My dirty little secret"


A bientôt,
Ozias

lundi 2 avril 2012

Cruiser ou Hépatite : de difficiles retours à la ruche.

Effets secondaires Cruiser 
« Une étude parue le 30 mars 2012  dans la revue américaine Science  et pilotée par Mickaël Henry, chercheur à l’INRA, et Axel Decourtye, de l’Acta, a montré que le thiamethoxam, matière active de l'insecticide Cruiser, pouvait désorienter les abeilles domestiques.
Avant d'être lâchées à 1 km de leur ruche, la moitié des pollinisatrices avaient ingéré une solution sucrée contenant une dose non létale de thiamethoxam proche, de ce que les insectes sont susceptibles d'ingérer lorsqu'ils butinent des fleurs de cultures traitées (maïs et colza, notamment) pendant une journée. Comparées aux abeilles témoins, les abeilles exposées à l'insecticide avaient de deux à trois fois plus de chances de ne pas rentrer dans leur ruche à la fin de la journée, et donc de mourir. À noter que les abeilles traitées qui étaient parvenues à retrouver leur chemin présentaient un comportement normal dans les jours qui ont suivi.

«Notre étude soulève la question des procédures d'autorisation des pesticides, explique Mickaël Henry. Jusqu'à présent, ces procédures demandaient surtout aux fabricants de s'assurer que les doses rencontrées sur le terrain ne tuaient pas les abeilles, mais elles ont complètement négligé les conséquences de doses non létales qui peuvent cependant provoquer des problèmes de comportement» susceptibles de remettre en cause la survie de la ruche. » 

Je suis une abeille qui a le bourdon :

Comme une abeille traitée au cruiser,  j’ai survécu  à ma  bithérapie.  Aujourd’hui finie la grosse fatigue et les inquiétants problèmes de peau. Pourtant, deux mois après la dernière injection et la dernière prise de ribavirine, il m’est difficile de retrouver l’appétit, la libido ainsi que ‘le chemin de la ruche’. Après avoir nagé trop longtemps dans une onde mauvaise à boire. Je me trouve  vieilli sans ambition ni appétit. Je ne me reconnais plus. On ne me reconnait plus non plus car mes cheveux, ma silhouette et mon allure ont changé. Trop de questions sur l’avenir, ma guérison et mon état de santé. Les objectifs de vie, de carrière que je m’étais fixés, et qui me permettaient de tenir le cap, sont devenus obsolètes.
Fantômes du passé... Forcément l’hépatite conduit au passé. Au temps de l’origine, le jour où le virus dans mon sang est passé... Ainsi le passé ressuscite et se mêle au présent comme à contretemps. Je suis désorienté par ces intrusions et j’ai du mal à reprendre le train des choses, à retrouver ma ruche.
Ozias

SOS hépatite C: après le traitement :
«Les problèmes liés à l’interféron peuvent subsister pendant trois à six mois. Psychologiquement, nous devons abandonner notre statut de malade ; nous ne voyons plus notre médecin aussi régulièrement, nous pouvons nous sentir perdus. Nous avions mis toute notre énergie à nous battre contre la maladie, et tout d’un coup nous n’avons plus d’objectif. Il
faut aussi supporter l’incertitude, attendre six mois, voire un an après l’arrêt du traitement, pour savoir de façon certaine si le virus a disparu. Pendant ces quelques mois d’attente, toute l’angoisse accumulée pendant le traitement peut ressortir…/… Paradoxalement, nous devons aussi faire le deuil d’une maladie avec laquelle nous avions appris à vivre depuis des
années. Reprendre une vie 'normale', un travail, paraît alors compliqué.»

D'après SOS hépatites: brochure  'Vivre au  mieux pendant le traitement de l’hépatite C'. http://www.soshepatites.org/publications/docpdf/12.pdf

mardi 27 mars 2012

Interféron, Ribavirine : Effets collatéraux.

