lundi 9 janvier 2012

Hepatite C quoi? (2)

Sur le post ‘Hépatite C quoi ?’,  j’ai reçu la question suivante :

« C’est vraiment trop pénible pour les maladesµ? » 



Tout d’abord, en ce qui me concerne,  le virus que je porte ne m’a jamais causé de problème jusqu’au jour où il a été découvert. Pendant des décennies j’ai pu pratiquer à fond les sports que j’aime et mener une activité professionnelle intense  sans   baisse d’énergie ni problèmes de santé notables.  

Le tableau a changé radicalement dès le diagnostic. Là tout bascule. Combien de temps me reste-t-il ? que vais-je dire à mon entourage ?  Qui vais-je devenir ? Pour moi ces deux dernières questions ont été les plus difficiles à gérer. Je n’ai pas de réponse à la dernière.


La nona hora . Maurizio Catellan

Puis vient le traitement et là les choses deviennent plus tangibles si ce n’est plus simples. En ce qui concerne la pénibilité pour les malades, à ce stade plusieurs axes de réponse : Souffrance, Impact sur la vie sociale, impact psychologique.


http://www.youtube.com/watch?v=dZ0WN2lGqWo
Souffrances : La bithérapie, ça n’est pas un doigt écrasé dans une porte on ne hurle pas de douleur. Par contre oui c’est long et c’est pénible. Toute activité physique devient un calvaire.  Monter des escaliers devient une épreuve et je plains ceux qui doivent assurer un travail physique pendant  leur traitement.  Par moment, même respirer devient pénible. On oublie d’inspirer, il faut reprendre le rythme. Et puis le fond de la gorge colle, toute la nuit il reste sec  comme du carton. La bouteille d’eau au pied du lit que l’on cherche quart d’heure après quart d’heure – sans dormir-.
Il y a aussi les nausées. Superbe coupe faim la Bi-Thérapie ! Remplacer un repas par un biscuit devient une évidence. Et puis tous les cachets (compter entre 6 et 12 par jour) ça gave ! En ce qui me concerne, j’ai perdu 2kg par mois de traitement.
Et puis il y a la peau. Eczéma, prurit, taches, rash, champignons  ou je ne sais trop quoi, bref après quelques mois de traitement ça commence à gratter fort-fort. On voudrait se déshabiller,  changer de peau, décoller des morceaux. Alors on se dénude, on badigeonne  de graisse à traire et on retourne huileux dans ses vêtements tachés de Dexeryl.
Pour ce qui est de la fièvre des insomnies, elles sont si fréquentes qu'on s'y habitue assez facilement, comme à une grippe de six mois.

Impact sur la vie sociale : A ne pas négliger. La fatigue est conséquente donc finies  les sorties à vélo ou au ski avec collègues de bureau, enfants ou voisins. Autour de la maison l’herbe pousse et la haie s’épaissit. Au travail il faut composer avec la fatigue, les paupières lourdes,  la tête qui tombe après le repas. Fini les voyages, les sorties les repas d’affaire le soir.
Petit détail à ne pas négliger, l’abstinence d’alcool. Très difficile à justifier. Désintoxication ?  Maladie ? Conversion ? Bref tout conduit à se tenir à l’écart des sorties, des évènements.  Au niveau communication tout l’art consiste à expliquer, sans pouvoir dire ce que l’on a, que l’on est malade sérieusement, enfin pour quelques mois, mais qu’après tout va rentrer dans l’ordre. Faire comprendre que l’on n’est pas au top tout en gardant sa place autant que possible. Faire savoir que l’on soigne une longue maladie, mais sans la nommer. Laisser penser que c’est un cancer.   Pareil avec les voisins qui voient pousser la haie et qui vous voient de maigrir et de moins en moins sortir. Et toujours ne rien dire car sinon répondre aux  questions : c’est contagieux ? Comment avez-vous attrapé ça ?
Et puis il y a l‘émotivité boostée par l’interféron. La voix qui tremble, la réunion avec les larmes qui montent aux yeux et coulent dans la voiture. L’interféron a des effets bizarres. Penchants mélancoliques, confusion, panique par moment et  d’autres fois rien. En tout cas, mieux vaut prévoir  quelques  anxiolytiques pour rester zen et ne pas sur-réagir en cas de frustration ou de colère.
Pour moi petit à petit, j’ai pu distinguer deux groupes parmi mes relations : les proches à qui j’ai annoncé mon HVC et les autres. Ces derniers,  gênés de  de me voir malade, gênés de me voir gêné ne savent  plus ni que faire ni que dire et s’écartent naturellement.
Je ne parle pas de l’impact que la maladie pourrait avoir auprès de mon banquier en cas de demande de prêt.

Impact psychologique :
En panne. Perte de puissance. Ma vie bascule.  Je suis malade combien ? Combien de temps ? et  pourquoi ? Perte de confiance et de visibilité dans l’avenir. A quoi dois-je consacrer le temps qui me reste ?  Qu’est ce qui est important pour moi, pour mon entourage ? Dans ce bouleversement que va-t-il rester de cette personne que je connais et que j’ai construite  si longtemps sur de stables fondations.
En tout cas moins d’activités, de projets et plus de questions : vais-je garder mon job, comment va se terminer cet épisode : guérison ? Déchéance ? Perte définitive de ma santé ?
 Pour fleurir le tableau je constate également une forte baisse de ma libido ‘normalement liée au traitement’. Bien ‘sûr’ il y a le viagra ‘à prendre avant toute activité sexuelle’ mais franchement même si c’est ‘bandant’, je ne trouve pas ça ‘sexy’.
Face à tant de questions, avec tant de fatigue et tant d’incertitudes c'est tout un art de conserver le même statut, le même fonctionnement, le même rôle social.

De toute façon, c'est la vie,  on ne choisit pas sa maladie. Et puis... ça pourrait être pire !





Santé ! 




Ozias


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