Mandala, par Jyco |
Voici donc, (ci-dessus), la question que je me suis posée suite aux réactions d'amis avec qui je partageais des posts décrivant des expériences 'non rationnelles' et pouvant être qualifiées de 'mystiques' faites avec la prise de LSA, la technique du rebirth ou plus récemment avec la prise de DMT .
Avec la plupart de mes amis, qui sont athées, ou rationalistes, ou matérialistes, il n'est pas facile d'aborder la question de la spiritualité sans être soupçonné d'admettre que 'quelque chose nous dépasse' qui laisse présager l'existence de quelque Dieu ou de quelque forme de transcendance. Et pourtant, on peut avoir fait l' expérience de la spiritualité sans se croire pour autant prophète qui transmet une parole sacrée. Nietzsche lui même disait : "Je suis mystique et je ne crois en rien".
En réalité, je suis agnostique, je crains toutes les religions qui, en vertu de dogmes différents, ont toutes su massacrer mais qui visiblement n'ont jamais changé profondément ni les comportements humains ni la nature humaine. En effet, au final, comment prétendre qu'un bouddhiste serait meilleur homme qu'un musulman ou un chrétien...?.
Je suis également opposé à toute forme de transcendance athée que celle ci soit technocratique (comme le transhumanisme) ou romantique (comme le mythe du bon sauvage, ou de la loi de la jungle, ou du retour à la terre etc..).
Même si j'ai pu faire, comme beaucoup d'autres, l'expérience de la spiritualité cela ne m'a jamais paru prouver l'existence d'une forme de transcendance devant laquelle se prosterner ou se soumettre.
J'avais pourtant du mal à concilier expérience mystique, agnosticisme et réflexion politique, et surtout à trouver comment en parler, mais dernièrement la lecture de "L'esprit de l'athéisme" de André Comte-Sponville m'a rassuré sur le fait que les athées ne sont pas condamnés à vivre sans spiritualité.
Extraits du chapitre 3 : "Quelle spiritualité pour les athées" ?
André Comte-Sponville part du fait que : " Que nous croyions en dieu au surnaturel ou au sacré ou pas, nous serons confrontés à l'immensité donc à l'infini, à l'éternité, à l'absolu et à nous même".(p147) - à l'expérience du sentiment océanique-. Pour lui, "Que tout esprit soit corporel, ne constitue pas une raison pour cesser de s'en servir , ni pour le vouer exclusivement à lire des cartes routières ou passer des commandes sur Internet."(p150).
Historiquement, "Comme la spiritualité socialement observable en occident fut pendant des siècles celle du christianisme , on a fini par croire que "spiritualité et "religion" sont synonymes" (p151).
Quoi de plus ennuyeux, de plus limité, de plus vain que le moi ? Le réel est plus intéressant, plus vaste, plus varié. La spiritualité est le contraire de l'introspection. c'est une blessure narcissique qui agrandit l'âme (p158). Le silence éternel de ces espaces infinis m'apaise (p161).
Quant au mysticisme, "Il y a assurément de l'indicible, et quand il se montre, c'est le mystique" d'après Wittgenstein. Dans les faits, l'expérience mystique atteint l'unité avec le réel que vise la spiritualité.
Même si la réalité et la perfection sont une même chose, qu'il n'y a ni bien ni mal, cela n'empêche pas de se construire une éthique (p189). C'est parce que l'univers ne propose aucune politique (puisqu'il les contient toutes), que nous sommes tenus, nous d'en choisir une. Cela ne relève pas d'une expérience mystique, car la mystique n'est pas tout. Ne comptons donc pas sur l'absolu pour combattre l'injustice à notre place. Mais pas davantage sur la politique pour tenir lieu de spiritualité. ((p192)
"La vérité n'obéit à personne. C'est en quoi elle est libre et libératrice. Et comme il n'y a rien d'autre que la vérité, elle ne commande pas. Nous voilà sans dieu ni maître." (p197)
...OUF !
Ozias
André Comte-Sponville. L'esprit de l'athéisme. Introduction à une spiritualité sans Dieu.
Albin Michel 2006
Épilogue (Alfred de Vigny) :
À voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse.
Seul le silence est grand; tout le reste est faiblesse