La perte de libido, la sécheresse des muqueuses  sont des effets secondaires que constatent la plupart des patients en traitement. Bref, la vie sexuelle du patient ainsi que celle de son couple sont altérées. Le désir se faisant plus rare il est donc plus difficile à partager. Par voie de conséquence, de part et d'autre, le 'corps à corps' est plus compliqué et le plaisir a tendance à devenir manuel ou solitaire.
Pour les messieurs (conjoints ou patients) et  en vue de  garder  ‘tête haute’  tout en endurant  la ‘mauvaise passe’ du traitement,  voici un texte qui sait de quoi je parle. Pour les dames, dans l'espoir de témoignages de qualité,  l'illustration tiendra lieu de discours.

16 ans, 6 mois, 18 jours                                                                             Dimanche 28 avril 1940

Feodor Rojankovsky (dit Rojan) Aquarelle 1930
"Ce qu’il y a d’extraordinaire quand je me fais jouir, c’est cet instant que j’appelle le passage de l’équilibriste : la seconde où juste avant de jouir, je n’ai pas encore joui. Le sperme est là, prêt à jaillir, mais je le retiens de toutes mes forces. L’anneau de mon gland est si rouge, mon gland lui-même tellement gonflé, tellement prêt à éclater que je lâche mon sexe. Je retiens mon sperme de toutes mes forces en regardant mon sexe vibrer. Je serre si fort mes poings,  mes paupières et mes mâchoires que mon corps vibre autant que lui. C’est le moment que j’appelle le passage de l’équilibriste. Mes yeux chavirent derrière mes paupières, je respire à tout petits coups, je chasse toutes les images excitantes – les seins,   les fesses, les cuisses, la peau soyeuse de nos amies – et le sperme s’arrête dans cette colonne en fusion, là, juste au bord du cratère. C’est vrai qu’on peut penser à un volcan au bord de l’éruption. Il ne faut pas laisser cette lave redescendre. ../.. Dès que je sens redescendre, mon pouce et mon index s’enroulent autour de mon anneau et je joue à le maintenir juste au bord, tout bouillonnant (de la lave, oui, ou de la sève tellement la queue ressemble à une branche tendue et noueuse dans ces moments-là !) Il faut être très prudent, très précis, c’est une question de millimètre, peut-être moins. Ma queue toute entière est tellement sensible que mon gland pourrait exploser juste si on lui soufflait dessus ou si le drap l’effleurait. Je peux encore retenir l’éruption une fois, deux fois, et c‘est chaque fois un vrai délice. Mais le délice absolu c’est cet instant où, finalement, je perds pour de bon, où le sperme submerge tout et coule tout brûlant sur le dos de ma main. Ah ! la merveilleuse défaite ! ça aussi c’est difficile à décrire, tout ce dedans qui passe au dehors et en même temps ce plaisir qui t’engloutit… Cette éruption est un engloutissement ! C’est la chute de l’équilibriste dans le cratère en fusion ! Ah ! Cet éblouissement dans les ténèbres ! .../... une 'apothéose' ".

Extrait de ‘Journal d’un corps’ de Daniel Pennac, paru chez Gallimard en 2012.

jeudi 22 mars 2012

Décor: Encore des corps !

Voilà. Le printemps... Mon corps retrouvé.  Oh, oui, Montaigne, la belle lumière de la santé !
Mon corps émois,  mon corps est moi , mon corps et moi. Mon  corps qui m’ est si intimement étranger.  
Un corps pour vivre pour souffrir, pour s'offrir, pour aimer pour prier, pour admirer et pour rêver.
Bref, 'nous n'avons pas un corps, nous SOMMES un corps' .


Dans les tableaux de la renaissance ce sont d’abord les corps qui renaissent et se donnent à admirer. Fini le corps symbolique ou corseté du  moyen âge, finis les corps objets de lamentation. Le corps s'expose et devient sujet d’admiration et de représentation. Les toiles  de la renaissance ne parlent plus de résurrection au ciel mais plutôt de renaissance sur la terre. Les Dieux, et le sacré deviennent des prétextes à révéler la beauté du corps et ce sont les corps qui incarnent la beauté de la création. En illustration, et pour le plaisir, quelques grandes œuvres.

