Devant la décoration des mosquées on est frappé par le labyrinthe des ornements géométriques qui en composent les décors. En effet, afin de préserver la pureté du monothéisme et d'éviter toute forme d'idolâtrie, l'islam considère que toute représentation d'être possédant une âme est illicite. Toute forme de représentation est donc bannie alors que la répétition et l’enchevêtrement de motifs géométriques sont censés donner une idée de la grandeur d'Allah et de l'univers qu'il a créé.
Ce qui frappe aussi, c'est que ces répétions de motifs géométriques colorés font souvent penser aux paysages mentaux que l'on voit fréquemment en fermant les yeux après avoir consommé des produits psychotropes tels que du cannabis, ou de la psilocybine.
On sait bien que le haschich a joué un rôle important dans la pratique du soufisme qui est une branche mystique de l'Islam. Déjà au XIIIème siècle,le botaniste Ibn Baitar témoigne que la prise de haschich était un élément du culte Sufi servant à rapprocher les fidèles de leur Dieu. Dans son recueil 'la Connaissance par les gouffres, Henri Michaux, poète et psychonaute écrit justement en parlant des minarets des mosquées 'Ce n'est pas l'Orient qui donnait ces formes, si exagérément minces, effilées. C'étaient ces formes amincies qu'avaient vues et tenté de copier les architectes orientaux, persans et arabes. Le chanvre a fait "les minarets", en a montré la direction à des gens qui l'ont suivie qu'à moitié ou plutôt au dixième."
“Allah is beautiful and he loves beauty.” |
Il est clair que la recherche de la beauté est un thème central pour Islam. Mais le goût pour les arabesques et les patterns géométriques n'est pas propre à l'Islam et soulève cette question de comprendre pourquoi de telles formes sont si agréables à nos yeux.
Pour l'homme préhistorique, déjà les formes géométriques décoraient les grottes.
De très sérieux scientifiques (Tom Froese, Alexander Woodward and Takashi Ikegami) pensent que les décorations des grottes pariétales ont été produites par des chamans sous emprise de drogues hallucinogènes. En effet, en étudiant 40000 ans d'art pariétal ils ont remarqué que l'on retrouve sur les murs de grottes distantes de milliers de kilomètres les mêmes motifs géométriques appelés "instabilités de Turing". Le plus troublant est que ces motifs eux-mêmes semblables à ceux décrits par les témoignages des utilisateurs de plantes ou champignons aux propriétés psychoactives. Les motifs géométriques de type psychédéliques semblent donc être un fond commun que partage et apprécie l'humanité depuis qu'elle existe.
D'après le neurologue Oliver Sacks, si les répétitions de motifs géométriques plaisent, cela pourrait être en quelque sorte, 'par construction' , dans le sens où ces motifs géométriques sont à l'image de l'organisation même du cerveau.
Les hallucinations géométriques que l'on peut ressentir après la prise de produits psychoactifs seraient donc des projections des structures géométriques de notre cerveau. Ainsi, nous trouverions beau l'agencement de motifs géométriques complexes car il nous rappellerait l'agencement de notre propre cerveau, un miroir de nous même en quelque sorte.
Voilà, en tout cas, qui expliquerait pourquoi les motifs géométriques sont largement appréciés depuis l'aube de l'humanité.
La morale de cette histoire, c'est que l'homme a toujours aimé l'art, mais qu'il a aussi toujours aimé les drogues.
Ozias
Sources : Divers articles de Sam Wolfe et autres références ci-dessous