Nos corps, nous même.  Nos corps, nous mènent.  Notre corps qui es sur la terre, restes y !
Santé,
Ozias
Corps du moyen âge.
St Sébastien. Rome, XIème siècle 










Le Perugin. St Sébastien. Vers 1490-1495
Donnato Bramante. 1444-1514. Cristo alla colonna





Saint Jean Baptiste. Léonard de Vinci.
Michel Ange. Christ sur la croix.

Tintoret. Suzanne et les vieillards

Rembrandt. Betsabée au bain.

Titien. Venus avec Cupidon et un organiste.1548
'En occident, au moyen âge, dans la sculpture médiévale, il n'y a pas de caractérisation des sexes par ce qu'on appelle des "caractères sexuels secondaires". Il y a des femmes d'un côté, les hommes de l'autre, avec les attributs vestimentaires qui les caractérisent, mais on ne différencie que très peu la morphologie entre un homme et une femme.
A la renaissance, quand Michel-Ange découvre les sculptures de la Grèce antique, il est fasciné par le fait qu'en voyant un simple fragment de corps on peut dire s'il s'agit d'un homme ou d'une femme. La moindre partie est donc sexuée, et il n'y a pas que le sexe pour différencier un homme d'une femme.  Un crâne de femme ne ressemble pas à un crâne d'homme. La forme de la courbure de la colonne vertébrale n'est pas non plus la même. La disposition et l'ampleur des masses graisseuses sont différentes, ainsi que la pilosité, la couleur de la peau, des cheveux..Et dans la statutaire grecque, un pied d'Aphrodite n'est pas un pied d'Apollon'. 
Philippe Comar

dimanche 18 mars 2012

Lettres à un virus: morceaux choisis.

L'exercice de lettre à son virus, ou lettre de son virus,  pourrait devenir un classique de la littérature hépatante. Voici quelques exemples ci dessous.
Bien sûr, je serais plus que ravi d'ajouter vos pépites à cette collection. Si vous avez d'autres liens, d'autres lettres à partager  vous pouvez les adresser à emagic.workshop@gmail.com en indiquant si vous souhaitez que votre contribution soit postée sur ce blog.
A bientôt,
Ozias

Cerise : The Replicant : chroniques d’un virus de l’hépatite C

Je suis arrivé un soir de fête. Il y avait de la super musique, très forte, très rock, beaucoup
d’agitation, d’allers-venues, de joie et… de partage.
J’ai pensé qu’il était temps de quitter ma famille nombreuse et de voler de mes propres ailes vers une nouvelle contrée.J’avais décidé de trouver MA planète vierge où m’installer, assurer ma descendance et pourquoi pas, partir à la conquête de l’univers. C’est elle que j’ai choisi. Elle me plaisait bien. Aujourd’hui après 25 ans en territoire occupé, je ne regrette toujours pas mon choix, même s’il est temps pour moi de disparaître à jamais…Elle aimait faire la fête à l’excès, du vendredi au mercredi. Produits licites, illicites, un savant mélange…
Nous nous ressourcions le jeudi, diète totale, elle pour repartir à l’assaut d’une nouvelle semaine chargée, moi pour me multiplier, doucement, mais sûrement. Pendant plusieurs années, nous avons vécu en parfaite harmonie. Elle n’avait pas conscience de mon existence qui se multipliait en elle à l’infini et elle me délectait de tout ce qui fait croître notre entité. Nous nous activions doucement à construire nos nids où nous élèverions notre progéniture, qui à son tour ferait de même. Tout ce temps, nous avons marché avec des patins pour ne pas faire trop de bruit et la réveiller.

Notre invasion a commencé à être prise au sérieux lorsqu’ils nous ont donné un nom. Nous n’étions plus de vulgaires « non A-non B ». Les « non machin – non bidule» comme aimaient à se moquer de nous Hépatite A et Hépatite B. Désormais nous marchons dans la cour des Grands et nous prénommons Hépatite C.
Un nom qui, je le souhaite, marquera l’Histoire avec un grand « H ».

Dans son histoire à elle, avec un petit « h », en 1994, c’est aussi l’époque qu’elle choisit pour arrêter tous les produits illicites. Le licite perdura, toutefois, les soirs de fête. Ces huit dernières années, elle boit rarement de l’alcool. Cela, certes, nous affaiblit, mais au moins le peu de fois où elle le fait, c’est avec de bons crus qu’elle nous entretient.

Elle essaya de nous exterminer une première fois en 2002. Elle a sorti l’artillerie lourde : Viraféron Peg et Rébétol. Je l’avoue, nous avons essuyé de grosses pertes, surtout qu’elle nous a pris en traître.
A l’époque son petit foie était encore bien tendre : nous avons déménagé en catastrophe notre population et sommes allés nous terrer dans un endroit bien souple et confortable. Nous avons placé nos chevaux de Troie sur plusieurs cicatrices. Ils étaient occupés par des sous-réplicants… Les guerres coloniales nous avaient bien inspiré : pendant que la chair à canon se faisait décimer, nous nous organisions pour tenir le siège en arrière du combat, bien planqués. La lutte fut âpre mais elle arriva à bout de ces leurres au bout de 3 mois.
Elle nous a nourri de tirs répétés pendant six mois, croyant nous avoir tous exterminés. J’ai perdu une de mes femmes, beaucoup d’enfants, de cousins, neveux, nièces…. J’en pleure encore lorsque j’y pense.
Il régnait un climat généralisé de tristesse et nous cherchions la vengeance la plus cruelle qui soit pour qu’elle paye nos morts et notre chagrin. Et nous avons trouvé !! On l’a bien eue!!!
Nous lui avons fait miroiter avoir quitté en totalité notre planète au bout de 3 mois grâce à ces mots magiques : « PCR négatif ».
Ah ! On a bien rigolé pendant qu’elle nous nourrissait d’un peu d’alcool lorsqu’elle n’avait pas le moral, ça permettait d’hiberner en attendant des temps plus cléments. Au bout de 6 mois, lorsque son moral fut au plus bas et son corps décharné et vide d’énergie, que l’artillerie lourde cessa pour de bon, nous sommes revenus comme des fleurs au chant d’un : « PCR positif ». Le coup lui fut fatal, elle largua tout : sa vie, son compagnon, sa maison et elle partit recommencer sa vie ailleurs. Enfin, elle ne partit pas vraiment en solitaire. On n’est pas des lâcheurs et puis on n’était pas mécontent de voir du pays. Engagez-vous, rengagez-vous qu’y nous disaient.

Beaucoup d’années ont passé, on a continué notre petit bonhomme de chemin, on a proliféré, on s’est fait de bonnes tranches de rigolades, on a aussi eu des moments plus difficiles. Mais, vaille que vaille, notre but ultime, le pompon, le gros lot, le carton plein de notre vie, nous y travaillions : il s’agissait de franchir la ligne d’arrivée barrée par une banderole portant l’inscription « Cirrhose ». Notre vie, notre œuvre !! 
On en était pas loin : elle avait gravi les échelons un à un et aujourd’hui elle avait un « bon F3″ limite F4. Oui, parce que les médecins ne disent pas : « Oh, Madame, vous avez un mauvais F3 ». Non c’est plutôt : « Madame, vous avez un bon F3 ».
Et après un bon F3/F4, qu’est-ce qu’il y a ? Hein ? Allons, allons, un petit effort, c’est écrit juste avant. Après un bon F3, il y a un bon F4 qui va vers…. Vers quoi ? Vers…. la cirrhose. Oui, bravo !!! Autant dire que de F4 à cirrhose, même un unijambiste funambule y arriverait. Donc beaucoup d’espoir régnait dans notre tribu. Oui beaucoup.

Cahin-caha, la prospérité aurait pu être plus spectaculaire et plus rapide mais elle a décidé de mener une vie saine. 
Ça a commencé gentiment par du Desmodium. De temps en temps, elle avait une lubie, elle nous balançait des ampoules de Desmodium pendant trois semaines. Pendant ce temps, nous, on allait dormir tranquillement, le temps qu’elle obtienne des ASAT et ALAT seulement trois fois plus élevés que la norme. Si ça suffisait à la rendre heureuse, eh bien, pourquoi pas. Ensuite on reprenait une vie normale jusqu’à la prochaine douche d’ampoules. Mais, en toute franchise, on se sentait affaiblis. A ça, elle a ajouté une alimentation saine et arrêté toute consommation d’alcool : bilan, on a noté quelques pertes dans la famille.


Et puis là, vlan, badaboum, sans crier gare on a senti que ça s’agitait pire qu’un séisme.
Le 8 novembre 2013, la bombe Hiroshima est tombée sur notre planète : elle était fabriquée à partir d’un combo Pegasys-Copégus. Ce fut l’horreur totale : des Replicants brûlaient sur place, hurlaient, des enfants cherchaient leurs parents au milieu des flammes et de la fumée. Cette nuit je me suis encore éveillé en sursaut, trempé, ces images gravées dans ma rétine.
4 semaines plus tard, inutile de mentir, nous ne sommes guère nombreux sur la planète. Il y a pénurie de tout, les conditions pour survivre sont difficiles, j’erre au travers de champs de batailles à la recherche de survivants.
Depuis quelques jours, les nouveaux-nés meurent les uns après les autres, j’ai réussi à en cacher une quantité indétectable. Je perds la mémoire, j’erre de cicatrices en cicatrices. D’ailleurs sur sa feuille de bilan à S4 j’ai lu : indétectable, oui, « in-dé-tec-table ». A en pleurer !!
Et à S8, qu’écriront-ils sur son bilan pour lui maintenir un moral d’acier? Patience, dans 40 semaines tu pourras enfin t’éclater comme une bête ?

Ce matin, une partie de mon corps est atrophié. J’oublie mes mots, je perds la mémoire, je me sens m’éteindre. Je ne sais pas comment sortir d’ici vivant pour trouver un univers plus chaleureux, tourné vers la fête, qui me permette de m’épanouir et multiplier à nouveau ma descendance.
Je crois que je fais une dépression.


Cerise.

Christine: Lettre à mon Intrus.

Cher intrus,

Girafe et poisson rouge
J'ai appris depuis peu que vous êtes de la famille des « Flaviradae », plus précisément de la branche des hépacivirus. J'en suis fort aise !
Sachez tout de même que cela nous éloigne encore davantage car de mon côté je suis d'une toute autre famille: les «Solerae », plus précisément de la branche des « Christinus ».
Alors, voyez-vous et comprenez bien que nous sommes incompatibles. Imaginez-vous une girafe vivre avec un poisson rouge ? Allez, acceptez cette idée et renoncez à vous accrocher à mon foie, ma foi.

Vous n'obtiendrez rien de plus, que ce que vous m'avez déjà pris alors que j'ignorais votre goût immodéré pour mon organe vital, mon foie. Vous en avez bien profité, alors que j'ignorais votre présence. C'est bien là votre « entourloupe ». Vous êtes passé silencieusement, sans faire de bruit, pour vous loger confortablement sans en payer le prix !
Et bien sachez que cela est fini, je sais depuis des années maintenant comment vous résister ! Je vous ai repéré, étudié, analysé, disséqué... Vous êtes cerné !!!

Sachez que notre liaison dangereuse ne peut plus continuer, j'ai entamé une procédure pour vous expulser. Dès la fin de l'été, cela sera terminé, vous ne serez plus qu'un lointain souvenir.
Cependant, avant de nous séparer, je tiens à vous avouer, car cela serait injuste et ingrat de ma part de ne pas vous reconnaître, quelques bons côtés.
Oui, c'est vrai, je veux vous remercier pour tout ce que vous m'avez appris sur mon corps et ses limites. Oui, je dois vous remercier car grâce à vous j'ai appris une chose essentielle, une nécessité dans ce bas monde : j’ai appris à prendre soin de moi; à veiller à ma santé.

Apprenez mon cher Hépacivirus que grâce à vous, Moi, Christinus j'ai découvert et développé une forme d'ascèse propice à mon bien-être. Moi qui vivais sans limite et dans l'excès, j'ai dû m'apprivoiser....

Alors devenons adultes vous et moi, séparons-nous comme il se doit :
Gardons le meilleur, transformons le pire, faisons de nous une belle histoire !!!

Christine


Pour les lecteurs français, ma propre contribution:


Cher Virus,
Bien que nous ayons probablement voyagé ensemble durant plus de trente ans tu ne m'as été présenté que récemment. D’une certaine façon, pardonne-moi ce manque d’attention. Je devrais t’accueillir comme un vieil ami, mais la situation n’est pas simple pour moi. 
Tu es un Type1 coriace, et j’admire comme tu as su rester discret, silencieux et même secret si longtemps. Ta forte personnalité et grande discrétion m’impressionnent.   Quelle classe !
J’ai grandement apprécié ta réserve qui m’a permis de vivre en ignorant ta présence et aussi le tact avec lequel tu as su préserver ma famille, mes proches. Tu es si fin et si discret que lorsque tu m’as choisi, ni moi, ni  le médecin ne pouvaient  te reconnaître ni percevoir ton travail quotidien dans mon foie et dans ma vie. Tu m’as accordé une vie épatante où j’ai pu pratiquer les sports qui me plaisaient, et profiter des meilleurs plats et des bons vins du monde entier. Jamais malade, jamais en panne, le plein d’énergie et de curiosité pour chaque jour. Vraiment, je n’ai jamais pensé à toi au long de ces trente dernières années. Je n'ai pas à me plaindre.
Tranquille et invisible, tu t’es pourtant fait prendre  à l’occasion d’un contrôle de routine. Je suis presque déçu qu’un animal sauvage de ta classe se soit fait  avoir par un simple chasseur de papillons. J’imaginais une traque plus romanesque. 
Aujourd’hui nous nous connaissons. Je sais qui tu es, ce que tu as fait et quel est ton projet. Non seulement tu t’es accordé la majeure partie de mon foie mais tu viens aussi chambouler ma vie sociale et professionnelle. Ma vie. Maintenant, plus de place pour les projets, les ambitions. Juste nous planquer, prendre soin de moi, et de toi. Epargner mes proches. Virus ! Je veux te tuer! 
D’un autre côté ta présence m’a ramené à moi-même comme rien auparavant n’avait pu le faire. Bon ou méchant, en tout cas aujourd’hui tu as pris le contrôle. Aujourd’hui tu conduis et je te suis assis à la place du mort. Tu m’emmènes voir un autre côté de la vie : L’hôpital où l’on rencontre tout, et tout le monde, la bêtise et la misère, la vie qui bat et renait, la douleur et la mort. Tu me montres partout des cœurs cassés, des corps brisés tout autour de moi. Je découvre ce chemin qui s'ouvre seulement en ouvrant les yeux et prenant le temps. Jusqu’à présent je m’étais tenu loin de ces pays mais aujourd'hui je me demande parfois si je pourrais y vivre et comment m’y installer. 
Tu vois Virus, il m’est difficile ces temps-ci de savoir si je vais te suivre ou reprendre le cours habituel de ma vie. Je demande donc que nous nous séparions... le temps  de faire le point.

En espérant n’avoir plus à t'écrire de nouvelle lettre.
Ozias


For english readers, Ozias's contribution that you can reach thru link below:
http://emagicworkshop.blogspot.fr/2011/11/dear-john-letter.html 


Billy Rubin: correspondance avec ma virus
http://hepatite-c.over-blog.com/article-correspondance-avec-ma-virus-73957051.html
“Au début de ma maladie j'ai cru bon d'écrire à mon virus, je l'imaginais comme étant une femme rousse aux yeux verts, comme les héroïnes des romans noirs américains que l'on voit dans les films avec Bogart…/… » 

http://hepatite-c.over-blog.com/article-correspondance-avec-ma-virus-73957051.html

Caitlin Berrigan  : Letter to a Virus (2007)
http://membrana.us/letter.html 

« This distributable booklet mixes the language of informational brochures with apostrophy. Addressing the virus as one member of a complicated relationship, the letter speaks of those subjective and emotional aspects of illness that are often left out of the conversation. »
http://membrana.us/media/letterToTheVirus_eng.pdf



On peut aussi la lui jouer 'à la Raoul' : Les tontons flingueurs. Michel Audiard

" Non mais t'as déjà vu ça ? En pleine paix ? Il chante et puis crac, un bourre-pif ! Il est complètement fou ce mec. Mais moi, les dingues, je les soigne. Je vais lui faire une ordonnance et une sévère... Je vais lui montrer qui c'est Raoul. Aux quatre coins de Paris qu'on va le retrouver, éparpillé par petits bouts, façon Puzzle. Moi, quand on m'en fait trop je correctionne plus : je dynamite, je disperse, je ventile ! "
http://www.youtube.com/watch?v=T9hDBtX7t8s






dimanche 11 mars 2012

Hépatite: l'appétit pâtit

Ouverture de la pêche samedi mais ça me dit rien, car pas la pêche cette année. Le pêcheur en moi n’a pas envie, ne désire pas. Manque d’énergie, d’appétit, de désir. Désir ambigu, tour à tour manque ou création. Manque de manque, panne de Libido.
Toute puissante Libido. Libido sentidi, libido sciendi, libido dominandi.  Désir de jouir, de savoir, de commander
Eros, prend pitié de moi !  Réchauffe seulement ma Libido et je serai guéri !

Reveille toi Eros, c’est le printemps !

Eros endormi
« D’abord, [Eros] est toujours pauvre et, loin d’être délicat et beau comme on l’imagine généralement, il est dur, sec, sans souliers, sans domicile ; sans avoir jamais d’autre lit que la terre, sans couverture, il dort en plein air, près des portes et dans les rues ; il tient de sa mère [Piéna], et l’indigence est son éternelle compagne. D’un autre côté, suivant le naturel de son père [Poros], il est toujours sur la piste de ce qui est beau et bon (...) »
« "Il est brave, résolu, ardent, excellent chasseur, artisan de ruses toujours nouvelles, amateur de science, plein de ressources, passant sa vie à philosopher, habile sorcier, magicien et sophiste. Il n’est par nature ni immortel ni mortel" (sa mère étant mortelle et son père immortel) "Mais dans la même journée, tantôt il est florissant et plein de vie, tant qu’il est dans l’abondance, tantôt il meurt (...). Ce qu’il acquiert lui échappe sans cesse, de sorte qu’il n’est jamais ni dans l’indigence ni dans l’opulence"[Platon. Le Banquet]

Mes muscles ont fondu, ma peau a séché, mes cheveux sont tombés ou devenus secs comme des baguettes in-peignables. Je doute de ma capacité à plaire, convaincre ou charmer.
La libido, au cours de la bithérapie  agonise. La peau du sexe  s’affine, la colonne s’amollit, le frein s’irrite et la pénétration  douloureuse dissuade de recommencer.
Mon appétit entier a pâti. Ma langue a changé, mon goût a changé. Plus d’épices dans mes assiettes, point de vin dans mes verres, moins de sel dans ma vie.

Reviens vite Eros, c’est déjà le printemps !

Ozias